Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 1er septembre 1986 et 17 décembre 1986 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la COMMUNE DU MOULE ( Guadeloupe), représentée par son maire en exercice à ce dûment autorisé par délibération du 7 août 1986 du conseil municipal, et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du 30 mai 1986 par lequel le tribunal administratif de Basse-Terre a annulé la décision du 14 mai 1985 par laquelle le maire du Moule a licencié Mme Nicole X..., agent non titulaire du bureau d'aide sociale ;
2°) rejette la demande présentée par Mme X... devant le tribunal administratif de Basse-Terre,
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 modifiée sur la fonction publique territoriale ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Le Chatelier, Auditeur,
- les observations de la S.C.P. Coutard, Mayer, avocat de la COMMUNE DU MOULE,
- les conclusions de M. de Guillenchmidt, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article R. 172 alinéa 4 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, les jugements mentionnent "s'il y a lieu, que les parties, leurs mandataires ou défenseurs et le commissaire du gouvernement ont été entendus" ; que le jugement attaqué du tribunal administratif de Basse-Terre, en date du 30 mai 1986, ne comporte aucune mention relative à l'audition du commissaire du gouvernement ; qu'ainsi ce jugement est entaché d'un vice de forme ; que la COMMUNE DU MOULE est, par suite, fondée à en demander l'annulation ;
Considérant que l'affaire est en l'état ; qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur les demandes présentées par Mme X... devant le tribunal administratif de Basse-Terre ;
Sur la légalité de la décision du 14 mai 1985 par laquelle le maire du Moule a licencié Mme X... :
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :
Considérant qu'aux termes de l'article 136 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires applicables à la fonction publique territoriale : "Les agents non titulaires qui peuvent se prévaloir des dispositions des articles 126 à 135 ne peuvent être licenciés que pour insuffisance professionnelle ou pour motif disciplinaire jusqu'à l'expiration des délais d'option qui leur sont ouverts par les décrets prévus à l'article 128" ; qu'aux termes de l'article 126 de la même loi : "les agents non titulaires qui occupent un emploi présentant les caractéristiques définies à l'article 3 du titre 1er du statut général ont vocation à être titularisés, sur leur demande, dans des emplois de même nature qui sont vacants ou qui seront créés par les organes délibérants des collectiviés ou établissements concernés sous réserve : 1°) d'être en fonction à la date de la publication de la présente loi ou de bénéficier à cette date d'un congé en application des dispositions relatives à la protection sociale des agents non titulaires des collectivités territoriales ; 2°) d'avoir accompli, à la date du dépôt de leur candidature, des services effectifs d'une durée équivalente à deux ans au moins de services à temps complet dans un des emplois susindiqués ; 3°) de remplir les conditions énumérées à l'article 5 du titre 1er du statut général" ;
Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ces dispositions que les agents des collectivités locales répondant aux conditions requises pour avoir vocation à être titularisés et qui étaient en fonction le 27 janvier 1984, date à laquelle la loi précitée du 26 janvier 1984 a été publiée, ne pouvaient être licenciés, à compter de cette date et jusqu'à l'expiration des délais d'option que devaient ouvrir les décrets prévus à l'article 128 de la même loi, que pour des motifs tirés de l'insuffisance professionnelle, ou d'une faute disciplinaire ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme X... a été recrutée par la COMMUNE DU MOULE, à compter du 1er avril 1980, en qualité d'employée de bureau non titulaire ; qu'elle remplissait les conditions requises par les dispositions susmentionnées de l'article 126 de la loi du 26 janvier 1984 pour avoir vocation à être titularisée ; que, pour licencier Mme X... par sa décision en date du 14 mai 1985, le maire s'est exclusivement fondé sur la nécessité pour la commune de procéder à des économies par la réduction du personnel communal ; que dès lors cette décision a été prise en violation des dispositions susrappelées de l'article 136 de la loi du 26 janvier 1984 ; que, par suite, Mme X... est fondée à demander l'annulation de la décision, en date du 14 mai 1985, par laquelle le maire a prononcé son licenciement ;
Sur la demande d'indemnité :
Considérant que la demande de Mme X... tendant à obtenir diverses indemnités a été présentée pour la première fois devant le juge d'appel ; qu'elle n'est, par suite, pas recevable ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Basse-Terre en date du 30 mai 1986 est annulé.
Article 2 : La décision en date du 14 mai 1985 par laquelle le maire du Moule a licencié Mme X... est annulée.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme X... est rejeté.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à la COMMUNE DU MOULE, à Mme X... et au ministre des départements et territoires d'outre-mer.