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27/01/1989 | FRANCE | N°67722

France | France, Conseil d'État, 6 / 10 ssr, 27 janvier 1989, 67722


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 10 avril 1985 et 12 août 1985 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés par la société anonyme FILATUFT, dont le siège social est à Ambrumesnil, 76860 Ouville-la-Rivière, et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du 15 février 1985 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à ce que "l'association syndicale de la rivière Saane" et le département de la Seine-Maritime soient condamnés conjointement et solidairement à lui verser une in

demnité de 2 915 098 F, avec intérêts de droit à la date du sinistre, en...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 10 avril 1985 et 12 août 1985 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés par la société anonyme FILATUFT, dont le siège social est à Ambrumesnil, 76860 Ouville-la-Rivière, et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du 15 février 1985 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à ce que "l'association syndicale de la rivière Saane" et le département de la Seine-Maritime soient condamnés conjointement et solidairement à lui verser une indemnité de 2 915 098 F, avec intérêts de droit à la date du sinistre, en réparation de l'inondation dont elle fut victime le 21 juillet 1980 ainsi qu'à payer les dépenses et les frais de l'expertise de M. X... ;
2°) condamne l'Etat et "l'association syndicale de la rivière Saane" à lui verser une indemnité de 2 915 098 F avec intérêts à compter du jour de la demande et capitalisation de ces intérêts et à lui payer les frais d'expertise soit 6 867,90 F ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code rural ;
Vu le code des tribunaux administratifs ;
Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;
Vu la loi du 30 décembre 1977 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Schwartz, Auditeur,
- les observations de la S.C.P. Guiguet, Bachellier, Potier de la Varde, avocat de la Société anonyme FILATUFT et de Me Vincent, avocat de "l'association syndicale de la rivière Saane",
- les conclusions de M. E. Guillaume, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction, d'une part, que de fortes précipitations ont affecté la région d'Ouville-la-Rivière (Seine-Maritime) dans les jours qui ont précédé l'inondation survenue le 21 juillet 1980 des bâtiments de la filature appartenant à la SOCIETE ANONYME FILATUFT situés en bordure de la rivière Saane et que ces précipitations furent particulièrement importantes les 20 et 21 juillet 1980 ; que les sols étaient à cette date engorgés et que l'eau ruisselait des coteaux vers la vallée de la Saane ; que, d'autre part, l'ensemble des bâtiments appartenant à la société requérante sont implantés, au niveau de leur plancher bas, à des cotes inférieures au niveau d'eau moyen de la Saane et sont situés sur les terrains inondables appartenant au lit "majeur" ou d'inondation de cette rivière ;
Sur la responsabilité de l'association syndicale :
Considérant que la société requérante, pour fonder ses conclusions relatives à la condamnation de l'association syndicale de la rivière Saane dont elle est du reste elle-même membre en sa qualité de riverain, doit apporter la preuve que cette association syndicale aurait commis, dans ses attributions découlant des articles 116 et 117 du code rural, une faute de nature à engager sa responsabilité ; que les allégations de la SOCIETE ANONYME FILATUFT relatives au caractère irrégulier et insufisant du curage de la rivière sont contredites par les éléments fournis par l'association syndicale ; que, notamment, l'exécution des travaux annuels de curage sur une section de la Saane était conforme aux plans prévus et régulièrement adoptés et devait avoir lieu dans la partie concernée de cette rivière au cours de l'été et au début de l'automne de l'année 1980 ; que le fait d'avoir laissé en place une souche d'arbre barrant partiellement un bras de la rivière et se trouvant dans une propriété particulière ne constitue pas une faute susceptible d'engager, en l'espèce, la responsabilité de l'association ; que l'entretien des berges, aux termes de l'article 22 de l'arrêté préfectoral du 20 juin 1972 créant l'association syndicale de la rivière Saane, est à la charge des riverains, l'association pouvant cependant y pouvoir d'office ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que, d'une part, l'association syndicale ait commis à ce titre une faute et d'autre part qu'un défaut de surveillance régulière puisse être invoqué à son encontre ;
Sur la responsabilité de l'Etat :

Considérant que, compte tenu de la topographie des lieux, la SOCIETE ANONYME FILATUFT n'est pas fondée à soutenir que les services de l'Etat auraient dû lui signaler, lors de l'octroi du permis de construire délivré le 8 juillet 1971, un risque potentiel d'inondation qui ne pouvait lui échapper ;
Considérant qu'aux termes des articles 103 et 115 du code rural : "l'autorité administrative ... prend toutes les dispositions pour assurer le libre cours des eaux" et "il est pourvu au curage des cours d'eau non domaniaux et à l'entretien des ouvrages qui s'y rattachent, de la manière prescrite par les anciens règlements et d'après les usages locaux. Les préfets sont chargés sous l'autorité du ministre compétent, de prendre les dispositions nécessaires pour l'exécution de ces règlements et usages" ; que les opérations de curage de la rivière Saane avaient été effectuées normalement par l'association syndicale et que la nécessité de travaux de curage extraordinaire et d'entretien des berges aux abords de la SOCIETE ANONYME FILATUFT n'était pas apparue antérieurement à l'inondation ; que le libre cours des eaux était assuré ; que, dès lors, l'autorité administrative n'a commis, en l'espèce, aucune faute en n'usant pas des pouvoirs de police qu'elle tient des articles 103 et 115 du code rural ;
Considérant que les buses du ruisseau affluent de la Saane et traversant les terrains d'implantation des bâtiments appartenant à la société servaient à l'écoulement de ce ruisseau et non à la dérivation de la rivière ; que certaines appartenaient à la société et avaient été installées à la demande du directeur de la filature ; que, dès lors, la société requérante ne peut mettre en cause la responsabiité de l'Etat du fait de l'existence de tels ouvrages ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SOCIETE ANONYME FILATUFT n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande d'indemnisation dirigée contre l'Etat et l'association syndicale de la rivière Saane et a mis à sa charge les frais de l'expertise ;
Article 1er : La requête de la SOCIETE ANONYME FILATUFT est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE ANONYME FILATUFT, à l'association syndicale de la rivière Saane et au ministre de l'agriculture et de la forêt.


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