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12/07/1989 | FRANCE | N°77736

France | France, Conseil d'État, 7 / 9 ssr, 12 juillet 1989, 77736


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 17 avril 1986 et 28 juillet 1986 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour l'OEUVRE GENERALE DE CRAPONNE, dont le siège social est à la mairie de Salon-de-Provence (13300), représentée par son président en exercice et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement en date du 11 mars 1986 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande en décharge des redevances pour l'utilisation de la ressource en eau qui lui ont été réclamées au titre des années 1

982 et 1983 par des avis de versement en date du 29 décembre 1984 émis ...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 17 avril 1986 et 28 juillet 1986 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour l'OEUVRE GENERALE DE CRAPONNE, dont le siège social est à la mairie de Salon-de-Provence (13300), représentée par son président en exercice et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement en date du 11 mars 1986 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande en décharge des redevances pour l'utilisation de la ressource en eau qui lui ont été réclamées au titre des années 1982 et 1983 par des avis de versement en date du 29 décembre 1984 émis par l'agence de bassin Rhône-Méditerranée-Corse ;
2°) lui accorde la décharge des redevances litigieuses ;

Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Querenet X... de Breville, Conseiller d'Etat,
- les observations de la S.C.P. Martin Martinière, Ricard, avocat de l'OEUVRE GENERALE DE CRAPONNE et de la S.C.P. Lyon-Caen, Fabiani, Liard, avocat de l'agence financière de Bassin Rhône-Méditerranée-Corse,
- les conclusions de Mme Hagelsteen, Commissaire du gouvernement ;
Sur le moyen tiré de ce que l'oeuvre requérante est titulaire de droits fondés en titre :

Considérant que les redevances perçues par les agences financières de bassin en application de la loi du 16 décembre 1964 relative au régime et à la répartition des eaux et à la lutte contre la pollution ont le caractère d'un impôt ; que, par suite, si l'association requérante allègue être titulaire de droits fondés en titre sur le cours de la Durance, cette circonstance, à la supposer établie, n'est pas de nature à l'exonérer des redevances litigieuses, qui n'ont pas le caractère de redevances domaniales ;
Sur les moyens tirés de l'illégalité de la délibération en date du 15 septembre 1981 du conseil d'administration de l'Agence financière de bassin Rhône-Méditerranée-Corse :
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 14 de la loi du 16 décembre 1964, l'Agence financière de bassin "établit et perçoit sur les personnes publiques ou privées des redevances, dans la mesure où ces personnes publiques ou privées rendent nécessaire ou utile l'intervention de l'agence et dans la mesure où elles y trouvent leur intérêt ... Un décret en Conseil d'Etat fixera les modalités d'application du présent article" ; que le décret du 14 septembre 1966, qui fixe les règles concernant l'assiette, le taux et les modalités de recouvrement des redevances perçues par les agences de bassin trouve ainsi son fondement dans les dispositions de la loi, dont il n'appartient pas au Conseil d'Etat d'apprécier la conformité à la Constitution ; que l'association requérante ne saurait utilement se prévaloir, pour soutenir que le décret émane d'une autorité incompétente, de ce que le conseil constitutionnel a reconnu le caractère d'imposition de toute nature aux redevances dont il s'agit ;

Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 18 de ce décret dans sa rédaction résultant du décret du 28 octobre 1975 : "I. - Des redevances peuvent être réclamées aux personnes publiques ou privées qui rendent l'intervention de l'agence nécessaire ou utile : soit qu'elles contribuent à la détérioration de la qualité de l'eau ; soit qu'elles effectuent des prélèvements sur la ressource en eau ; soit qu'elles modifient le régime des eaux dans tout ou partie du bassin ..." ;
Considérant qu'il ressort de la combinaison de ces dispositions et de l'ensemble de celles du titre 1er de la loi du 16 décembre 1964 que, dans le but de satisfaire ou de concilier les exigences énumérées à l'article 1er de ladite loi, au nombre desquelles figurent, notamment, les besoins en eau de l'agriculture, ainsi que la conservation et l'écoulement des eaux, les agences financières de bassin ont pour objet de faciliter les actions d'intérêt commun aux bassins et, à ce titre, non seulement de lutter contre la pollution des eaux mais également de veiller à l'équilibre des ressources et des divers besoins en eau dans chaque bassin ou groupe de bassins ; que, dès lors, dans la mesure où elles effectuent des prélèvements sur la ressource en eau ou modifient le régime des eaux dans tout ou partie du bassin, les personnes publiques ou privées rendent nécessaire ou utile l'intervention de l'agence ; que, par suite, l'association syndicale requérante n'est pas fondée à soutenir qu'en tant qu'ils ont prévu l'assujettissement à la redevance des personnes publiques ou privées alors même qu'elles ne contribueraient pas à la détérioration de la qualité de l'eau, les auteurs du décret du 14 septembre 1966 auraient excédé les limites des pouvoirs qu'ils tenaient des dispositions précitées de l'article 14 de la loi du 16 décembre 1964 ;

Considérant, en troisième lieu, qu'il résulte de l'ensemble des dispositions précitées des articles 14 de la loi du 16 décembre 1964 et 18 du décret du 14 septembre 1966 que les prélèvements sur la ressource en eau, alors même qu'ils sont suivis de la restitution après usage de l'eau prélevée et n'entraînent pas de détérioration de la qualité de l'eau rendent l'intervention de l'agence nécessaire ou utile ; qu'ainsi, la délibération du conseil d'administration de l'agence financière de Bassin Rhône-Méditerranée-Corse n° 81-35 du 15 septembre 1981, ne méconnaît pas la portée des dispositions précitées de l'article 18 du décret du 14 septembre 1966 en ce qu'elle institue non seulement une redevance dite "de consommation" assise sur la différence, calculée par application de coefficients forfaitaires établis par nature d'activité, entre le volume d'eau prélevé et celui rejeté après usage mais aussi une redevance dite "de prélèvement" assise sur le volume réel d'eau prélevée sur le milieu naturel ;
Sur le moyen tiré de ce que l' euvre requérante ne serait pas le redevable légal des redevances litigieuses :
Considérant que l'OEUVRE GENERALE DE CRAPONNE, ainsi qu'il résulte d'un décret en Conseil d'Etat au contentieux du 22 avril 1865 et d'un décret du 8 août 1923, pris pour l'application de la loi du 11 juillet 1907 portant réglementation des eaux de la Durance, est personnellement titulaire d'une concession de prise d'eau sur la Durance ; qu'elle n'est donc pas fondée à soutenir que les redevances d'utilisation de la ressource en eau auraient dû être établies au nom des personnes au profit desquelles elle dispose de l'eau qu'elle prélève dans la Durance ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que l'OEUVRE GENERALE DE CRAPONNE, qui ne critique pas le décompte des droits dus, n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande en décharge des redevances pour utilisation de la ressource en eau auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1982 et 1983 par des avis de versement en date du 29 décembre 1984 ;
Article 1er : La requête susvisée de l'OEUVRE GENERALE DE CRAPONNE est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à l'OEUVRE GENERALE DE CRAPONNE, à l'Agence financière de bassin Rhône-Méditerranée-Corse et au ministre délégué auprès du ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et du budget, chargé du budget.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

19-03-05-01 CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOSITIONS LOCALES AINSI QUE TAXES ASSIMILEES ET REDEVANCES - TAXES ASSIMILEES - TAXES SYNDICALES


Références :

. Décret du 22 avril 1865
. Décret du 08 août 1923
. Décret 75-966 du 28 octobre 1975
. Loi du 11 juillet 1907
Décret 66-700 du 14 septembre 1966 art. 18
Loi 64-1245 du 16 décembre 1964 art. 14, art. 1


Publications
Proposition de citation: CE, 12 jui. 1989, n° 77736
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Querenet Onfroy de Breville
Rapporteur public ?: Mme Hagelsteen

Origine de la décision
Formation : 7 / 9 ssr
Date de la décision : 12/07/1989
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 77736
Numéro NOR : CETATEXT000007627544 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;1989-07-12;77736 ?
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