Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 15 décembre 1986 et 13 avril 1987 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mme X..., pharmacien à Givenchy-en-Gohelle (62580) et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement en date du 16 octobre 1986 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande dirigée contre la décision du Préfet, commissaire de la République du département du Pas-de-Calais en date du 4 décembre 1985 autorisant Mlle Y... à ouvrir par dérogation une officine de pharmacie à Neuville-Saint-Vaast (Pas-de-Calais) ;
2°) annule pour excès de pouvoir cette décision ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Vu la loi n° 77-1468 du 30 décembre 1977 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Daguet, Auditeur,
- les observations de la S.C.P. Piwnica, Molinié, avocat de Mme X... et de Me Choucroy, avocat de Mlle Y...,
- les conclusions de Mme de Clausade, Commissaire du gouvernement ;
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :
Considérant qu'en vertu de l'avant-dernier alinéa de l'article L.571 du code de la santé publique en vigueur à la date de la décision du 4 décembre 1985 du préfet, commissaire de la République du Pas-de-Calais, une dérogation aux règles fixées par les alinéas précédents, dudit article peut, "si les besoins de la population l'exigent", être accordée par le préfet ;
Considérant que, pour accorder par l'arrêté contesté à Mlle Y... l'autorisation de créer, par voie dérogatoire, une officine de pharmacie à Neuville-Saint-Vaast, le préfet, commissaire de la République du département du Pas-de-Calais s'est fondé, d'une part sur les besoins de la population de Neuville-Saint-Vaast, en mentionnant que cette commune était dépourvue d'officine, que sa population pouvait être estimée à 1 318 habitants et qu'un médecin généraliste y était installé, d'autre part, sur le fait que la population susceptible d'être intéressée par la création d'une officine à Neuville-Saint-Vaast pouvait être estimée à 2 251 personnes compte tenu de l'aménagement routier permettant un accès plus facile de cette commune aux habitants de Thélus ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, et qu'il n'est d'ailleurs pas contesté par Mlle Y..., que le second de ces motifs reposait sur des faits matériellements inexacts ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le commissaire de la République aurait, s'il n'avait retenu que l'autre motif, pris la même décision à l'égard de la demande d'autorisation présentée par Mlle Y... ; que, dès lors, Mme X... est fondée à soutenir que l'arrêté préfectoral du 4 décembre 1985 est entaché d'illégalité et que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a refusé d'en prononcer l'annulation ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Lille en date du 16 octobre 1986, ensemble l'arrêté du préfet, commissaire de la République du Pas-de-Calais en date du 4 décembre 1985 autorisant Mlle Y... à créer une officine de pharmacie à Neuville-Saint-Vaast sont annulés.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à Mme X..., à Mlle Y... et au ministre de la solidarité, de la santé et de la protection sociale.