La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

14/06/1989 | FRANCE | N°59868

France | France, Conseil d'État, 9 / 7 ssr, 14 juin 1989, 59868


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 18 juin 1984 et 3 octobre 1984 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. BUREAU (Gilles), demeurant ..., et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1°/ annule un jugement en date du 12 mars 1984 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande en décharge des impositions complémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 1975 et 1976,
2°/ lui accorde décharge des impositions contestées ;
Vu les autres pièces du doss

ier ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 18 juin 1984 et 3 octobre 1984 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. BUREAU (Gilles), demeurant ..., et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1°/ annule un jugement en date du 12 mars 1984 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande en décharge des impositions complémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 1975 et 1976,
2°/ lui accorde décharge des impositions contestées ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu le code général des impôts ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de Mme Bechtel, Maître des requêtes,
- les observations de la S.C.P. Lyon-Caen, Fabiani, Liard, avocat de M. BUREAU,
- les conclusions de Mme Liébert-Champagne, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que, par décision du 26 août 1988, postérieure à l'introduction du pourvoi, le directeur des services fiscaux a dégrevé M. BUREAU des droits et pénalités mis à sa charge au titre de l'année 1975, à concurrence de 42 575 F ; que, dans cette mesure, la requête est devenue sans objet ;
Considérant qu'il ressort des dispositions des articles 176 et 179 du code général des impôts, dans leur rédaction applicable aux impositions contestées que l'administration peut demander au contribuable des justifications lorsqu'elle a réuni des éléments permettant d'établir que celui-ci peut avoir des revenus plus importants que ceux qui font l'objet de sa déclaration, et qu'en cas de défaut de réponse, le contribuable est taxé d'office à l'impôt sur le revenu ;
En ce qui concerne l'année 1976 :
Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'administration a relevé des versements sur les comptes bancaires de M. BUREAU excédant, pour un montant de 36 000 F les revenus déclarés par l'intéressé, d'un montant de 178 597 F ; que l'excédent ainsi relevé n'était pas suffisant pour permettre à l'administration de demander au contribuable des justifications en application des dispositions susanalysées ; qu'il suit de là que la procédure suivie à l'encontre de M. BUREAU était irrégulière et que celui-ci doit dès lors être déchargé des impositions mises à sa charge sur le fondement de cette procédure au titre de l'année 1976 ;
En ce qui concerne l'année 1975 :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. BUREAU, architecte, à qui l'administration a demandé, à l'occasion d'une vérification approfondie de situation fiscale d'ensemble, de fournir des justifications quant à l'origine des crédits figurant sur ses comptes bancaires pour des sommes d'un montant de 274 900 F excédant sensiblementle montant de ses revenus déclarés au titre de l'année 1975, d'un montant de 75 729 F, a indiqué que ses disponibilités de l'année 1975 résultaient, notamment, du remboursement de bons de caisse et de bons du trésor que ses deux associés lui avaient remis en 1973 en compensation du déséquilibre entre sa part personnelle dans les résultats de la société civile qu'ils avaient constituée et la leur, qui était plus faible ; que, toutefois, M. BUREAU n'a fait état d'aucun acte écrit relatif à cette répartition ; que les autres documents produits par lui, s'ils font état notamment de l'achat par l'un de ses associés de bons du trésor en 1973 et de mouvements des comptes bancaires desdits associés, n'établissaient nullement l'existence de ce mécanisme de compensation ; que, dans ces conditions, l'administration était fondée à regarder les allégations de M. BUREAU comme équivalant à un défaut de réponse aux demandes de justifications qui lui ont été adressées et à taxer d'office, à son nom, les sommes dont l'origine est demeurée inexpliquée ;
Considérant qu'il appartient à M. BUREAU, régulièrement taxé d'office, d'apporter la preuve de l'exagération des bases d'imposition retenues par l'administration ;
Considérant, d'une part, que M. BUREAU soutient que le dégrèvement des droits et pénalités de 42 575 F prononcé en cours d'instance se borne à enregistrer la différence de 43 750 F entre les apports sur ses comptes et ses dépenses de train de vie au cours de la seule période du 10 octobre au 31 décembre 1974, et ne prend pas en compte les disponibilités dégagées pendant le reste de la même année et non employées avant le 1er janvier 1975 ; que toutefois, il ne justifie pas que ses "excédents de trésorerie" atteignaient, pour la totalité de l'année 1975, une somme supérieure à celle de 43 750 F qui a été admise par l'administration ; qu'ainsi c'est à bon droit que cette dernière a limité le dégrèvement prononcé au montant ci-dessus indiqué ;

Considérant, d'autre part, que M. BUREAU persiste à soutenir que le surplus des sommes imposées d'office au titre de 1975 provient du remboursement de bons de caisse et de bons du trésor qui lui avaient été remis, en 1973, par ses deux associés en vue de corriger l'insuffisance de leur participation aux résultats de la société civile qu'ils avaient constituée ; qu'à défaut de la production de nouvelles pièces, M. BUREAU ne justifie pas de l'opération alléguée, ni, par conséquent, de l'origine des sommes en cause ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. BUREAU est fondé à demander l'annulation du jugement attaqué en ce que ledit jugement a rejeté sa demande en décharge des suppléments d'impôt sur le revenu auxquels il a été assujetti au titre de l'année 1976 ; qu'il n'est en revanche pas fondé à demander l'annulation dudit jugement, qui est suffisamment motivé, en tant qu'il a rejeté sa demande en décharge des suppléments d'impôt sur le revenu auxquels il a été assujetti au titre de l'année 1975 ;
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de M. BUREAU, à concurrence de la somme de 42 575 F dont il a été dégrevé.
Article 2 : M. BUREAU est déchargé des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujettiau titre de l'année 1976.
Article 3 : Le jugement du 12 mars 1984 du tribunal administratif de Paris est réformé en ce qu'il a de contraire à la présente décision.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. BUREAU est rejeté.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. BUREAU et au ministre délégué auprès du ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et du budget, chargé du budget.


Synthèse
Formation : 9 / 7 ssr
Numéro d'arrêt : 59868
Date de la décision : 14/06/1989
Sens de l'arrêt : Réformation décharge
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

19-04-01-02-05-02-02 CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOTS SUR LES REVENUS ET BENEFICES - REGLES GENERALES PROPRES AUX DIVERS IMPOTS - IMPOT SUR LE REVENU - ETABLISSEMENT DE L'IMPOT - TAXATION D'OFFICE - POUR DEFAUT DE REPONSE A UNE DEMANDE DE JUSTIFICATIONS (ART. 176 ET 179 DU CGI, REPRIS AUX ARTICLES L.16 ET L.69 DU LIVRE DES PROCEDURES FISCALES) -Conditions de mise en oeuvre - Condition du double - Conditions de la mise en oeuvre de l'article 176 du C.G.I., repris à l'article L.16 du livre des procédures fiscales - Ecart insuffisant entre les versements sur les comptes bancaires et le montant des revenus déclarés.

19-04-01-02-05-02-02 Lorsque l'administration constate que les versements sur les comptes bancaires du contribuable excèdent les revenus déclarés par l'intéressé, l'excédent ainsi relevé ne permet à l'administration de demander au contribuable des justifications en application des dispositions de l'article 176 du CGI que si cet excédent est important et si, le montant des versements atteint en principe au moins le double des revenus déclarés. Dès lors que la régularité de la procédure est contestée, le juge vérifie que l'administration était en droit de mettre en oeuvre l'article 176 du CGI (sol. impl.).


Publications
Proposition de citation : CE, 14 jui. 1989, n° 59868
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Rougevin-Baville
Rapporteur ?: Mme Bechtel
Rapporteur public ?: Mme Liébert-Champagne

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1989:59868.19890614
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award