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23/06/1989 | FRANCE | N°101894

France | France, Conseil d'État, Assemblee, 23 juin 1989, 101894


Vu la requête, enregistrée le 12 septembre 1988 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Jean BUNOZ, président du comité de gestion de l'Olympique d'Antibes-Juan-les-Pins, dont le siège est sis Salle Salusse-Santoni, ..., et tendant à ce que le Conseil d'Etat annule la décision implicite de rejet résultant du silence gardé par la fédération française de basket-ball sur la demande présentée le 16 juin 1988 et tendant à l'abrogation du règlement en date du 22 février 1986 de ladite fédération en tant qu'il limite à deux le nombre de joueurs "non s

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Vu la requête, enregistrée le 12 septembre 1988 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Jean BUNOZ, président du comité de gestion de l'Olympique d'Antibes-Juan-les-Pins, dont le siège est sis Salle Salusse-Santoni, ..., et tendant à ce que le Conseil d'Etat annule la décision implicite de rejet résultant du silence gardé par la fédération française de basket-ball sur la demande présentée le 16 juin 1988 et tendant à l'abrogation du règlement en date du 22 février 1986 de ladite fédération en tant qu'il limite à deux le nombre de joueurs "non sélectionnables en équipe de France selon le critère FIBA régissant le statut national du joueur", qui peuvent participer aux rencontres sportives comptant pour le championnat de France ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 ;
Vu la loi n° 83-1045 du 8 décembre 1983 ;
Vu la loi n° 84-610 du 16 juillet 1984 ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Rossi, Auditeur,
- les observations de la S.C.P. Tiffreau, Thouin-Palat, avocat de M. X..., et de la S.C.P. Lemaitre, Monod, avocat de la fédération française de basket ball et du comité des clubs de haut niveau,
- les conclusions de M. Faugère, Commissaire du gouvernement ;

Sur l'intervention du syndicat national des basketteurs :
Considérant que le syndicat national des basketteurs a intérêt au maintien de la décision attaquée ; qu'ainsi son intervention est recevable ;
Sur la recevabilité de la requête et la légalité de la décision attaquée :
Considérant que l'autorité compétente saisie d'une demande tendant à l'abrogation d'un règlement illégal est tenue d'y déférer soit que ce règlement ait été illégal dès la date de sa signature, soit que l'illégalité résulte de circonstances de droit ou de fait postérieures à cette date ;
Considérant qu'aux termes du IV de l'article 53 de la loi du 17 juillet 1978 "sont abrogées toutes dispositions législatives ou réglementaires autres que l'article 81 du code de la nationalité française qui frappent d'incapacité temporaire la personne ayant acquis la nationalité française" ; que les dispositions de l'article 81 du code de la nationalité française qui soumettaient l'étranger naturalisé à diverses incapacités pendant des délais de cinq et dix ans après la naturalisation ont elles-mêmes été abrogées par la loi du 8 décembre 1983 ; qu'aux termes de l'article 80 du code de la nationalité française dans sa rédaction issue de la même loi : "La personne qui a acquis la nationalité française jouit de tous les droits et est tenue à toutes les obligations attachées à la qualité de français, à dater du jour de cette acquisition" ;

Considérant que l'article 7-1 du règlement sportif adopté le 22 février 1986 par le comité directeur de la fédération française de basket-ball qui subordonne la participation des clubs au championnat de France de première division nationale masculine à l'inscription sur la feuille de marque de chaque rencontre de "10 joueurs dont au maximum 2 joueurs non sélectionnables en équipe de France selon le critère de la fédération internationale de basket association régissant le statut national des joueurs", a pour objet et pour effet de limiter à deux par rencontre les joueurs inscrits qui sont soit de nationalité étrangère, soit de nationalité française lorsqu'elle a été acquise depuis moins de trois ans ; que ces dispositions méconnaissent les prescriptions législatives susrappelées qui interdisent à la fédération d'établir des distinctions entre les joueurs français selon qu'ils ont ou non acquis la nationalité française et selon la date à laquelle ils l'ont acquise, et d'assimiler ceux d'entre eux qui la possèdent depuis moins de trois ans à des joueurs étrangers ; que la circonstance que les dispositions contestées utilisent un critère retenu par le règlement de la fédération internationale de basket association et qu'elles aient pour but de permettre l'entraînement dans les compétitions nationales des joueurs remplissant les conditions exigées pour faire partie de l'équipe de France dans les compétitions internationales n'est pas de nature à donner une base légale auxdites dispositions ; qu'ainsi, et alors même que les licences délivrées aux joueurs qui ont acquis la nationalité française depuis moins de trois ans n'établissent en elles-mêmes aucune restriction à l'accès aux compétitions nationales, les dispositions contestées de l'article 7-1 du règlement du 22 février 1986 étaient, dès la date de la signature de ce règlement entachées d'illégalité ; que, dès lors, M. BUNOZ, qui justifie d'un intérêt lui donnant qualité pour agir, est recevable et fondé à demander l'annulation de la décision rejetant sa demande tendant à l'abrogation desdites dispositions de l'article 7-1 dudit règlement ;
Article 1er : L'intervention du syndicat national des basketteurs est admise.
Article 2 : La décision implicite née du silence gardé pendant plus de quatre mois par le président de la fédération française de basket-ball sur la demande de M. BUNOZ tendant à l'abrogation de l'article 7-1 du règlement du 22 février 1986 en tant qu'il régit le cas des joueurs naturalisés depuis moins de trois ans est annulée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. BUNOZ, à la fédération française de basket-ball, au comité des clubs de haut niveau et au ministre d'Etat, ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports.


Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Recours pour excès de pouvoir

Analyses

ACTES LEGISLATIFS ET ADMINISTRATIFS - VALIDITE DES ACTES ADMINISTRATIFS - VIOLATION DIRECTE DE LA REGLE DE DROIT - LOI - VIOLATION - Code de la nationalité française - Article 80 dans sa rédaction issue de la loi du 8 décembre 1983 - Article 7-1 du règlement sportif adopté le 22 février 1986 par le comité directeur de la fédération française de basket-ball - Distinctions entre les joueurs français selon qu'ils ont ou non acquis la nationalité française et selon la date à laquelle ils l'ont acquise - Illégalité.

01-04-02-02, 26-01-01-02-01, 63-05-01-04 L'article 7-1 du règlement sportif adopté le 22 février 1986 par le comité directeur de la Fédération française de basket-ball qui subordonne la participation des clubs au championnat de France de première division nationale masculine à l'inscription sur la feuille de marque de chaque rencontre de "10 joueurs dont au maximum 2 joueurs non sélectionnables en équipe de France selon le critère de la Fédération internationale de basket association régissant le statut national des joueurs", a pour objet et pour effet de limiter à deux par rencontre les joueurs inscrits qui sont soit de nationalité étrangère, soit de nationalité française lorsqu'elle a été acquise depuis moins de trois ans. Ces dispositions méconnaissent les dispositions de l'article 80 du code de la nationalité française dans sa rédaction issue de la loi du 8 décembre 1983 qui interdisent à la fédération d'établir des distinctions entre les joueurs français selon qu'ils ont ou non acquis la nationalité française et selon la date à laquelle ils l'ont acquise, et d'assimiler ceux d'entre eux qui la possèdent depuis moins de trois ans à des joueurs étrangers. Illégalité dudit article sans que la circonstance que les dispositions contestées utilisent un critère retenu par le règlement de la Fédération internationale de basket et qu'elles aient pour but de permettre l'entraînement dans les compétitions nationales des joueurs remplissant les conditions exigées pour faire partie de l'équipe de France dans les compétitions internationales ne soit de nature à donner une base légale auxdites dispositions.

DROITS CIVILS ET INDIVIDUELS - ETAT DES PERSONNES - NATIONALITE - EFFETS DE L'ACQUISITION ET DE LA PERTE DE LA NATIONALITE - EFFETS DE L'ACQUISITION DE LA NATIONALITE - Participation aux compétitions sportives - Distinction entre les joueurs français selon qu'ils ont ou non acquis la nationalité française et selon la date à laquelle ils l'ont acquise - Illégalité.

SPECTACLES - SPORTS ET JEUX - SPORTS - FEDERATIONS SPORTIVES - ORGANISATION DES COMPETITIONS - Joueurs naturalisés - Distinctions entre les joueurs français selon qu'ils ont ou non acquis la nationalité française et selon la date à laquelle ils l'ont acquise - Violation de l'article 80 du code de la nationalité française dans sa rédaction issue de la loi du 8 décembre 1983.


Références :

Code de la nationalité 80, 81
Loi 78-753 du 17 juillet 1978 art. 53 par. VI
Loi 83-1045 du 08 décembre 1983


Publications
Proposition de citation: CE, 23 jui. 1989, n° 101894
Publié au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : M. Long
Rapporteur ?: M. Rossi
Rapporteur public ?: M. Faugère
Avocat(s) : S.C.P. Tiffreau, Thouin-Palat, S.C.P. Lemaître, Monod, Avocat

Origine de la décision
Formation : Assemblee
Date de la décision : 23/06/1989
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 101894
Numéro NOR : CETATEXT000007750096 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;1989-06-23;101894 ?
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