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26/06/1989 | FRANCE | N°99763

France | France, Conseil d'État, 3 / 5 ssr, 26 juin 1989, 99763


Vu la requête, enregistrée le 6 juillet 1988 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour la VILLE D'AIX-EN-PROVENCE, agissant par son maire en exercice, demeurant en cette qualité en l'Hôtel de Ville à Aix-en-Provence (13100), à ce dûment autorisé par une délibération du conseil municipal en date du 30 juin 1988, et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du 19 avril 1988, par lequel le tribunal administratif de Marseille a, d'une part, annulé la décision en date du 13 novembre 1986 par laquelle le maire d'Aix-en-Provence a mis fin a

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Vu la requête, enregistrée le 6 juillet 1988 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour la VILLE D'AIX-EN-PROVENCE, agissant par son maire en exercice, demeurant en cette qualité en l'Hôtel de Ville à Aix-en-Provence (13100), à ce dûment autorisé par une délibération du conseil municipal en date du 30 juin 1988, et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du 19 avril 1988, par lequel le tribunal administratif de Marseille a, d'une part, annulé la décision en date du 13 novembre 1986 par laquelle le maire d'Aix-en-Provence a mis fin aux fonctions de directrice de la crèche municipale du "Y... Gabriel" de Mme X... et d'autre part, a condamné la ville à verser à celle-ci avec intérêts de droit à compter du 16 février 1987, d'une part, une indemnité représentant les salaires que l'intéressée aurait dû percevoir entre la date de son licenciement et la date à laquelle le jugement attaqué est intervenu, et d'autre part, la somme de 10 000 F en réparation du préjudice moral subi,
2°) ordonne qu'il soit sursis à l'exécution dudit jugement ;

Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des communes ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Labarre, Conseiller d'Etat,
- les observations de la S.C.P. Vier, Barthélémy, avocat de la VILLE D'AIX-EN-PROVENCE et de la S.C.P. Lesourd, Baudin, avocat de Mme X...,
- les conclusions de M. Lévis, Commissaire du gouvernement ;
Sur la légalité de la décision de licenciement du 13 novembre 1986 :

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, d'une part, le comportement de Mme X..., chargée des fonctions de directrice d'une crèche municipale à Aix-en-Provence, dans ses relations avec les gardiennes de la crèche, n'a pas présenté un caractère fautif ; que, d'autre part, si, en prenant, à la suite du décès brutal de la mère d'un enfant qui fréquentait la crèche, certaines initiatives qui excédaient sa compétence sans en avertir ses supérieurs hiérarchiques, Mme X... a commis une faute disciplinaire, cette faute, compte tenu des circonstances dans lesquelles elle a été commise, ne présentait pas un caractère de gravité suffisant pour justifier, sans erreur manifeste d'appréciation, le licenciement de l'intéressée ; que la VILLE D'AIX-EN-PROVENCE n'est donc pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a annulé, pour excès de pouvoir, la décision, en date du 13 novembre 1986, par laquelle le maire d'Aix-en-Provence a licencié Mme X... pour les motifs susrappelés ;
Sur le préjudice causé à Mme X... par la mesure de licenciement :
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme X... avait demandé devant les premiers juges à être indemnisée parla ville "des pertes de traitement subies du fait de son licenciement" ; qu'elle avait ainsi, eu égard à l'objet du litige, suffisamment précisé sa demande ; que la VILLE D'AIX-EN-PROVENCE n'est pas fondée à soutenir que le jugement attaqué aurait dû déclarer les conclusions présentées sur ce point irrecevables, faute d'être chiffrées ;

Considérant qu'à la date de son licenciement, Mme X... occupait depuis plus de deux ans, en vertu d'un contrat auquel son renouvellement tacite avait donné le caractère de contrat à durée indéterminée, un emploi permanent ; que si, à la suite de l'annulation de ce licenciement, et en l'absence de service fait, elle ne peut prétendre au rappel de son traitement, elle est fondée à demander à la VILLE D'AIX-EN-PROVENCE la réparation du préjudice qu'elle a réellement subi du fait de son licenciement illégal ; que, dans les circonstances de l'affaire, et dès lors qu'il n'est pas établi qu'elle ait perçu d'autres rémunérations postérieurement à son éviction, les premiers juges ont pu à bon droit évaluer ce préjudice à une somme égale au montant des traitements qu'elle aurait dû percevoir entre la date de son éviction et la date du jugement du tribunal administratif ;
Considérant, enfin que le tribunal administratif n'a pas fait une évaluation exagérée du préjudice moral que la mesure de licenciement a causé à Mme X..., en condamnant, pour ce chef de préjudice, la VILLE D'AIX-EN-PROVENCE à verser à l'intéressée une indemnité de 10 000 F ;
Sur les intérêts des intérêts :
Considérant que le jugement attaqué a accordé les intérêts des sommes dues à Mme X... à compter du 16 février 1987 ; que la capitalisation des intérêts a été demandée le 9 janvier 1989 ; qu'à cette date il était dû au moins une année d'intérêts ; qu'il y a lieu par suite, conformément à l'article 1154 du code civil, de faire droit à ladite demande ;
Article 1er : La requête de la VILLE D'AIX-EN-PROVENCE est rejetée.
Article 2 : Les intérêts échus le 9 janvier 1989 des sommes duesà Mme X... en exécution de l'article 2 et de l'article 3 du jugement en date du 19 avril 1988 du tribunal administratif de Marseille seront capitalisés à cette date pour produire eux-mêmes intérêts.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à la VILLE D'AIX-EN-PROVENCE, à Mme X... et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : 3 / 5 ssr
Numéro d'arrêt : 99763
Date de la décision : 26/06/1989
Type d'affaire : Administrative

Analyses

COMMUNE - AGENTS COMMUNAUX - CESSATION DE FONCTIONS - LICENCIEMENT - Motif disciplinaire - Faute ne présentant pas un caractère de gravité suffisant pour justifier le licenciement - Erreur manifeste.

RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - REPARATION - EVALUATION DU PREJUDICE - PREJUDICE MATERIEL - PERTE DE REVENUS - PREJUDICE MATERIEL SUBI PAR DES AGENTS PUBLICS - Licenciement illégal - Evaluation du préjudice réellement subi.


Références :

Code civil 1154


Publications
Proposition de citation : CE, 26 jui. 1989, n° 99763
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Labarre
Rapporteur public ?: Lévis

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1989:99763.19890626
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