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23/10/1989 | FRANCE | N°44844

France | France, Conseil d'État, 8 / 9 ssr, 23 octobre 1989, 44844


Vu la décision en date du 18 juin 1986, par laquelle le Conseil d'Etat, statuant au Contentieux, avant de statuer sur celles des conclusions de la requête présentée pour Mme Albert Z... et M. Jean Z..., qui tendent à la décharge de cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu mises en recouvrement sur M. Albert Z..., décédé, au titre des années 1970, 1971 et 1972, a ordonné une expertise en vue de déterminer si les requérants apportent la preuve que les bénéfices non commerciaux imposés sont exagérés ;
Vu le mémoire, enregistré le 9 février 1989, présenté par

le ministre délégué auprès du ministre d'Etat, ministre de l'économie, des ...

Vu la décision en date du 18 juin 1986, par laquelle le Conseil d'Etat, statuant au Contentieux, avant de statuer sur celles des conclusions de la requête présentée pour Mme Albert Z... et M. Jean Z..., qui tendent à la décharge de cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu mises en recouvrement sur M. Albert Z..., décédé, au titre des années 1970, 1971 et 1972, a ordonné une expertise en vue de déterminer si les requérants apportent la preuve que les bénéfices non commerciaux imposés sont exagérés ;
Vu le mémoire, enregistré le 9 février 1989, présenté par le ministre délégué auprès du ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et du budget, chargé du budget, en réponse à la communication du pourvoi, et tendant à ce que le Conseil d'Etat fixe à, respectivement 604 632 F, 618 836 F et à tout le moins à 228 778 F et 596 145 F et à tout le moins à 236 685 F, les bénéfices non commerciaux imposés au titre des années 1970, 1971 et 1972, alloue les dégrèvements correspondants et rejette le surplus des conclusions de la requête ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le décret du 2 septembre 1988 ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de Mme Dominique Laurent, Maître des requêtes,
- les observations de la S.C.P. Lesourd, Baudin, avocat de Mme veuve Z... et de M. Jean Z..., venant aux droits de M. Albert Z...,
- les conclusions de M. Chahid-Nouraï, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'à la suite de sa décision en date du 18 juin 1986 statuant sur la requête des héritiers de M. Z... qui tendait à la décharge de compléments d'impôt sur le revenu, assignés à celui-ci au titre de 1970, 1971, 1972 et 1973, le Conseil d'Etat demeure saisi, en tant qu'elles concernent 1970, par l'effet dévolutif de l'appel et en tant qu'elles concernent 1971 et 1972 par voie d'évocation après l'annulation du jugement attaqué en tant qu'il les rejetait, des conclusions tendant à la réduction des bénéfices non commerciaux compris dans les revenus imposés desdites années ; que par la décision susvisée, le Conseil d'Etat a, sur ces conclusions, ordonné une expertise en vue de déterminer si les consorts Z... apportent la preuve que les bénéfices non commerciaux imposés sont exagérés ;
En ce qui concerne les recettes de 1970 :
Considérant qu'ainsi que le reconnait le ministre délégué, chargé du budget et que celà résulte de l'expertise, les héritiers de M. Z... démontrent qu'à concurrence de 354 000 F, la réalité de la perception des sommes qui ont été rattachées aux recettes de ce dernier n'est pas établie ; qu'en revanche, il résulte de l'instruction et il n'est d'ailleurs pas contesté, qu'en 1970, M. Z... a perçu une somme de 37 114 F dela société d'habitations à loyer modéré "Les Cités cherbourgeoises" dont il était le notaire ; qu'il a également perçu en espèces, au guichet d'une banque de Saint-Lô pour un total de 466 993 F, le montant de 12 chèques, qu'il avait lui-même établis et dont la cause apparente était le règlement à certains de ses clients de sommes qui leur revenaient ;

Considérant que si les héritiers de M. Z... prétendent que le versement de la société "les Cités Cherbourgeoises" tendait à rembourser à ce dernier des dépenses qu'il avait faites pour le compte de la société, ils fondent cette allégation sur un document qui ne l'établit pas ; en deuxième lieu que, s'ils démontrent que M. Z... a restitué à Mme A..., les 250 000 F portés sur l'un des douze chèques en cause, dont elle était la bénéficiaire, il résulte des documents qu'ils produisent que cette restitution n'est pas antérieure à 1977 ; qu'ainsi, les héritiers de M. Z... n'établissent pas que ce dernier n'aurait perçu cette somme en 1970 que pour le compte de Mme A... et la lui aurait reversée la même année ; qu'enfin, si les héritiers de M. Z... affirment qu'avant d'émettre les autres chèques, il en avait déjà avancé le montant, en espèces, à ses clients et s'ils en déduisent qu'en procédant lui-même à leur encaissement avec l'accord des intéressés, il n'aurait fait que récupérer les fonds avancés, ils n'établissent pas, notamment par les attestations qu'ils produisent, la réalité de ces avances ; qu'ainsi les requérants n'apportent pas la preuve que l'administration a eu tort de comprendre les sommes en question parmi les recettes professionnelles de M. Z... ;
En ce qui concerne les recettes de 1971 et de 1972 :
Considérant que l'administration a estimé à 1 MF, les recettes que M. Z... avait dissimulées au titre de chacune de ces deux années ; que, se conformant aux conclusions de l'expert, le ministre admet qu'elle a, en procédant ainsi, dépassé les limites des présomptions qu'elle pouvait invoquer mais demande que le chiffre de 500 000 F soit retenu pour chacune de ces deux années ; que, cependant, ni l'importance du patrimoine en la possession de M. et Mme Z... au cours de ces deux années, ni le fait que les recettes dont les requérants ont contesté en vain ou renoncé à contester la réintégration au bénéfice imposable au titre de 1970 s'élevaient à 578 023 F ne permettent d'établir l'existence de recettes dissimulées du montant ainsi proposé par le ministre au titre de 1971 et de 1972 ;

Considérant cependant, en premier lieu, que les héritiers de M. Z... ne contestent pas que celui-ci a reçu de la société "les Cités Cherbourgeoises", les sommes de 37 300 F en 1971 et 15 140 F en 1972 ; que s'ils prétendent, par la même argumentation que celle qui est analysée ci-dessus, que ces versements correspondraient à des remboursements faits à M. Z..., ils ne l'établissent pas ;
Considérant, en deuxième lieu, que les héritiers de M. Z... n'apportent pas la preuve que la déclaration de Mme Y... à la police judiciaire, selon laquelle elle avait versé à M. Z... en 1971 pour un acte de donation-partage, des honoraires s'élevant à 22 000 F est erronée ; que le livre-journal ne fait mention que d'un versement de 17 468 F ; que l'administration était donc fondée à réintégrer la différence entre ces deux chiffres, soit 4 332 F ;
Considérant, en troisième lieu, que les requérants ne contestent pas qu'en 1971, M. Z... a retiré de la banque 33 335 F en espèces contre des chèques établis dans les mêmes conditions que celles qui sont analysées ci-dessus ; qu'ils se bornent également à alléguer sans en justifier, que, par ce procédé, M. Z... ne faisait que recouvrer les avances qu'il avait consenties à ses clients ;
Considérant, enfin, qu'il résulte de l'instruction qu'en 1972, M. Z..., ayant établi l'acte constatant la cession d'un immeuble par M. X... à la société d'armement maritime et de transport a reçu de celle-ci un chèque de 2 350 000 F ; qu'il a aussitôt reversé à M. X..., la somme de 2 250 000 F, qui lui restait due ; que les héritiers de M. Z... n'apportent pas la preuve de leur affirmation selon laquelle celui-ci a également reversé la somme de 100 000 F correspondant à la différence entre ces deux chiffres et qui a été à bon droit regardée comme une recette de l'exercice 1972 ;

Considérant que les requérants s'abstiennent de contester les autres recettes identifiées incluses dans les chiffres indiqués, pour les années en cause, par le ministre délégué, chargé du budget ; qu'il y a lieu de ramener à ceux-ci, les recettes rapportées aux bénéfices imposés au titre de 1971 et de 1972 ;
Sur les dépenses professionnelles de M. Z... :
Considérant qu'il résulte de l'instruction que contestant l'authenticité des pièces justificatives, venant à l'appui des mentions de la comptabilité, relatives aux frais de déplacement supportés par M. Z..., l'administration n'a admis ces frais en déduction des bénéfices imposés qu'à concurrence de 20 % ; qu'en se bornant à faire état de la dispersion et de l'éloignement de la clientèle, et en se référant à l'estimation de l'expert qui ne repose que sur une hypothèse, les requérants n'établissent pas que cette proposition est insuffisante et doit être, comme ils le demandent, portée à 80 % ;
Considérant, au total, qu'il y a lieu de ramener à, respectivement, 604 632 F, 228 778 F et 236 685 F les bénéfices non commerciaux de M. Z... imposés au titre de 1970, 1971 et 1972 ;
Considérant que compte tenu de l'état du litige au début de l'expertise et des dégrèvements résultant de ce qui est dit ci-dessus, il sera fait une exacte application de l'article R. 207-1 du livre des procédures fiscales en mettant les frais d'expertise à la charge des héritiers de M. Z... et à celle de l'Etat dans la proportion de, respectivement, 33 % et 67 % ;

Considérant que, dans les circonstances de l'affaire, il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l'article 1er du décret du 2 septembre 1988 ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les héritiers de M. Z... sont fondés à demander la réformation du jugement attaqué en tant qu'il a rejeté la totalité des conclusions de leur demande en décharge relatives au supplément d'impôt assigné au titre de 1970 et en réduction du supplément d'impôt assigné au titre de 1971 et 1972 ;
Article 1er : Les bénéfices non commerciaux à raison desquels M. Z... est imposé au titre de 1970, 1971 et 1972 sont fixés à, respectivement, 604 632 F, 228 778 F et 236 685 F.
Article 2 : Les héritiers de M. Z... sont déchargés de la différence entre les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ce dernier est assujetti dans les rôles de la commune de Périers (Manche) et celles qui sont calculées en application de l'article 1er ci-dessus.
Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de Caen en date du 29 juin 1982 est réformé en ce qu'il a de contraire à la présente décision relativement à l'impôt mis en recouvrement au titrede 1970.
Article 4 : Les frais d'expertise sont mis à la charge des héritiers de M. Z... et de l'Etat dans les proportions de, respectivement, 33 et 67 %.
Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête des héritiers de M. Z..., sur lesquelles il n'a pas été définitivement statué par la décision du Conseil d'Etat statuant au Contentieux, en date du 18 juin 1986 et le surplus des conclusions de la demande au tribunal administratif de Caen, évoquées par la même décision, sont rejetés.
Article 6 : La présente décision sera notifiée aux héritiers de M. Z... et au ministre délégué auprès du ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et du budget, chargé du budget.


Synthèse
Formation : 8 / 9 ssr
Numéro d'arrêt : 44844
Date de la décision : 23/10/1989
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

19-04-01-02 CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOTS SUR LES REVENUS ET BENEFICES - REGLES GENERALES PROPRES AUX DIVERS IMPOTS - IMPOT SUR LE REVENU


Références :

Décret 88-907 du 02 septembre 1988 art. 1

Cf. Mme Robert, 1986-06-18 n° 44844


Publications
Proposition de citation : CE, 23 oct. 1989, n° 44844
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Dominique Laurent
Rapporteur public ?: Chahid-Nouraï

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1989:44844.19891023
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