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01/03/1989 | FRANCE | N°61406

France | France, Conseil d'État, 5 /10 ssr, 01 mars 1989, 61406


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 2 août 1984 et 30 novembre 1984 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. X..., et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1° annule le jugement du 22 mai 1984 par lequel le tribunal administratif de Limoges l'a débouté de sa requête tendant à ce que le centre hospitalier du Blanc soit déclaré responsable de la surinfection dont il a été atteint à partir du 31 janvier 1978 à la suite des soins et opération qu'il a subis ;
2° condamne le centre hospitalier du Blanc à lui ver

ser une indemnité de 383 000 F en réparation du préjudice qu'il a subi,
Vu...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 2 août 1984 et 30 novembre 1984 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. X..., et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1° annule le jugement du 22 mai 1984 par lequel le tribunal administratif de Limoges l'a débouté de sa requête tendant à ce que le centre hospitalier du Blanc soit déclaré responsable de la surinfection dont il a été atteint à partir du 31 janvier 1978 à la suite des soins et opération qu'il a subis ;
2° condamne le centre hospitalier du Blanc à lui verser une indemnité de 383 000 F en réparation du préjudice qu'il a subi,
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Vu la loi n° 77-1468 du 30 décembre 1977 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Damien, Conseiller d'Etat,
- les observations de Me Goutet, avocat de M. X..., et de la S.C.P. Boré, Xavier, avocat du centre hospitalier du Blanc (Indre),
- les conclusions de M. Fornacciari, Commissaire du gouvernement ;
Sur le principe de la responsabilité :

Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment du rapport d'expertise que M. Michel X..., atteint d'une fracture fermée à la tête du péroné droit, consécutive à un accident de la route dont il a été victime le 27 janvier 1978, a subi, le 31 janvier 1978, au centre hospitalier du Blanc (Indre), une opération de réduction chirurgicale de cette fracture et qu'à la suite de cette intervention s'est déclarée une infection du genou par staphylocoques qui a laissé des séquelles sur l'articulation ; que rien ne permet de présumer que M. X... ait été porteur, avant l'opération, d'un foyer infectieux qui pourrait être à l'origine de cette complication ; que si aucune faute lourde médicale, notamment en matière d'asepsie, ne peut être reprochée aux praticiens qui ont exécuté l'intervention, l'introduction accidentelle, dans l'organisme du patient, d'un germe microbien lors d'une intervention chirurgicale révèle une faute dans l'organisation ou le fonctionnement du service hospitalier, alors même qu'aucun autre cas de contamination de cette nature n'a été constaté dans le service à l'époque des faits ; que, dès lors, M. X... est fondé à demander au centre hospitalier du Blanc réparation du préjudice qu'il a subi du fait de cette faute et à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande d'indemnisation de ce préjudice ;
Sur l'évaluation du préjudice :
Considérant que l'état du dossier et notamment le rapport d'expertise ne permet pas de déterminer quelles auraient été les séquelles normales de l'accident dont M. X... a été victime le 27 janvier 1978 si les suites de l'intervention chrurgicale avaient été normales, s'agissant tant de la durée des périodes d'incapacité et des séquelles définitives de la fracture que de l'importance des souffrances physiques et du préjudice esthétique et d'évaluer l'aggravation de ces chefs de préjudice qui sont imputables à la seule infection microbienne dont le centre hospitalier est responsable ; que le dossier ne contient pas, non plus, des pièces justificatives, notamment les déclarations fiscales, permettant de comparer le revenu du requérant avant et après l'accident et d'apprécier l'incidence réelle de la faute imputable à l'hôpital sur la situation matérielle et financière de la victime ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de renvoyer M. X... devant le tribunal administratif de Limoges pour qu'il soit procédé à la liquidation de l'indemnité à laquelle il peut prétendre ;
Sur les frais d'expertise :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'affaire, de mettre les frais d'expertise à laquelle il a été déjà procédé à la charge du centre hospitalier du Blanc ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Limoges du 22 mai 1984 est annulé en tant qu'il rejette la demande de M. Michel X....
Article 2 : Le centre hospitalier du Blanc est déclaré responsable des conséquences dommageables de l'infection microbienne du genou droit dont M. X... a été victime lors de son hospitalisation.
Article 3 : M. X... est renvoyé devant le tribunal administratif de Limoges pour qu'il soit procédé à la liquidation de l'indemnité à laquelle il peut prétendre.
Article 4 : Les frais de l'expertise ordonnée par le jugement dutribunal administratif de Limoges du 10 mars 1981 sont mis à la charge du centre hospitalier du Blanc.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. Michel X..., au centre hospitalier du Blanc, à la caisse mutuelle régionale du Centre et au ministre de la solidarité, de la santé et de la protection sociale.


Synthèse
Formation : 5 /10 ssr
Numéro d'arrêt : 61406
Date de la décision : 01/03/1989
Sens de l'arrêt : Annulation partielle renvoi
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

60-02-01-01-01-01 RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - RESPONSABILITE EN RAISON DES DIFFERENTES ACTIVITES DES SERVICES PUBLICS - SERVICE PUBLIC DE SANTE - ETABLISSEMENTS PUBLICS D'HOSPITALISATION - RESPONSABILITE POUR FAUTE SIMPLE : ORGANISATION ET FONCTIONNEMENT DU SERVICE HOSPITALIER - EXISTENCE D'UNE FAUTE -Présomption de faute - Faute révélée par l'introduction accidentelle dans l'organisme d'un patient d'un germe microbien lors d'une intervention chirurgicale.

60-02-01-01-01-01 Il résulte de l'instruction et notamment du rapport d'expertise que M. B., atteint d'une fracture fermée à la tête du péroné droit, consécutive à un accident de la route dont il a été victime le 27 janvier 1978, a subi, le 31 janvier 1978, au centre hospitalier du Blanc (Indre), une opération de réduction chirurgicale de cette fracture et qu'à la suite de cette intervention s'est déclarée une infection du genou par staphylocoques qui a laissé des séquelles sur l'articulation. Rien ne permet de présumer que M. B. ait été porteur, avant l'opération, d'un foyer infectieux qui pourraît être à l'origine de cette complication. Si aucune faute lourde médicale, notamment en matière d'asepsie, ne peut être reprochée aux praticiens qui ont exécuté l'intervention, l'introduction accidentelle, dans l'organisme du patient, d'un germe microbien lors d'une intervention chirurgicale révèle une faute dans l'organisation ou le fonctionnement du service hospitalier, alors même qu'aucun autre cas de contamination de cette nature n'a été constaté dans le service à l'époque des faits.


Publications
Proposition de citation : CE, 01 mar. 1989, n° 61406
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Coudurier
Rapporteur ?: M. Damien
Rapporteur public ?: M. Fornacciari

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1989:61406.19890301
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