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29/03/1989 | FRANCE | N°84562

France | France, Conseil d'État, 7 / 9 ssr, 29 mars 1989, 84562


Vu le recours du MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DU BUDGET enregistré le 22 janvier 1987 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1- annule le jugement du 22 octobre 1986 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a déchargé M. Y... du supplément à l'impôt sur le revenu auquel celui-ci a été assujetti au titre de l'année 1982 dans la catégorie des bénéfices agricoles ;
2- rétablisse M. Y... au rôle de l'impôt sur le revenu au titre de l'année 1982, à raison de l'intégralité des droits qui lui avaient ét

é assignés ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des im...

Vu le recours du MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DU BUDGET enregistré le 22 janvier 1987 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1- annule le jugement du 22 octobre 1986 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a déchargé M. Y... du supplément à l'impôt sur le revenu auquel celui-ci a été assujetti au titre de l'année 1982 dans la catégorie des bénéfices agricoles ;
2- rétablisse M. Y... au rôle de l'impôt sur le revenu au titre de l'année 1982, à raison de l'intégralité des droits qui lui avaient été assignés ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Vu la loi n° 77-1468 du 30 décembre 1977 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de Mme Denis-Linton, Maître des requêtes,
- les observations de Me Copper-Royer, avocat de M. Jean Y...,
- les conclusions de M. Fouquet, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. Y... a cédé à un tiers, le 31 juillet 1982, le domaine agricole qu'il exploitait et dont les bénéfices étaient imposables à l'impôt sur le revenu sous le régime du forfait légal ; qu'ayant procédé, en 1982, à la vente de stocks d'eau de vie de cognacs provenant du produit des récoltes levées sur ce domaine, il doit être regardé comme ayant, ce faisant, poursuivi, au cours de ces années, son activité d'exploitant agricole ; que les profits qu'il a réalisés de ce chef devaient, en vertu de l'article 63 du code général des impôts, être imposés à l'impôt sur le revenu en tant que bénéfices agricoles et, eu égard au montant des recettes brutes qu'il a perçues à cette occasion, selon le régime d'imposition d'après le bénéfice réel, par application des dispositions de l'article 69-A ; que les dispositions de l'article 64-2 dudit code, relatives à la détermination du bénéfice forfaitaire, ne lui étaient dès lors pas applicables ; que les dispositions de l'article 64-A, qui n'étaient plus en vigueur en 1982, ne sauraient, en tout état de cause, être invoquées ;
Considérant, toutefois, que M. Y... s'est, sur le fondement des dispositions de l'article 1649 quinquies E du code général des impôts, repris à l'article L.80-A du livre des procédures fiscales, prévalu devant le tribunal administratif de Poitiers de l'interprétation de la loi fiscale qui a été exprimée par le ministre des finances dans sa réponse à la question écrite de M. X..., député, publiée au Journal Officiel des débats de l'Assemblée Nationale du 24 août 1974, selon laquelle les ventes, par un exploitant qui cesse son activité agricole, de cognacs stockés pendant la période d'exploitation au cours de laquelle il reevait du régime forfaitaire ne peuvent être à nouveau soumises à l'impôt sur le revenu dès lors qu'elles sont censées avoir été déjà taxées ; que, par le jugement du 22 octobre 1986, le tribunal administratif de Poitiers, devant M. Y... n'avait fait valoir que les prétentions ci-dessus analysées, a prononcé la décharge du supplément d'impôt sur le revenu auquel il avait été assujetti, par voie de rôle établi le 30 novembre 1984, au titre de l'année 1982, en se fondant sur ce que ladite interprétation était opposable à l'administration ; que le ministre chargé du budget fait appel de ce jugement ;

Considérant qu'aux termes du 2ème alinéa de l'article 1649 quinquies E du code général des impôts, repris au 2ème alinéa de l'article L.80-A du livre des procédures fiscales : "Lorsque le redevable a appliqué un texte fiscal selon l'interprétation que l'administration avait fait connaître par ses instructions ou circulaires publiées et qu'elle n'avait pas rapportée à la date des opérations en cause, elle ne peut poursuivre aucun rehaussement en soutenant une interprétation différente" ;
Considérant que l'instruction administrative du 14 juin 1977 relative au régime d'imposition des bénéfices agricoles, publiée au bulletin officiel de la direction générale des impôts du même mois, précise que les profits que procure à un ancien agriculteur la vente de stocks qu'il a conservés après cession ou cessation de son exploitation constituent des bénéfices agricoles, sous réserve que les ventes ne soient pas faites au détail dans une installation commerciale permanente ou à l'aide d'un personnel spécial, et que les recettes provenant de la vente de stocks après cession ou cessation d'activité doivent, sous réserve qu'elles ne présentent pas un caractère commercial, être prises en compte pour l'appréciation de la limite de 500 000 F prévue à l'article 69-A du code général des impôts ; que ces dispositions, qui ne comportent aucune restriction à l'égard de certains produits agricoles, ont eu pour effet de mettre fin, selon un mode de publicité suffisant, à l'interprétation contraire que le ministre des finances avait fait connaître dans sa réponse susmentionnée ; que, dès lors, aucune interprétation susceptible de faire échec à la loi fiscale n'était opposable à l'administration et, par suite, au juge de l'impôt, sur le fondement des dispositions de l'article 1649 quinquies E du code général des impôts ; que, par suite, le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DU BUDGET est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a déchargé M. Y... du supplément d'impôt sur le revenu auquel il a été assujetti à raison du profit provenant des ventes de cognac réalisées en 1982 ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Poitiers du 22 octobre 1986 est annulé.
Article 2 : Le supplément d'impôt sur le revenu, dans la catégorie des bénéfices agricoles, auquel M. Y... a été assujetti au titre de l'année 1982 est remis intégralement à sa charge.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. Y... et au ministre délégué auprès du ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et du budget, chargé du budget.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

19-04-01-02 CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOTS SUR LES REVENUS ET BENEFICES - REGLES GENERALES PROPRES AUX DIVERS IMPOTS - IMPOT SUR LE REVENU


Références :

. CGI Livre des procédures fiscales L80 A al. 2
CGI 63, 69 A, 1649 quinquiesE al. 2
Instruction du 14 juin 1977 DGI

Cf. Décision identique du même jour : Fouquet-Pinard n° 84563


Publications
Proposition de citation: CE, 29 mar. 1989, n° 84562
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Denis-Linton
Rapporteur public ?: Fouquet

Origine de la décision
Formation : 7 / 9 ssr
Date de la décision : 29/03/1989
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 84562
Numéro NOR : CETATEXT000007627052 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;1989-03-29;84562 ?
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