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07/06/1989 | FRANCE | N°69828

France | France, Conseil d'État, 3 /10 ssr, 07 juin 1989, 69828


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 24 juin 1985 et 21 octobre 1985 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la FEDERATION REGIONALE DES MAISONS DES JEUNES ET DE LA CULTURE "Maison pour tous de la région parisienne", dont le siège est ..., représentée par son président en exercice, et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du 24 avril 1985 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à ce que la ville de Brunoy soit condamnée à lui verser une indemnité de 243 694 F

en réparation du préjudice qu'elle a subi à la suite de la résiliatio...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 24 juin 1985 et 21 octobre 1985 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la FEDERATION REGIONALE DES MAISONS DES JEUNES ET DE LA CULTURE "Maison pour tous de la région parisienne", dont le siège est ..., représentée par son président en exercice, et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du 24 avril 1985 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à ce que la ville de Brunoy soit condamnée à lui verser une indemnité de 243 694 F en réparation du préjudice qu'elle a subi à la suite de la résiliation fautive du contrat qui la liait à la fédération pour le financement d'un poste d'animateur,
2°) condamne la ville de Brunoy à lui verser la somme de 243 694 F ainsi que les intérêts et les intérêts des intérêts ;

Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code civil ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Vistel, Conseiller d'Etat,
- les observations de la S.C.P. Masse-Dessen, Georges, Thouvenin, avocat de la FEDERATION REGIONALE DES MAISONS DES JEUNES ET DE LA CULTURE DE LA REGION PARISIENNE, "Maison pour tous de la région parisienne",
- les conclusions de M. de Guillenchmidt, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que, par contrat conclu le 5 janvier 1981, la FEDERATION REGIONALE DES MAISONS DES JEUNES ET DE LA CULTURE DE LA REGION PARISIENNE s'est engagée à mettre un animateur à la disposition de la ville de Brunoy pour exercer les fonctions de directeur de la maison des jeunes et de la culture, la ville s'engageant, pour sa part, à rembourser, conjointement avec l'Etat, les dépenses exposées par la fédération pour financer cet emploi ; que, par lettre en date du 10 novembre 1983, la ville de Brunoy a fait connaître au président de la fédération régionale son intention de résilier le contrat la liant à la fédération à compter du 1er janvier 1984 ; que la fédération fait appel du jugement, en date du 24 avril 1985, par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à ce que la ville soit condamnée à l'indemniser du préjudice résultant de l'obligation où elle s'est trouvée, à la suite de cette résiliation, de supporter la charge de la rémunération pendant l'année 1984 de la directrice de la maison de la culture ;
Sur le principe de la responsabilité :
Considérant que la ville de Brunoy, si elle entendait, ainsi que ceci résulte de la lettre du maire en date du 10 novembre 1983, résilier le contrat la liant à la fédération, était tenue de respecter l'article 9-2° dudit contrat, en vertu duuel celui-ci ne pouvait être dénoncé par la collectivité ou par la fédération régionale "qu'à l'échéance du 31 décembre et qu'avec préavis adressé à l'autre partie -par lettre recommandée- au plus tard le 31 décembre de l'année précédente" ; qu'en application de cette disposition, la ville de Brunoy ne pouvait en novembre 1983 dénoncer son contrat qu'à l'échéance du 31 décembre 1984 ; qu'en le dénonçant à compter du 1er janvier 1984, elle a commis une faute de nature à engager sa responsabilité à l'égard de la fédération régionale ;

Considérant que, pour échapper à cette responsabilité, la ville ne pouvait utilement se prévaloir de l'article 7-1 de la convention, aux termes duquel "la collectivité n'est tenue d'assurer le financement prévu que si le poste est occupé" ; que, dans ces conditions, la circonstance que la ville aurait envisagé de laisser l'activité de la maison des jeunes et de la culture se poursuivre jusqu'au 30 juin 1984 et n'aurait mis fin à cette activité à compter du 1er janvier 1984 qu'à la suite du refus de l'association qui gérait la maison d'accepter les conditions mises à cette prolongation d'activité, est, en tout état de cause, sans incidence sur l'étendue de l'obligation où se trouve la ville de réparer le préjudice causé à la fédération régionale par la résiliation irrégulière de la convention du 5 janvier 1981 ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que c'est à tort que le jugement attaqué a dénié à la fédération régionale tout droit à indemnité ;
Sur le montant de l'indemnité :
Considérant, en premier lieu, que la fédération a droit à être indemnisée des dépenses qu'elle a exposées au titre de la rémunération de la directrice de la maison des jeunes et de la culture pendant la totalité de l'année 1984 ; que, toutefois, si la fédération évalue ces dépenses à 207 060 F, cette somme inclut pour 42 666 F un remboursement à l'Etat dont il ressort des pièces du dossier qu'il n'a pas été effectivement opéré ; qu'il y a donc lieu d'évaluer ce chef de préjudice à 164 394 F ;

Considérant, en second lieu, que les demandes de la fédération concernant, d'une part, l'allocation d'une somme de 20 000 F au titre des troubles occasionnés pour elle par le comportement de la commune et, d'autre part, l'allocation d'une somme de 5 052 F au titre d'une indemnité de logement qu'elle aurait versée à la directrice de la maison des jeunes ne sont assorties d'aucune justification et doivent être rejetées ;
Considérant, enfin, que le préjudice résultant pour la fédération de l'impossibilité où elle se serait trouvée de se faire régler la dette de 11 582 F que la maison des jeunes aurait eue à son égard au titre de cotisations est sans lien direct avec l'irrégularité de la résiliation par la ville de la convention du 5 janvier 1981 passée entre la ville de Brunoy et la fédération régionale ; que les conclusions présentées sur ce point ne sauraient être accueillies ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu de condamner la ville de Brunoy à verser à la FEDERATION REGIONALE DES MAISONS DES JEUNES ET DE LA CULTURE une somme de 164 394 F ;
Sur les intérêts :
Considérant que la fédération requérante a droit, ainsi qu'elle le demande, aux intérêts de la somme de 164 394 F à compter du 20 février 1984 ;
Sur les intérêts des intérêts :
Considérant que la capitalisation des intérêts a été demandée les 24 juin 1985 et 26 avril 1989 ; qu'à ces dates, il était dû au moins une année d'intérêts ; que, dès lors, conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil, il y a lieu de faire droit à ces demandes ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Paris du 24 avril 1985 et la décision du maire de Brunoy en date du 13 février 1984 sont annulés.
Article 2 : La ville de Brunoy est condamnée à verser à la FEDERATION REGIONALE DES MAISONS DES JEUNES ET DE LA CULTURE DE LA REGION PARISIENNE la somme de 164 394 F. Cette somme portera intérêtsau taux légal à compter du 20 février 1984. Les intérêts échus les 24juin 1985 et 26 avril 1989 seront capitalisés à ces dates pour produire eux-mêmes intérêts.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de la FEDERATION REGIONALE DES MAISONS DES JEUNES ET DE LA CULTURE DE LA REGION PARISIENNE est rejeté.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à la FEDERATION REGIONALE DES MAISONS DES JEUNES ET DE LA CULTURE DE LA REGION PARISIENNE, à la ville de Brunoy et au ministre de l'intérieur.


Type d'affaire : Administrative

Analyses

39-04-02-03 MARCHES ET CONTRATS ADMINISTRATIFS - FIN DES CONTRATS - RESILIATION - DROIT A INDEMNITE -Résiliation intervenue en violation des clauses contractuelles - Résiliation irrégulière - Indemnisation.


Références :

Code civil 1154


Publications
Proposition de citation: CE, 07 jui. 1989, n° 69828
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Vistel
Rapporteur public ?: de Guillenchmidt

Origine de la décision
Formation : 3 /10 ssr
Date de la décision : 07/06/1989
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 69828
Numéro NOR : CETATEXT000007751044 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;1989-06-07;69828 ?
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