La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

24/05/1989 | FRANCE | N°63659

France | France, Conseil d'État, 9 / 8 ssr, 24 mai 1989, 63659


Vu la requête et le mémoire enregistrés le 29 octobre 1984 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés par la Société MASSY-MASTIC, dont le siège est ..., et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1°) annule un jugement en date du 8 juin 1984 par lequel le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande en réduction de la taxe professionnelle acquittée au titre des années 1978 à 1980,
2°) lui accorde décharge des impositions contestées ;

Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administra

tives d'appel ;
Vu le code général des impôts ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31...

Vu la requête et le mémoire enregistrés le 29 octobre 1984 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés par la Société MASSY-MASTIC, dont le siège est ..., et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1°) annule un jugement en date du 8 juin 1984 par lequel le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande en réduction de la taxe professionnelle acquittée au titre des années 1978 à 1980,
2°) lui accorde décharge des impositions contestées ;

Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu le code général des impôts ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de Mme Bechtel, Maître des requêtes,
- les observations de Me Ancel, avocat de la société à responsabilité limitée MASSY-MASTIC,
- les conclusions de M. Ph. Martin, Commissaire du gouvernement ;
Sur l'application de la loi fiscale :

Considérant que les articles 1647 A, 1647 B, 1647 B bis et 1647 B quinquies du code général des impôts instituent pour chacune des années 1976 à 1980 un mécanisme de plafonnement de la taxe professionnelle calculé en fonction de la cotisation de patente mise à la charge du contribuable concerné au titre de l'année 1975 ; qu'il est constant que la Société MASSY-MASTIC qui demande la réduction de la taxe professionnelle à laquelle elle a été assujettie en 1978, 1979 et 1980, n'a fait l'objet d'aucune imposition à la contribution des patentes au titre de l'année 1975 ; qu'ainsi les dispositions législatives susmentionnées ne pouvaient recevoir application à son égard ;
Sur l'interprétation de la loi fiscale donnée par l'administration :
Considérant qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article 1649 quinquies E du code général des impôts repris à l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales : "Lorsque le redevable a appliqué un texte fiscal selon l'interprétation que l'administration avait fait connaître par ses instructions ou circulaires publiées et qu'elle n'avait pas rapportées à la date des opérations en cause, elle ne peut poursuivre aucun rehaussement en soutenant une interprétation différente." ;
Considérant que la Société MASSY-MASTIC se prévaut, devant le Conseil d'Etat, sur le fondement des dispositions précitées de l'interprétation donnée par l'administration des mesures de plafonnement de la taxe professionnelle telle qu'elle résulte de la réponse ministérielle à M. X..., sénateur, du 28 juin 1978 et de l'instruction du 7 septembre 1978 n° 6-E-6-78 publiée le 14 septembre 1978 suivant lesquelles les contribuables exploitant un établissement unique qui, bien qu'imposables à la contribution des patentes en 1975, n'ont fait l'objet d'aucune imposition au titre de cette année pourront bénéficier du plafonnement des cotisations e taxe professionnelle prévue par la loi par rapport à la patente qui aurait été réclamée en 1975 si elle avait été établie ;

Considérant, d'une part, que la doctrine ci-dessus mentionnée ne peut être invoquée par la société requérante en ce qui concerne la taxe professionnelle de l'année 1978 dès lors que l'interprétation donnée par l'administration a été publiée postérieurement à la date à laquelle le contribuable peut être réputé avoir fait application de cette interprétation c'est-à-dire la date limite impartie pour souscrire la déclaration de ses bases d'imposition, soit en l'espèce le 1er mars 1978 ;
Considérant, d'autre part, que l'instruction du 7 septembre 1978, applicable aux impositions postérieures à 1978, réserve le bénéfice du plafonnement prévu antérieurement par la réponse ministérielle à M. X... à la condition que le contribuable "ait rempli ses obligations en matière d'impôts directs locaux (déclaration des bases d'impositioin de taxe professionnelle, déclaration de construction nouvelle ou de changement d'affectation)" ; qu'il résulte de l'instruction que la Société MASSY-MASTIC a souscrit le 16 février 1979 la déclaration pour l'année 1979 à laquelle elle était tenue en vertu des dispositions de l'article 1477 susvisé ; que l'administration ne conteste pas que la déclaration concernant l'année 1980 a été déposée dans le délai prescrit ; que l'administration ne peut soutenir que l'instruction ministérielle susvisée, qui ne comporte aucune disposition en ce sens, poserait pour la condition que, le contribuable pour bénéficier de l'interprétation administrative en 1979 et 1980, devrait avoir déposé des déclarations régulières pour les années antérieures à 1979 ; que, dès lors la société requérante qui était imposable à la patente en 1975 est en droit de bénéficier pour 1979 et 1980 du plafonnement de la taxe professionnelle à laquelle elle a été assujettie par rapport au montant de la patente qui lui aurait été normalement réclamée en 1975 ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la Société MASSY-MASTIC est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté sa demande de réduction de la contribution de taxe professionnelle à laquelle elle a été assujettie au titre des années 1979 et 1980 ;

Article 1er : Seront appliquées aux contributions de taxe professionnelle auxquelles la Société MASSY-MASTIC a été assujettie au titre des années 1979 et 1980, les mesures de plafonnement prévues aux articles 1647 B bis et 1647 B quinquies du code général des impôts, calculées par rapport au montant de la patente qui aurait été normalement réclamée à cette société en 1975.
Article 2 : La Société MASSY-MASTIC est déchargée de la différence entre le montant de la contribution de taxe professionnelle à laquelle elle a été assujettie au titre des années 1979 et 1980 et celui résultant de l'article 1er.
Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de Versailles en date du 8 juin 1984 est réformé en ce qu'il a de contraire à la présente décision.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à la Société MASSY-MASTIC et au ministre délégué auprès du ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et du budget, chargé du budget.


Synthèse
Formation : 9 / 8 ssr
Numéro d'arrêt : 63659
Date de la décision : 24/05/1989
Sens de l'arrêt : Réformation
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

CONTRIBUTIONS ET TAXES - GENERALITES - TEXTES FISCAUX - OPPOSABILITE DES INTERPRETATIONS ADMINISTRATIVES - OPPOSABILITE SUR LE FONDEMENT DE L'ARTICLE L - 80 A DU LPF - ANTERIORITE DE L'INTERPRETATION PAR RAPPORT A L'IMPOSITION PRIMITIVE - Antériorité de l'interprétation par rapport à la date de déclaration - Inapplicabilité d'une interprétation publiée postérieurement à la date limite impartie pour souscrire la déclaration des bases d'imposition.

19-01-01-03-03-03 La société M. se prévaut, sur le fondement des dispositions du deuxième alinéa de l'article 1649 quinquies E du CGI, de l'interprétation donnée par l'administration des mesures de plafonnement de la taxe professionnelle telle qu'elle résulte de la réponse ministérielle à M. Poudonson, sénateur, du 28 juin 1978 et de l'instruction du 7 septembre 1978 n° 6E-6-78 publiée le 14 septembre 1978 suivant lesquelles les contribuables exploitant un établissement unique qui, bien qu'imposables à la contribution des patentes en 1975, n'ont fait l'objet d'aucune imposition au titre de cette année pourront bénéficier du plafonnement des cotisations de taxe professionnelle prévue par la loi par rapport à la patente qui aurait été réclamée en 1975 si elle avait été établie. La doctrine ci-dessus mentionnée ne peut être invoquée par la société en ce qui concerne la taxe professionnelle de l'année 1978 dès lors que l'interprétation donnée par l'administration a été publiée postérieurement à la date à laquelle le contribuable peut être réputé avoir fait application de cette interprétation c'est-à-dire la date limite impartie pour souscrire la déclaration de ses bases d'imposition, soit en l'espèce le 1er mars 1978.

CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOSITIONS LOCALES AINSI QUE TAXES ASSIMILEES ET REDEVANCES - TAXE PROFESSIONNELLE - QUESTIONS RELATIVES AU PLAFONNEMENT - Conditions d'imposition au titres d'exercices antérieurs - Condition d'imposition à la contribution des patentes au titre de l'année 1975 (articles 1647 A - 1647 B et 1647 B bis du C - G - I - ) - Instruction administrative 6E-6-78 du 7 septembre 1978 - Bénéfice du plafonnement - Existence - Contribuables qui - bien que passibles de la patente en 1975 - n'ont fait l'objet d'aucune imposition au titre de cette année.

19-03-04-05 La société M. se prévaut, sur le fondement des dispositions du deuxième alinéa de l'article 1649 quinquies E du CGI, de l'interprétation donnée par l'administration des mesures de plafonnement de la taxe professionnelle telle qu'elle résulte de la réponse ministérielle à M. Poudonson, sénateur, du 28 juin 1978 et de l'instruction du 7 septembre 1978 n° 6E-6-78 publiée le 14 septembre 1978 suivant lesquelles les contribuables exploitant un établissement unique qui, bien qu'imposables à la contribution des patentes en 1975, n'ont fait l'objet d'aucune imposition au titre de cette année pourront bénéficier du plafonnement des cotisations de taxe professionnelle prévue par la loi par rapport à la patente qui aurait été réclamée en 1975 si elle avait été établie. La doctrine ci-dessus mentionnée ne peut être invoquée par la société en ce qui concerne la taxe professionnelle de l'année 1978 dès lors que l'interprétation donnée par l'administration a été publiée postérieurement à la date à laquelle le contribuable peut être réputé avoir fait application de cette interprétation, c'est-à-dire la date limite impartie pour souscrire la déclaration de ses bases d'imposition, soit en l'espèce le 1er mars 1978. L'instruction du 7 septembre 1978, applicable aux impositions postérieures à 1978, réserve le bénéfice du plafonnement prévu antérieurement par la réponse ministérielle à M. Poudonson à la condition que le contribuable "ait rempli ses obligations en matière d'impôts directs locaux (déclaration des bases d'imposition de taxe professionnelle, déclaration de construction nouvelle ou de changement d'affectation)". La société a souscrit le 16 février 1979 la déclaration pour l'année 1979 à laquelle elle était tenue en vertu des dispositions de l'article 1477 et l'administration ne conteste pas que la déclaration concernant l'année 1980 a été déposée dans le délai prescrit. L'administration ne peut soutenir que l'instruction ministérielle susmentionnée, qui ne comporte aucune disposition en ce sens, poserait pour condition que le contribuable, pour bénéficier de l'interprétation administrative en 1979 et 1980, devrait avoir déposé des déclarations régulières pour les années antérieures à 1979. Dès lors la société, qui était imposable à la patente en 1975, est en droit de bénéficier pour 1979 et 1980 du plafonnement de la taxe professionnelle à laquelle elle a été assujettie par rapport au montant de la patente qui lui aurait été normalement réclamée en 1975.


Références :

CGI 1647 A, 1647 B, 1647 B bis, 1647 B quinquies, 1649 quinquies E, 1477
CGI Livre des procédures fiscales L80-A
Instruction n° 6-E-6-78 du 07 septembre 1978


Publications
Proposition de citation : CE, 24 mai. 1989, n° 63659
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Rougevin-Baville
Rapporteur ?: Mme Bechtel
Rapporteur public ?: M. Ph. Martin

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1989:63659.19890524
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award