La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

16/06/1989 | FRANCE | N°59616

France | France, Conseil d'État, 10/ 9 ssr, 16 juin 1989, 59616


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 29 mai 1984 et 28 septembre 1984 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour l'Association "Le SKI ALPIN MUROIS", représentée par son président en exercice, demeurant es qualité au siège sis à Prunières (38000), et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement en date du 21 mars 1984 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à ce que l'Etat, le département de l'Isère et la commune de la Morte soient condamnés conjointement et solidair

ement à lui verser les indemnités correspondant aux conséquences dommag...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 29 mai 1984 et 28 septembre 1984 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour l'Association "Le SKI ALPIN MUROIS", représentée par son président en exercice, demeurant es qualité au siège sis à Prunières (38000), et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement en date du 21 mars 1984 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à ce que l'Etat, le département de l'Isère et la commune de la Morte soient condamnés conjointement et solidairement à lui verser les indemnités correspondant aux conséquences dommageables appréciées par l'expert en réparation du préjudice qu'elle a subi du fait de la destruction d'un chalet par une avalanche le 20 janvier 1981,
2°) condamne l'Etat, le département de l'Isère et la commune de la Morte conjointement et solidairement à lui verser ces indemnités avec intérêts de droit et capitalisation de ces intérêts en réparation du préjudice subi ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le plan d'occupation des sols ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le code des communes ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. de Montgolfier, Auditeur,
- les observations de la S.C.P. de Chaisemartin, avocat de l'association "LE SKI ALPIN MUROIS", de la S.C.P. Boré, Xavier, avocat de la commune de la Morte et de la S.C.P. Lyon-Caen, Fabiani, Liard, avocat du département de l'Isère,
- les conclusions de M. Frydman, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que l'association "LE SKI ALPIN MUROIS" a obtenu en 1966 un permis de construire un chalet sur un terrain qu'elle avait acquis dans la commune de la Morte ; que ce chalet a été atteint et gravement endommagé par une avalanche survenue le 20 janvier 1981 ;
Sur les conclusions tendant à la condamnation du département de l'Isère :
Considérant que, contrairement aux prescriptions de l'article 40 de l'ordonnance du 31 juillet 1945, la requête de l'association "LE SKI ALPIN MUROIS", en tant qu'elle est dirigée contre le département de l'Isère, ne contient l'exposé d'aucun moyen ; que, dès lors, elle n'est pas recevable ;
Sur les conclusions tendant à la condamnation de l'Etat :
Considérant que, si le chalet dont il s'agit est situé dans une zone présentant des risques d'avalanche, telle qu'elle a été délimitée par un arrêté du préfet de l'Isère en date du 8 novembre 1972, il résulte de l'instruction qu'à la date où a été délivré à l'association "LE SKI ALPIN MUROIS" son permis de construire, soit le 18 janvier 1966, compte tenu des informations possédées à l'époque sur les risques d'avalanche que présentait ladite zone alors que, depuis 1905, aucune avalanche n'avait franchi la forêt située en contre-haut du chalet de la requérante, l'Etat n'a pas commis de faute susceptible d'engager sa responsabilité envers cette dernière en n'ayant pas encore mis en oeuvre à la date de délivrance du permis de construire la procédure de délimitation des zones exposées à des risques naturels prévue par l'article 2 du décret du 29 août 1955 devenu l'article R.111-3 du code de l'urbanisme ; que, pour les mêmes raisons, le maire de la Morte agissant au nom de l'Etat n'a pas commis de faute en délivrant à l'association "LE SKI ALPIN MUROIS" le permis de construire qu'elle sollicitait sans la mettre en garde contre le risque d'avalanche que présentait l'emplacement qu'elle avait choisi pour implanter son chalet ;
Sur les conclusions tendant à la condamnation de la commune de la Morte :

Considérant qu'aux termes de l'article L.131-2 du code des communes, alors en vigueur : "La police municipale a pour objet d'assurer le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publiques. Elle comprend notamment ... 6°) le soin de prévenir par des précautions convenables, et de faire cesser, par la distribution des secours nécessaires, les accidents et les fléaux calamiteux tels que ... les avalanches ou autres accidents naturels ..." ; qu'il résulte de l'instruction que la commune de la Morte, agissant en liaison avec les services de l'Etat qu'elle avait informés et consultés, a décidé et fait exécuter en 1974 et 1975 des travaux destinés à protéger les habitations contre les avalanches ; que, bien que les ouvrages ainsi construits n'aient pas été suffisamment efficaces pour parer entièrement au danger d'avalanche, la municipalité, en n'entreprenant pas des travaux plus importants qui auraient été hors de proportion avec ses ressources, n'a pas commis de faute de nature à engager la responsabilité de la commune dans la prescription des mesures de police destinées à prevenir les accidents naturels tels que les avalanches ; que la circonstance que les ouvrages de protection qu'elle a fait construire se sont révélés insuffisants pour prévenir toutes les conséquences de l'avalanche survenue le 20 janvier 1981 ne révèle pas par elle-même un défaut d'entretien normal desdits ouvrages alors qu'il n'est pas contesté qu'ils ont été exécutés et entretenus d'une manière normale ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que l'association "LE SKI ALPIN MUROIS" n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué en date du 21 mars 1984, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande en tant qu'elle tendait à la condamnation de l'Etat et du département de l'Isère ni à se plaindre de ce que les premiers juges aient rejeté également ladite demande en tant qu'elle tendait à la condamnation de la commune de la Morte ;
Article ler : La requête de l'association "LE SKI ALPIN MUROIS" est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à l'association "LE SKI ALPIN MUROIS", à la commune de la Morte, au département de l'Isère et au ministre de l'équipement, du logement, des transports et de la mer.


Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

COMMUNE - POLICE MUNICIPALE - POLICE DE LA SECURITE - POLICE DES LIEUX DANGEREUX - ZONES EXPOSEES AUX RISQUES D'EBOULEMENTS - D'AVALANCHE OU DE COULEES DE BOUE - Ouvrages de protection insuffisants pour parer à tout danger - Faute de la commune - Absence.

60-02-05-01 A la date où a été délivré le permis de construire, compte tenu des informations possédées à l'époque sur les risques d'avalanche que présentait ladite zone alors que, depuis soixante ans aucune avalanche n'avait franchi la forêt située en contre-haut du chalet du requérant, l'Etat n'a pas commis de faute susceptible d'engager sa responsabilité envers ce dernier en n'ayant pas encore mis en oeuvre à la date de délivrance du permis de construire la procédure de délimitation des zones exposées à des risques naturels prévue par l'article R.111-3 du code de l'urbanisme.

POLICE ADMINISTRATIVE - POLICE GENERALE - SECURITE PUBLIQUE - POLICE DES LIEUX DANGEREUX - PISTES DE SKI ET ZONES EXPOSEES AUX AVALANCHES - Zones exposées aux risques d'avalanche - Ouvrages de protection insuffisants pour parer à tout danger - Faute de la commune - Absence.

16-03-05-01-03, 49-04-03-01-01, 60-02-03-02-01 Ouvrages destinés à protéger les habitations contre les avalanches insuffisamment efficaces pour parer entièrement au danger d'avalanche. En n'entreprenant pas des travaux plus importants qui auraient été hors de proportion avec ses ressources, la municipalité n'a pas commis de faute de nature à engager la responsabilité de la commune dans la prescription des mesures de police destinées à prévenir les accidents naturels tels que les avalanches.

RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - RESPONSABILITE EN RAISON DES DIFFERENTES ACTIVITES DES SERVICES PUBLICS - SERVICES DE POLICE - POLICE MUNICIPALE - POLICE DE LA SECURITE - Zones exposées aux risques d'avalanche - Ouvrages de protection insuffisants pour parer à tout danger - Faute de la commune - Absence.

RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - RESPONSABILITE EN RAISON DES DIFFERENTES ACTIVITES DES SERVICES PUBLICS - SERVICES DE L'URBANISME - PERMIS DE CONSTRUIRE - Responsabilité à raison de la délivrance d'un permis de construire - Absence de faute - Zone présentant des risques d'avalanche - Permis délivré alors que n'avait pas encore été mise en oeuvre la procédure de délimitation des zones exposées (article R - 111-3 du code de l'urbanisme).


Références :

. Code des communes L131-2
Code de l'urbanisme R111-3
Décret du 29 août 1955 art. 2
Ordonnance 45-1708 du 31 juillet 1945 art. 40


Publications
Proposition de citation: CE, 16 jui. 1989, n° 59616
Publié au recueil Lebon
RTFTélécharger au format RTF
Composition du Tribunal
Président : Mme Bauchet
Rapporteur ?: M. de Montgolfier
Rapporteur public ?: M. Frydman
Avocat(s) : S.C.P. de Chaisemartin, S.C.P. Boré, Xavier, S.C.P. Lyon-Caen, Fabiani, Liard, Avocat

Origine de la décision
Formation : 10/ 9 ssr
Date de la décision : 16/06/1989
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 59616
Numéro NOR : CETATEXT000007753454 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;1989-06-16;59616 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award