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24/11/1989 | FRANCE | N°68439

France | France, Conseil d'État, 10/ 5 ssr, 24 novembre 1989, 68439


Vu la requête enregistrée le 7 mai 1985 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par la COMMUNE D'IFFENDIC (Ille-et-Vilaine), représentée par son maire en exercice, dûment habilité à cet effet par délibération du conseil municipal en date du 25 mars 1985, et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1° annule le jugement en date du 7 mars 1985 par lequel le tribunal administratif de Rennes a annulé la délibération du conseil municipal d'Iffendic en date du 21 juin 1984, en tant qu'elle décide l'adhésion de la commune à la société civile immobilière du bo

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Vu la requête enregistrée le 7 mai 1985 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par la COMMUNE D'IFFENDIC (Ille-et-Vilaine), représentée par son maire en exercice, dûment habilité à cet effet par délibération du conseil municipal en date du 25 mars 1985, et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1° annule le jugement en date du 7 mars 1985 par lequel le tribunal administratif de Rennes a annulé la délibération du conseil municipal d'Iffendic en date du 21 juin 1984, en tant qu'elle décide l'adhésion de la commune à la société civile immobilière du boulevard Saint-Michel, la participation de la commune au capital de cette société et la désignation du premier adjoint au maire en qualité de représentant de la commune au sein de ladite société ;
2° rejette le déféré présenté devant le tribunal administratif par le Commissaire de la République de la région Bretagne et du département d'Ille-et-Vilaine,
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la construction et de l'habitation ;
Vu le code des communes ;
Vu la loi n° 82-6 du 7 janvier 1982 ;
Vu la loi n° 82-213 du 2 mars 1982, modifiée par la loi n° 82-623 du 22 juillet 1982 ;
Vu la loi n° 83-597 du 7 juillet 1983 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Richer, Conseiller d'Etat,
- les conclusions de M. Frydman, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article 5 de la loi susvisée du 2 mars 1982 relative aux droits et libertés des communes, des départements et des régions, "l'Etat a la responsabilité de la conduite de la politique économique et sociale, ainsi que de la défense de l'emploi. Néanmoins, sous réserve du respect de la liberté du commerce et de l'industrie, du principe de l'égalité des citoyens devant la loi ainsi que des règles de l'aménagement du territoire définies par la loi approuvant le Plan, la commune peut intervenir en matière économique et sociale dans les conditions prévues au présent article. I. Lorsque son intervention a pour objet de favoriser le développement économique, la commune peut accorder des aides directes et indirectes dans les conditions prévues par la loi approuvant le Plan (...). III. Sont toutefois exclues, sauf autorisation prévue par décret en Conseil d'Etat, toutes participations dans le capital d'une société commerciale et de tout autre organisme à but lucratif n'ayant pas pour objet d'exploiter les services communaux ou des activités d'intérêt général dans les conditions prévues à l'article L. 381-1 du code des communes" ; que cet article, dans sa rédaction issue de l'article 15 de la loi susvisée du 7 juillet 1983, prévoit que "les communes et leurs groupements peuvent (...) acquérir ou recevoir des actions de sociétés d'économie mixte locales" sous réserve qu'elles répondent aux conditions fixées par l'article 1er de ladite loi, c'est à dire, notamment, que la société revête la forme de la société anonyme et que les collectivités publiques y détiennent plus de la moitié du capital et des voix dans les organes délibérants ;

Considérant que par délibération en date du 21 juin 1984, le conseil municipal de la COMMUNE D'IFFENDIC a adopté les modalités du concours que la commune prêterait au projet de réalisation d'un centre commercial ; qu'il a notamment décidé que la commune adhérerait à la société dite "du boulevard Saint-Michel" en cours de constitution, qu'elle paierait sa quote-part de participation à cette société, et qu'elle y serait représentée par le premier adjoint au maire ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, et qu'il n'est d'ailleurs pas contesté, que la société à laquelle la commune se proposait d'adhérer, et dont les statuts devaient être établis conformément aux termes d'un accord conclu entre les futurs associés le 14 juin 1984, présentait les caractéristiques des sociétés constituées en vue de l'attribution d'immeubles aux associés par fractions divises, que visent les dispositions des articles L. 212-1 et suivants du code de la construction et de l'habitation, issues du titre II de la loi n° 71-579 du 16 juillet 1971 ;
Considérant que la société dite du "boulevard Saint-Michel" ne revêtait pas la forme d'une société anonyme et que la commune ne devait y détenir qu'une participation minoritaire ; qu'il suit de là que la participation de la commune d'Iffendic n'a en tout état de cause pas été prise dans les conditions prévues à l'article L. 381-1 du code des communes ;
Considérant, au surplus, que si la société d'attribution constituée pour les besoins de la réalisation du centre commercial n'avait pas pour objet de dégager des bénéfices en argent, elle devait toutefois permettre aux associés de la commune de réaliser sur le coût de la construction des fractions d'immeubles dont ils obtiendraient la propriété ou la jouissance une économie, comme le prévoit d'ailleurs l'article 1832 du code civil ; que dans ces conditions, la société dite du "boulevard Saint-Michel" doit être regardée comme un organisme à but lucratif pour l'application des dispositions susénoncées de l'article 5-III de la loi du 2 mars 1982 ; que la commune d'Iffendic n'aurait dès lors pu prendre une participation dans cette société qu'en vertu d'une autorisation délivrée par décret en Conseil d'Etat, alors même que son intervention ne procédait nullement d'un motif lucratif ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la COMMUNE D'IFFENDIC n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a annulé la délibération du 21 juin 1984 en tant qu'elle décidait l'adhésion de la commune à la société litigieuse, le paiement de la quote-part correspondant à sa participation et la désignation d'un représentant de la commune au sein de la société ;
Article 1er : La requête de la COMMUNE D'IFFENDIC est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la COMMUNE D'IFFENDIC, au Commissaire de la République de la région Bretagne - Commissaire de la République du département d'Ille-et-Vilaine et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : 10/ 5 ssr
Numéro d'arrêt : 68439
Date de la décision : 24/11/1989
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Recours pour excès de pouvoir

Analyses

16-02-01-03-04-05 COMMUNE - ORGANES DE LA COMMUNE - CONSEIL MUNICIPAL - DELIBERATIONS - LEGALITE INTERNE DE LA DELIBERATION - AUTRES DELIBERATIONS -Adhésion à une société constituée en vue de l'attribution d'immeubles aux associés par fractions divises (article L.212-1 et suivants du code de la construction et de l'habitation) - Participation à une société d'économie mixte - Absence - Violation des dispositions de la loi du 2 mars 1982 (article 5) et de l'article L.381-1 du code des communes (loi du 7 juillet 1983).

16-02-01-03-04-05 Délibération par laquelle le conseil municipal de la commune d'Iffendic, définissant les modalités du concours que la commune prêterait au projet de réalisation d'un centre commercial, a décidé que la commune adhérerait à la société dite "du boulevard Saint-Michel" en cours de constitution, qu'elle paierait sa quote-part de participation à cette société, et qu'elle y serait représentée par le premier adjoint au maire. D'une part, la société à laquelle la commune se proposait d'adhérer présentait les caractéristiques des sociétés constituées en vue de l'attribution d'immeubles aux associés par fractions divises, que visent les dispositions des articles L.212-1 et suivants du code de la construction et de l'habitation, issues du titre II de la loi n° 71-579 du 16 juillet 1971, mais ne revêtait pas la forme d'une société anonyme et la commune ne devait y détenir qu'une participation minoritaire. La participation de la commune d'Iffendic n'avait ainsi pas été prise dans les conditions prévues à l'article L.381-1 du code des communes. D'autre part, si la société d'attribution constituée pour les besoins de la réalisation du centre commercial n'avait pas pour objet de dégager des bénéfices en argent, elle devait toutefois permettre aux associés de la commune de réaliser sur le coût de la construction des fractions d'immeubles dont ils obtiendraient la propriété ou la jouissance une économie, comme le prévoit d'ailleurs l'article 1832 du code civil. Dans ces conditions, la société dont s'agit doit être regardée comme un organisme à but lucratif pour l'application des dispositions de l'article 5-III de la loi du 2 mars 1982. La commune d'Iffendic n'aurait dès lors pu prendre une participation dans cette société qu'en vertu d'une autorisation délivrée par décret en Conseil d'Etat, alors même que son intervention ne procédait nullement d'un motif lucratif.


Références :

Code civil 1832
Code de la construction et de l'habitation L212-1 et suivants
Code des communes L381-1
Loi 71-579 du 16 juillet 1971
Loi 82-213 du 02 mars 1982 art. 5
Loi 83-597 du 07 juillet 1983 art. 1, art. 15


Publications
Proposition de citation : CE, 24 nov. 1989, n° 68439
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Combarnous
Rapporteur ?: M. Richer
Rapporteur public ?: M. Frydman

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1989:68439.19891124
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