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15/12/1989 | FRANCE | N°70316

France | France, Conseil d'État, Section, 15 décembre 1989, 70316


Vu, le recours sommaire et le mémoire complémentaire du ministre de l'environnement enregistrés les 9 juillet 1985 et 29 octobre 1985 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat ; le ministre demande que le Conseil d'Etat :
1° annule les jugements, en date du 8 juillet 1983 et du 9 avril 1985, par lesquels le tribunal administratif de Lille a ordonné une expertise, puis a accordé à la société S.P.E.C.H.I.N.O.R., sous certaines réserves et conditions, l'autorisation d'exploiter un atelier de fabrication de chimie fine,
2° rejette la demande tendant à cette autorisation,

présentée par la société S.P.E.C.H.I.N.O.R.,
Vu les autres pièce...

Vu, le recours sommaire et le mémoire complémentaire du ministre de l'environnement enregistrés les 9 juillet 1985 et 29 octobre 1985 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat ; le ministre demande que le Conseil d'Etat :
1° annule les jugements, en date du 8 juillet 1983 et du 9 avril 1985, par lesquels le tribunal administratif de Lille a ordonné une expertise, puis a accordé à la société S.P.E.C.H.I.N.O.R., sous certaines réserves et conditions, l'autorisation d'exploiter un atelier de fabrication de chimie fine,
2° rejette la demande tendant à cette autorisation, présentée par la société S.P.E.C.H.I.N.O.R.,
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu la loi du 19 juillet 1976 et le décret du 21 septembre 1977 ;
Vu le décret n° 77-1141 du 12 octobre 1977 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. du Marais, Auditeur,
- les observations de la S.C.P. Waquet, Farge, avocat de la société S.P.E.C.H.I.N.O.R.,
- les conclusions de M. de la Verpillière, Commissaire du gouvernement ;

Sur la recevabilité des conclusions du recours tendant à l'annulation du jugement du 8 juillet 1983 :
Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article R.192 du code des tribunaux administratifs, "sauf disposition contraire, le délai d'appel est de deux mois. Il court contre toute partie à l'instance à compter du jour où la notification a été faite à cette partie ..." ; que le troisième alinéa du même article, modifié par le décret n° 84-819 du 29 août 1984, qui a été publié le 6 septembre 1984, dispose que "par dérogation aux dispositions du premier alinéa, le délai d'appel contre un jugement avant-dire-droit, qu'il tranche ou non une question au principal, court jusqu'à l'expiration du délai d'appel contre le jugement qui règle définitivement le fond du litige" ; que, toutefois, ces dispositions n'ont pu avoir pour effet d'ouvrir un nouveau délai d'appel à l'encontre des jugements avant-dire droit des tribunaux administratifs devenus définitifs avant leur entrée en vigueur ; qu'il suit de là que le ministre de l'environnement, à qui la notification du jugement susvisé, en date du 8 juillet 1983, a été adressée le 29 juillet 1983, et dont le recours a été enregistré au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 9 juillet 1985, n'était plus recevable à cette date à faire appel dudit jugement ; que la société S.P.E.C.H.I.N.O.R. est dès lors fondée à opposer aux conclusions du pourvoi dirigées contre ce jugement une fin de non-recevoir, et à soutenir que les points de droit qu'il a tranchés, à savoir l'illégalité du refus d'autorisation qui lui a été opposé par le préfet, sont passés en force de chose jugée ;
En ce qui concere le jugement du 9 avril 1985 :

Considérant que lorsqu'il statue en vertu de l'article 14 de la loi du 19 juillet 1976, le juge administratif a le pouvoir d'autoriser la création et le fonctionnement d'une installation classée pour la protection de l'environnement en l'assortissant des conditions qu'il juge indispensables à la protection des intérêts mentionnés à l'article 1er de ladite loi ; qu'il a, en particulier, le pouvoir d'annuler la décision par laquelle l'autorité administrative a refusé l'autorisation sollicitée, et, après avoir, si nécessaire, régularisé ou complété la procédure, d'accorder lui-même cette autorisation aux conditions qu'il fixe, ou le cas échéant, en renvoyant le bénéficiaire devant le préfet pour la fixation desdites conditions ; que toutefois, il résulte de l'article 5 de la loi susvisée que l'autorisation d'une installation classée ne peut être accordée qu'après une enquête publique relative aux incidences éventuelles du projet sur la commodité du voisinage, la santé, la sécurité, la salubrité publique, ainsi que sur l'agriculture, la protection de la nature ou de l'environnement, ou la conservation des sites et des monuments ; que si une telle enquête n'a pas été effectuée ou si elle a été conduite de façon irrégulière, le juge administratif, s'il peut annuler le refus de l'administration d'autoriser l'installation, ne peut accorder lui-même l'autorisation, faute pour le public d'avoir pu être informé et d'avoir pu faire connaître ses observations dans les conditions prévues par la loi ;
Considérant, qu'en l'espèce, l'étude d'impact que la société S.P.E.C.H.I.N.O.R., conformément à l'article 3, 4° du décret du 21 septembre 1977 et à l'article 2 du décret du 12 octobre 1977, avait jointe à sa demande d'autorisation était insuffisante en ce qu'elle n'apportait pas l'ensemble des informations requises par les dispositions de ces articles ; que l'insuffisance de l'étude d'impact accompagnant la demande initiale d'autorisation a été de nature à rendre irrégulière l'enquête publique organisée par le préfet du Pas-de-Calais dès lors que l'information du public n'a, de ce fait, pas été complète ; que, par suite, le secrétaire d'Etat auprès du Premier ministre, chargé de l'environnement est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué en date du 9 avril 1985, le tribunal administratif de Lille a accordé à la société S.P.E.C.H.I.N.O.R., sous certaines réserves et conditions, l'autorisation d'exploiter une installation classée ;
Article 1er : L'article 2 du jugement du 9 avril 1985 du tribunal administratif de Lille est annulé.
Article 2 : La demande d'autorisation présentée par la société S.P.E.C.H.I.N.O.R. au tribunal administratif de Lille et le surplus des conclusions du recours du ministre de l'environnement sont rejetés.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à la société S.P.E.C.H.I.N.O.R. et au secrétaire d'Etat auprès du Premier ministre, chargé de l'environnement.


Sens de l'arrêt : Annulation
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

NATURE ET ENVIRONNEMENT - INSTALLATIONS CLASSEES POUR LA PROTECTION DE L'ENVIRONNEMENT - REGLES DE PROCEDURE CONTENTIEUSE SPECIALES - POUVOIRS DU JUGE - Pouvoir d'autoriser l'installation alors que l'enquête publique préalable a été conduite de façon irrégulière - Absence.

44-02-04-01, 54-07-03 Lorsqu'il statue en vertu de l'article 14 de la loi du 19 juillet 1976, le juge administratif a le pouvoir d'autoriser la création et le fonctionnement d'une installation classée pour la protection de l'environnement en l'assortissant des conditions qu'il juge indispensables à la protection des intérêts mentionnés à l'article 1er de ladite loi. Il a, en particulier, le pouvoir d'annuler la décision par laquelle l'autorité administrative a refusé l'autorisation sollicitée, et, après avoir, si nécessaire, régularisé ou complété la procédure, d'accorder lui-même cette autorisation aux conditions qu'il fixe, ou le cas échéant, en renvoyant le bénéficiaire devant le préfet pour la fixation desdites conditions. Toutefois, il résulte de l'article 5 de la loi susvisée que l'autorisation d'une installation classée ne peut être accordée qu'après une enquête publique relative aux incidences éventuelles du projet sur la commodité du voisinage, la santé, la sécurité, la salubrité publique, ainsi que sur l'agriculture, la protection de la nature ou de l'environnement, ou la conservation des sites et des monuments. Si une telle enquête n'a pas été effectuée ou si elle a été conduite de façon irrégulière, le juge administratif, s'il peut annuler le refus de l'administration d'autoriser l'installation, ne peut accorder lui-même l'autorisation, faute pour le public d'avoir pu être informé et d'avoir pu faire connaître ses observations dans les conditions prévues par la loi.

PROCEDURE - POUVOIRS ET DEVOIRS DU JUGE - POUVOIRS DU JUGE DE PLEIN CONTENTIEUX - Installations classées - Pouvoir d'autoriser l'installation alors que l'enquête publique préalable a été conduite de façon irrégulière - Absence.


Références :

Code des tribunaux administratifs R192 al. 1, al. 3
Décret 77-1133 du 21 septembre 1977 art. 3 par. 4
Décret 77-1141 du 12 octobre 1977 art. 2
Décret 84-819 du 29 août 1984
Loi 76-663 du 19 juillet 1976 art. 1, art. 5, art. 14


Publications
Proposition de citation: CE, 15 déc. 1989, n° 70316
Publié au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : M. Combarnous
Rapporteur ?: M. du Marais
Rapporteur public ?: M. de La Verpillière
Avocat(s) : S.C.P. Waquet, Farge, Avocat

Origine de la décision
Formation : Section
Date de la décision : 15/12/1989
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 70316
Numéro NOR : CETATEXT000007732037 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;1989-12-15;70316 ?
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