Vu la requête, enregistrée le 22 mars 1985 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour M. Jean-Luc X..., demeurant Copponex à Cruseilles (74350) et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement en date du 22 janvier 1985 par lequel le tribunal administratif de Lyon a sur la requête du ministre de la défense annulé la décision en date du 15 novembre 1983 de la commission régionale de Lyon accordant à M. Jean-Luc X... la dispense de ses obligations du service national ;
2°) rejette le recours du ministre devant le tribunal administratif de Lyon ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du service national ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Rossi, Auditeur,
- les observations de Me Copper-Royer, avocat de M. X...,
- les conclusions de M. Abraham, Commissaire du gouvernement ;
Sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête :
Considérant qu'aux termes du quatrième alinéa de l'article L. 32 du code du service national : "Peuvent également être dispensés des obligations du service national actif les jeunes gens dont l'incorporation aurait, par suite du décès d'un de leurs parents ou beaux-parents ou de l'incapacité de l'un de ceux-ci, pour effet l'arrêt de l'exploitation familiale à caractère agricole, commercial ou artisanal, notamment lorsque les ressources de l'exploitation ne permettraient pas d'en assurer le fonctionnement en l'absence de l'intéressé" ;
Considérant que, pour écarter du bénéfice de ces dispositions M. Jean-Luc X... et annuler la décision en date du 15 novembre 1983 de la commission régionale de Lyon le dispensant des obligations du service national actif en application de l'article précité, les premiers juges ont relevé que celui-ci avait suivi de 1979 à 1983 une formation alternée à Annecy et qu'ainsi, à la date de la décision, l'exploitation agricole familiale continuait à fonctionner en son absence ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la scolarité suivie par M. X... à l'institut rural d'Annecy ne l'empêchait pas de continuer à travailler dans l'exploitation familiale ; qu'il est établi que M. X..., après avoir passé 5 jours et demi en formation à Annecy, revenait à la ferme familiale pour une période de 16 jours ; qu'il n'était ainsi appelé à s'absenter que 83 jours par an de l'exploitation ; que, par suite, dans les circonstances de l'espèce, c'est à tort que les premiers juges se sont fondés sur la circonstance que M. X... était élève de l'institut rural d'Annecy, pour annuler la dispense de service national qui lui avait été accordée ;
Considérant qu'il appartient au Conseil d'Etat saisi par l'effet dévolutif de l'appel d'examiner les autres moyens soulevés par le ministre de la défense dans sa demande au tribunal administratif de Lyon ;
Considérant que contrairement à ce que soutient le ministre de la défense, il ressort des pièces du dossier que M. Clovis X..., père du requérant, ancien déporté, est atteint de graves affections justifiant l'attribution d'un taux d'invalidité de 75 % attesté par un médecin assermenté et n'est, dès lors, plus à même d'assurer la direction de l'exploitation agricole de 24 hectares comprenant 90 têtes de bétail dont 46 génisses ; que la mère du requérant est elle-même malade ; que la circonstance que la direction de l'exploitation ait été confiée à M. Denis X..., frère aîné du requérant, n'est pas de nature à priver cette petite exploitation où vit encore toute la famille du caractère d'exploitation familiale ; qu'il résulte des circonstances susexposées, confirmées par les diverses attestations jointes au dossier, que l'incorporation de M. Jean-Luc X... pourrait avoir pour conséquence l'arrêt de l'exploitation familiale agricole ; qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a annulé la décision de la commission régionale de Lyon le dispensant des obligations du service national actif ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Lyon en date du 22 janvier 1985 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par le ministre de la défense devant le tribunal administratif de Lyon est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. Jean-Luc X... et au ministre de la défense.