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02/06/1989 | FRANCE | N°64246

France | France, Conseil d'État, 8 / 7 ssr, 02 juin 1989, 64246


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 3 décembre 1984 et 22 février 1985 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mme Mireille X..., dite Mireille Y..., demeurant ..., et tendant à ce que le Conseil d'Etat ;
1°) annule le jugement en date du 1er octobre 1984 par lequel le tribunal administratif a rejeté sa demande de décharge en principal et majoration des compléments d'impôt sur le revenu auxquels elle a été assujettie au titre des années 1974 à 1977 et du complément de majoration exceptionnelle établi au titre de l

'année 1975 ;
2°) lui accorde la décharge des droits et pénalités cont...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 3 décembre 1984 et 22 février 1985 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mme Mireille X..., dite Mireille Y..., demeurant ..., et tendant à ce que le Conseil d'Etat ;
1°) annule le jugement en date du 1er octobre 1984 par lequel le tribunal administratif a rejeté sa demande de décharge en principal et majoration des compléments d'impôt sur le revenu auxquels elle a été assujettie au titre des années 1974 à 1977 et du complément de majoration exceptionnelle établi au titre de l'année 1975 ;
2°) lui accorde la décharge des droits et pénalités contestés ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la convention franco-suisse en vue d'éviter les doubles impositions en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune, dont la ratification a été autorisée par la loi n° 66-995 du 28 décembre 1966 ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Challan-Belval, Maître des requêtes,
- les observations de Me Odent, avocat de Mme Mireille X...,
- les conclusions de M. Chahid-Nouraï, Commissaire du gouvernement ;
Sur le principe de l'imposition en France :

Considérant que, pour contester les impositions primitives et les compléments d'impôt sur le revenu auxquels elle a été assujettie respectivement au titre des années 1975 et 1976 et au titre des années 1974 et 1977, Mme X... soutient qu'ayant transféré son domicile fiscal en Suisse le 31 mai 1974, elle n'était plus imposable en France depuis cette date jusqu'au 31 décembre 1976, date de son retour en France, et qu'au titre de l'année 1977 elle n'était imposable en France qu'à raison de ses seuls revenus de source française ;
Considérant qu'aux termes de l'article 17 de la convention conclue entre la France et la Suisse en vue d'éviter les doubles impositions en matière d'impôt sur le revenu et sur la fortune, dont la ratification a été autorisée par la loi du 26 décembre 1966, et qui a été publiée par le décret du 13 septembre 1967 : "1. Les salaires qu'un résident d'un Etat contractant reçoit au titre d'un emploi salarié ne sont imposables que dans cet Etat, à moins que l'emploi ne soit exercé que dans l'autre Etat contractant ..." ; qu'aux termes de l'article 19 de la même convention : "1. Nonobstant les dispositions des articles 16 et 17, les revenus que les professionnels du spectacle tels que les artistes de théâtre, de cinéma, de la radio ou de la télévision ... retirent de leurs activités personnelles en cette qualité sont imposables dans l'Etat contractant où ces activités sont exercées, 2. Toutefois ces revenus peuvent également être imposés ans l'Etat contractant dont le bénéficiaire est un résident" ;

Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction que les revenus et bénéfices imposés au titre des années 1974, 1975 et 1976 ont été perçus par Mme X... en rémunération de son activité de professionnelle du spectacle exercée en France ; que c'est par suite à bon droit qu'en application de l'article 19-1 de la convention fiscale franco-suisse précitée, lesdites sommes, qui ayant été remboursées par l'administration suisse à Mme X..., ne peuvent être regardées comme ayant été imposées dans ce pays par application du 2° de l'article 19 de ladite convention, ont été soumises en France à l'impôt sur le revenu ;
Considérant, en second lieu, que Mme X... ne prétend pas que ce soit à titre accessoire qu'elle a, en 1977, exercé son activité professionnelle en France ; qu'en vertu des dispositions précitées des articles 4-A et 4-B du code général des impôts, elle est donc imposable en France au titre de l'année 1977 à raison de son revenu global ; qu'aucune disposition de la convention franco-suisse précitée ne fait pas obstacle à cette imposition ;
Sur les pénalités :
En ce qui concerne l'année 1974 :
Considérant que les pénalités appliquées au titre de 1974 et qui ne sont mentionnées ni dans la notification de redressement du 20 décembre 1978, ni dans la réponse aux observations du contribuable du 12 septembre 1979 ont été constatées pour la première fois par un rôle mis en recouvrement le 31 janvier 1980 ; qu'à cette date, le délai de prescription prévu à l'article 196 alors en vigueur avait expiré en ce qui concerne l'année 1974 ; que le contribuable est donc fondé à demander la décharge des pénalités afférentes à cette année ; qu'il y a lieu cependant d'y substituer les intérêts de retard correspondant dans la limite des pénalités primitivement appliquées ;
En ce qui concerne les années 1975 et 1976 :

Considérant que Mme X... s'est abstenue de souscrire les déclarations de ses revenus relatives aux années 1975 et 1976 en dépit de deux mises en demeure d'avoir à produire dans un délai de trente jours lesdites déclarations ; qu'ainsi, les conditions d'application de la majoration de 100 % prévues par l'article 1733-1° sont remplies ;
Considérant, d'une part, qu'il n'est pas contesté que la notification de redressements du 8 juin 1979 se référait à la situation de taxation d'office, et faisait mention des pénalités applicables ; que cette notification, qui comportait donc la motivation des pénaliltés, a eu pour effet d'interrompre le délai de prescription ; que, dès lors, le contribuable n'est pas fondé à demander, par ce motif, la décharge des pénalités pour l'année 1975 ;
Considérant, d'autre part, que Mme X... soutient que les pénalités pour 1975 et 1976 n'ont pas été motivées conformément aux dispositions de la loi du 11 juillet 1979 ; qu'aux termes de la loi n° 86-1318 du 30 décembre 1986 : "1° Les décisions mettant à la charge des contribuables des sanctions fiscales sont motivées au sens de la loi du 11 juillet 1979 ... quand un document ou une décision adressé au plus tard lors de la notification du titre exécutoire ou de son extrait en a porté la motivation à la connaissance du contribuable ; 2° Les décisions notifiées antérieurement à la publication de la présente loi dans les conditions prévues au paragraphe 1°) sont réputées régulièrement motivées" ; qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, l'administration a fait connaître à Mme X... par la notification susmentionnée, qui faisait suite à plusieurs mises en demeure, les circonstances de fait ou de droit qui la rendaient passible des pénalités prévues par l'article 1733-1° du code général des impôts et lui a donc fait connaître la motivation de celles-ci ; que, dès lors, Mme X... n'est pas fondée à soutenir que lesdites pénalités auraient été insuffisamment motivées ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme X... est seulement fondée à demander la réformation du jugement attaqué en tant qu'il a laissé à sa charge les pénalités concernant l'année 1974 ;
Article 1er : Les intérêts de retard sont, dans la limite de ces dernières, substitués aux pénalités mises à la charge de Mme X... au titre de la période du 1er juin au 31 décembre 1974.
Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Paris en date du 1er octobre 1984 est réformé en ce qu'il a de contraire à la présente décision.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme X... est rejeté.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à Mme X... et au ministre délégué auprès du ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et du budget, chargé du budget.


Sens de l'arrêt : Réformation rejet surplus
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

CONTRIBUTIONS ET TAXES - GENERALITES - TEXTES FISCAUX - CONVENTIONS INTERNATIONALES - CONVENTIONS BILATERALES - Suisse (convention du 9 septembre 1966) - Article 19 - Imposition des revenus perçus par les professionnels du spectacle en cette qualité.

19-01-01-05-02, 19-04-01-02-02 Pour contester les impositions primitives et les compléments d'impôt sur le revenu auxquels elle a été assujettie respectivement au titre des années 1975 et 1976 et au titre des années 1974 et 1977, la contribuable soutient qu'ayant transféré son domicile fiscal en Suisse le 31 mai 1974, elle n'était plus imposable en France depuis cette date jusqu'au 31 dcembre 1976, date de son retour en France, et qu'au titre de l'année 1977 elle n'était imposable en France qu'à raison de ses seuls revenus de source française. Aux termes de l'article 17 de la convention conclue entre la France et la Suisse en vue d'éviter les doubles impositions en matière d'impôt sur le revenu et sur la fortune, dont la ratification a été autorisée par la loi du 26 décembre 1966, et qui a été publiée par le décret du 13 septembre 1967 : "1) Les salaires qu'un résident d'un Etat contractant reçoit au titre d'un emploi salarié ne sont imposables que dans cet Etat, à moins que l'emploi ne soit exercé que dans l'autre Etat contractant ...". Aux termes de l'article 19 de la même convention : "1) Nonobstant les dispositions des articles 16 et 17, les revenus que les professionnels du spectacle tels que les artistes de théâtre, de cinéma, de la radio ou de la télévision ... retirent de leurs activités personnelles en cette qualité sont imposables dans l'Etat contractant où ces activités sont exercées ; 2) Toutefois, ces revenus peuvent également être imposés dans l'Etat contractant dont le bénéficiaire est résident". Les revenus et bénéfices imposés au titre des années 1974, 1975 et 1976 ont été perçus par la contribuable en rémunération de son activité de professionnelle du spectacle exercée en France. C'est par suite à bon droit qu'en application de l'article 19-1 de la convention fiscale franco-suisse précitée, lesdites sommes, qui ayant été remboursées par l'administration suisse à la contribuable, ne peuvent être regardées comme ayant été imposées dans ce pays par application du 2°) de l'article 19 de ladite convention, ont été soumises en France à l'impôt sur le revenu. La contribuable ne prétend pas que ce soit à titre accessoire qu'elle a, en 1977, exercé son activité professionnelle en France. En vertu des dispositions des articles 4-A et 4-B du C.G.I., elle est donc imposable en France au titre de l'année 1977 à raison de son revenu global. Aucune stipulation de la convention franco-suisse précitée ne fait obstacle à cette imposition.

CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOTS SUR LES REVENUS ET BENEFICES - REGLES GENERALES PROPRES AUX DIVERS IMPOTS - IMPOT SUR LE REVENU - LIEU D'IMPOSITION - Territorialité - Convention franco-suisse - Professionnels du spectacle.


Références :

. Loi 79-587 du 11 juillet 1979
. Loi 86-1318 du 30 décembre 1986 art. Finances rectificative pour 1986
CGI 4 A, 4 B, 196, 1733 par. 1
Convention du 09 septembre 1966 France Suisse art. 17, art. 19 doubles impositions
Décret 67-879 du 13 septembre 1967
Loi 66-995 du 26 septembre 1966


Publications
Proposition de citation: CE, 02 jui. 1989, n° 64246
Mentionné aux tables du recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : M. Rougevin-Baville
Rapporteur ?: M. Challan-Belval
Rapporteur public ?: M. Chahid-Nouraï

Origine de la décision
Formation : 8 / 7 ssr
Date de la décision : 02/06/1989
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 64246
Numéro NOR : CETATEXT000007627102 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;1989-06-02;64246 ?
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