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27/01/1989 | FRANCE | N°61422

France | France, Conseil d'État, 7 / 9 ssr, 27 janvier 1989, 61422


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 3 août 1984 et 27 novembre 1984 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Bernard X..., demeurant à Combles (80360), et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du 17 mai 1984 par lequel le tribunal administratif d' Amiens a rejeté sa demande en décharge des impositions supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti, dans la catégorie des bénéfices agricoles, au titre des années 1971, 1972 et 1973 ;
2°) lui accorde la décharge

des impositions contestées ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code ...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 3 août 1984 et 27 novembre 1984 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Bernard X..., demeurant à Combles (80360), et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du 17 mai 1984 par lequel le tribunal administratif d' Amiens a rejeté sa demande en décharge des impositions supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti, dans la catégorie des bénéfices agricoles, au titre des années 1971, 1972 et 1973 ;
2°) lui accorde la décharge des impositions contestées ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des tribunaux administratifs ;
Vu le code général des impôts ;
Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;
Vu la loi du 30 décembre 1977 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Turquet de Beauregard, Maître des requêtes,
- les observations de Me Cossa, avocat de M. Bernard X...,
- les conclusions de M. Fouquet, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que, pour chacune des années 1971, 1972 et 1973, M. Bernard X..., exploitant agricole, était imposable à l'impôt sur le revenu sous le régime du bénéfice réel ; qu'il a acquis des arrière-fumures de son père en même temps que les droits que celui-ci détenait sur l'exploitation ; que, pour l'amortissement de la valeur de ces arrière-fumures, il a retenu la valeur d'actif inscrite à son bilan d'ouverture du 1er novembre 1970, soit 200 000 F ; que l'administration fiscale, sans contester le principe de ces amortissements, a estimé que la valeur de 200 000 F était excessive et, après avoir saisi la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires, a ramené cette valeur à 65 553 F conformément à l'avis émis par ladite commission, en estimant qu'à concurrence de la différence entre ces deux montants, l'inscription susmentionnée révèlait un acte anormal de gestion ; qu'elle a, en conséquence, réduit la valeur des amortissements déductibles et réintégré le montant de ces réductions dans les résultats imposables ;
Considérant, en premier lieu, qu'un élément d'actif ne peut être inscrit au bilan pour une valeur supérieure à son prix d'acquisition ; qu'il ressort de l'acte notarié du 21 juillet 1971, relatif à la transmission par M. et Mme Y... à leur fils de leurs droits dans l'exploitation agricole, que M. X... a acquis de son père les arrière-fumures dont s'agit pour le prix de 120 000 F ; que le requérant n'établit pas, par la production d'un autre acte notarié, postérieur aux exercices susmentionnés et rédigé, d'ailleurs, au début des opérations de vérification de la comptabilité de l'exploitation, que le prix d'acquisition aurait été en réalité de 200 000 F ;

Considérant, en second lieu, que, si l'appréciation du caractère anormal d'un acte de gestion pse une question de droit, il appartient, en règle générale, à l'administration d'établir les faits sur lesquels elle se fonde pour invoquer ce caractère anormal ; que ce principe ne peut, toutefois, recevoir application que dans le respect des prescriptions législatives et réglementaires qui, dans le contentieux fiscal, gouvernent la charge de la preuve ;
Considérant que, dès lors qu'il existe entre le contribuable et l'administration un désaccord sur des questions de fait, qu'il s'agisse de la matérialité des faits eux-mêmes ou de l'appréciation qu'il convient de porter sur les faits, eu égard, notamment, à la situation réelle de l'entreprise ou aux pratiques du secteur d'activité auquel celle-ci appartient, ce désaccord peut, en vertu des dispositions du 3 de l'article 1649 quinquies A du code général des impôts repris à l'article L.59 du livre des procédures fiscales, être soumis à l'appréciation de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires à l'initiative du contribuable ou à celle de l'administration ; que, lorsque celle-ci a suivi l'avis de la commission, régulièrement exprimé, il appartient, en tout état de cause, au contribuable de démontrer, devant le juge de l'impôt, les éléments de fait dont il se prévaut ;
Considérant que l'administration ayant suivi l'avis de la commission départementale, laquelle a estimé, comme il a été dit, que la valeur réelle des arrière-fumures transmises par les époux Y... à leur fils en 1971 était de 65 553 F, il appartient à M. X... d'établir les faits qui justifient une évaluation à un montant supérieur ;

Considérant que M. X... produit à cet effet une étude faite par un organisme spécialisé et portant sur les données propres de l'exploitation, compte tenu notamment des méthodes culturales et du type d'élevage pratiqués ; que ce document, eu égard au mode d'évaluation qu'il retient, qui est plus précis que celui qu'a retenu la commission départementale, suffit, dans les circonstances de l'espèce, à permettre à M. X... d'établir que la valeur des arrière-fumures à la date de son bilan d'ouverture correspondait au prix d'acquisition susmentionné soit 120 000 F ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté sa demande en tant qu'elle correspond à la décharge des droits fixés à partir d'une valeur amortissable de l'élément d'actif constitué par les arrière-fumures inférieure à 120 000 F ;
Article 1er : Pour la détermination des cotisations de M. X... à l'impôt sur le revenu au titre des années 1971, 1972 et 1973, les amortissements seront calculés en retenant à l'actif du bilan ouvert le 1er novembre 1970 une valeur de 120 000 F pour les arrière-fumures.
Article 2 : M. X... est déchargé de la différence entre les impositions à l'impôt sur le revenu qui lui ont été assignées au titre des années 1971, 1972 et 1973 et le montant de celles qui résultent des bases définies à l'article 1er ci-dessus.
Article 3 : Le jugement du tribunal administratif d'Amiens en date du 17 mai 1984 est réformé en ce qu'il a de contraire à la présence décision.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. X... est rejeté.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. X... et au ministre délégué auprès du ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et du budget, chargé du budget.


Synthèse
Formation : 7 / 9 ssr
Numéro d'arrêt : 61422
Date de la décision : 27/01/1989
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

19-04-01-02 CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOTS SUR LES REVENUS ET BENEFICES - REGLES GENERALES PROPRES AUX DIVERS IMPOTS - IMPOT SUR LE REVENU


Références :

. CGI Livre des procédures fiscales L59
CGI 1649 quinquies A


Publications
Proposition de citation : CE, 27 jan. 1989, n° 61422
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Turquet de Beauregard
Rapporteur public ?: Fouquet

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1989:61422.19890127
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