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26/05/1989 | FRANCE | N°59636

France | France, Conseil d'État, 5 / 3 ssr, 26 mai 1989, 59636


Vu la requête, enregistrée le 30 mai 1984 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour le CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE D'AMIENS, et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du 27 mars 1984 par lequel le tribunal administratif d' Amiens l'a condamné d'une part à verser à Mme X... une indemnité de cent soixante dix huit mille francs (178 000 F) en réparation des préjudices subis au cours d'un accouchement survenu le 1er mai 1979 dans ledit centre hospitalier et d'autre part à verser la somme de 147 760,40 F à la caisse primaire d'assur

ance maladie de la Somme,
2°) rejette les demandes présentées pa...

Vu la requête, enregistrée le 30 mai 1984 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour le CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE D'AMIENS, et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du 27 mars 1984 par lequel le tribunal administratif d' Amiens l'a condamné d'une part à verser à Mme X... une indemnité de cent soixante dix huit mille francs (178 000 F) en réparation des préjudices subis au cours d'un accouchement survenu le 1er mai 1979 dans ledit centre hospitalier et d'autre part à verser la somme de 147 760,40 F à la caisse primaire d'assurance maladie de la Somme,
2°) rejette les demandes présentées par Mme X... et par la caisse primaire d'assurance maladie de la Somme devant le tribunal administratif d'Amiens,
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de Mme Maugüé, Auditeur,
- les observations de la S.C.P. Le Prado, avocat du CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE D'AMIENS et de Me Roger, avocat de Mme X...,
- les conclusions de M. Fornacciari, Commissaire du gouvernement ;
Sur la responsabilité :

Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment du rapport d'expertise que, le 1er mai 1979, lorsque Mme X... a été hospitalisée au CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE D'AMIENS pour accoucher de son troisième enfant, le service hospitalier, dont les médecins avaient vainement tenté trois jours plus tôt de pratiquer une manoeuvre de version externe de l'enfant qu'elle portait, ne pouvait ignorer que l'accouchement par le siège serait délicat ; que le travail a été long et difficile ; qu'à l'époque des faits la méthode de grande extraction par le siège était contestée ; que dans les circonstances de l'affaire, la décision du médecin hospitalier de refuser d'effectuer l'accouchement par césarienne, alors qu'il n'est fait état d'aucune contre indication à une telle opération et qu'il n'est pas soutenu que celle-ci présentait, pour la mère ou pour l'enfant des risques autres que ceux qui découlent de l'anesthésie à laquelle il a fallu recourir de toute façon, et le choix d'une méthode d'accouchement qui présentait des risques sérieux et qui s'est effectivement traduite par un grave préjudice pour l'intéressée, sont constitutifs d'une faute lourde engageant la responsabilité du centre hospitalier d'Amiens sans qu'il soit besoin de rechercher si d'autres fautes commises par cet établissement seraient également à l'origine du préjudice dont Mme X... et la caisse d'assurance maladie ont demandé réparation ; que le centre hospitalier n'est dès lors pas fondé à demander l'annulation du jugement du 27 mars 1984 par lequel le tribunal administratif d'Amiens l'a condmné à réparer ces préjudices ;
Sur le montant de l'indemnité :

Considérant que Mme X... a subi, du fait des conséquences de l'accouchement, des souffrances physiques importantes et un préjudice esthétique dont le tribunal administratif a fait une exacte appréciation en les évaluant respectivement à 40 000 F et à 8 000 F ; que contrairement à ce que soutient l'hôpital, Mme X..., mère de trois enfants et âgée de 32 ans lors de la naissance de son troisième enfant dans les conditions qui viennent d'être indiquées, a subi, en se trouvant privée de la possibilité d'une autre maternité, un préjudice moral ouvrant droit à réparation ; que tant le séjour prolongé qu'elle a dû faire à l'hôpital que les troubles physiologiques qui découlent des lésions qu'elle a subies et l'obligation où elle se trouve de recevoir en permanence un traitement hormonal, lui causent des troubles dans ses conditions d'existence ; qu'en évaluant ce préjudice moral, qualifié par erreur de douleur morale, et ces troubles dans les conditions d'existence à 130 000 F, le tribunal administratif en a fait une juste appréciation ; qu'ainsi le centre hospitalier régional n'est pas fondé à demander, les frais de soins remboursés à la caisse primaire d'assurance maladie de la Somme n'étant pas contestés, la réduction du montant de l'indemnité de 178 000 F qu'il a été condamné à payer à Mme X... ;
Sur les conclusions de l'appel incident de Mme X... :
Considérant que même en l'absence de demande tendant à l'allocation d'intérêts, tout jugement prononçant une condamnation à une indemnité fait courir les intérêts au taux légal au jour de son prononcé jusqu'à son exécution ; qu'ainsi la demande de Mme X... tendant à ce que lui soient alloués, à compter de la date du jugement attaqué, des intérêts au taux légal sur la somme que le centre hospitalier a été condamné à lui verser, est dépourvue de tout objet et doit donc être rejetée ;
Article 1er : La requête du CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE D'AMIENS et les conclusions de l'appel incident de Mme X... sont rejetées.
Article 2 : La présente décision sera notifiée au CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE D'AMIENS, à Mme X..., à la caisse primaire d'assurance maladie de la Somme et au ministre de la solidarité, de la santé et de la protection sociale.


Synthèse
Formation : 5 / 3 ssr
Numéro d'arrêt : 59636
Date de la décision : 26/05/1989
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

PROCEDURE - VOIES DE RECOURS - APPEL - CONCLUSIONS RECEVABLES EN APPEL - Absence - Conclusions tendant au versement des intérêts au taux légal à compter de la date du jugement de première instance.

54-08-01-02, 60-04-04-04 Même en l'absence de demande tendant à l'allocation d'intérêts, tout jugement prononçant une condamnation à une indemnité fait courir les intérêts au taux légal au jour de son prononcé jusqu'à son exécution. La demande de Mme T. tendant à ce que lui soient alloués, à compter de la date du jugement attaqué, des intérêts au taux légal sur la somme qu'un centre hospitalier a été condamné à lui verser est donc dépourvue de tout objet et doit être rejetée.

RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - REPARATION - MODALITES DE LA REPARATION - INTERETS - Recevabilité des conclusions - Conclusions tendant au versement des intérêts au taux légal à compter de la date du jugement de première instance - Irrecevabilité.


Publications
Proposition de citation : CE, 26 mai. 1989, n° 59636
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Coudurier
Rapporteur ?: Mme Maugüe
Rapporteur public ?: M. Fornacciari

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1989:59636.19890526
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