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29/12/1989 | FRANCE | N°60769

France | France, Conseil d'État, 3 / 5 ssr, 29 décembre 1989, 60769


Vu 1°), sous le n° 60 769, la requête, enregistrée le 13 juillet 1984 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour la SOCIETE ANONYME ETABLISSEMENTS ARIZZOLI, BERNARD ET PERRE (ABP, dont le siège est ... ; la société demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement, en date du 30 mai 1984, par lequel le tribunal administratif de Poitiers l'a condamnée à payer à la ville de Poitiers, d'une part, solidairement avec la SOCIETE MONTENAY et le BUREAU D'ETUDES POUR L'URBANISME ET L'EQUIPEMENT (BETURE), une somme 175 887 F augmentée de frais d'expertise d'u

n montant de 11 870,60 F, d'autre part, solidairement avec la SOC...

Vu 1°), sous le n° 60 769, la requête, enregistrée le 13 juillet 1984 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour la SOCIETE ANONYME ETABLISSEMENTS ARIZZOLI, BERNARD ET PERRE (ABP, dont le siège est ... ; la société demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement, en date du 30 mai 1984, par lequel le tribunal administratif de Poitiers l'a condamnée à payer à la ville de Poitiers, d'une part, solidairement avec la SOCIETE MONTENAY et le BUREAU D'ETUDES POUR L'URBANISME ET L'EQUIPEMENT (BETURE), une somme 175 887 F augmentée de frais d'expertise d'un montant de 11 870,60 F, d'autre part, solidairement avec la SOCIETE MONTENAY, une somme de 129 712 F, le tout avec les intérêts au taux légal à compter du 18 mai 1981, en réparation des désordres affectant la chaufferie de la zone à urbaniser en priorité des Couronneries à Poitiers,
2°) rejette la demande présentée par la ville de Poitiers devant le tribunal administratif de Poitiers,
3°) à titre subsidiaire, condamne la SOCIETE MONTENAY et le BUREAU D'ETUDES POUR L'URBANISME ET L'EQUIPEMENT à la garantir des condamnations prononcées à son encontre ;
Vu 2°), sous le 61 329, la requête, enregistrée au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 31 juillet 1984, présentée pour la SOCIETE ANONYME BUREAU D'ETUDES TECHNIQUES POUR L'URBANISME ET L'EQUIPEMENT (BETURE) dont le siège est, rue Montmousseau, ville nouvelle de Saint-Quentin en Yvelines à Trappes (78190) ; la société demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement, en date du 30 mai 1984 en tant que par celui-ci le tribunal administratif de Poitiers l'a condamnée, solidairement avec la SOCIETE MONTENAY et la SOCIETE ANONYME ETABLISSEMENTS ARIZZOLI, BERNARD ET PERRE (ABP) à payer à la ville de Poitiers la somme de 575 867 F avec intérêts au taux légal à compter du 18 mai 1981 en réparation des désordres affectant la chaufferie de la zone à urbaniser en priorité de Couronnerie et à supporter les frais d'expertise s'élevant à 11 870 60 F,
2°) rejette la demande présentée par la ville de Poitiers devant le tribunal administratif de Poitiers,
Vu 3°), sous le n° 61 399, la requête enregistrée au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 1er août 1984 et le mémoire complémentaire, enregistré le 13 novembre 1984, présentés pour la SOCIETE ANONYME MONTENAY dont le siège est ... ; la société demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement susanalysé du tribunal administratif de Poitiers en date du 30 mai 1984,
2°) rejette la demande présentée par la ville de Poitiers devant le tribunal administratif de Poitiers,
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu la loi du 28 pluviôse an VIII ;
Vu le code es tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;

Après avoir entendu :
- le rapport de M. Pochard, Maître des requêtes,
- les observations de Me Cossa, avocat de la SOCIETE ANONYME ETABLISSEMENTS ARIZZOLI, BERNARD ET PERRE (ABP), de la SCP Defrénois, Lévis, avocat de la SOCIETE ANONYME MONTENAY, de Me Blanc, avocat de la SOCIETE BUREAU D'ETUDES TECHNIQUES POUR L'URBANISME ET L'EQUIPEMENT et de Me le Griel, avocat de la ville de Poitiers,
- les conclusions de M. de Guillenchmidt, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que les requêtes de la SOCIETE ANONYME ETABLISSEMENTS ARIZZOLI BERNARD PERRE, de la SOCIETE ANONYME MONTENAY et du BUREAU D'ETUDES TECHNIQUES POUR L'URBANISME ET L'EQUIPEMENT, sont relatives à un même marché ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;
En ce qui concerne la requête de la SOCIETE DES ETABLISSEMENTS MONTENAY :
Considérant qu'il résulte de l'article 6 du marché passé entre la SOCIETE ANONYME ETABLISSEMENTS ARIZZOLI BERNARD PERRE et la société des entrepôts et combustibles de l'Ouest, d'une part, et la société d'équipement du département de la Vienne agissant pour le compte de la ville de Poitiers, d'autre part, en vue de l'aménagement et de l'exploitation de l'installation de chauffage collectif de la zone à urbaniser en priorité dite "des Couronneries" ; que la responsabilité de la société des entrepôts et des combustibles de l'Ouest, à qui incombait l'exploitation de l'installation à compter de sa mise en service, n'était solidairement engagée avec celle qu'encourait éventuellement, vis-à-vis du maître de l'ouvrage et à raison de l'exécution des travaux, la SOCIETE ANONYME ETABLISSEMENTS ARIZZOLI BERNARD PERRE, à qui incombait cette exécution, que jusqu'à la réception définitive ; que, par suite, la SOCIETE ANONYME MONTENAY, qui a succédé à la société des entrepôts et combustibles de l'Ouest, est fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué le tribunal administratif de Poitiers l'a déclarée solidaire des condamnations qui ont été prononcées contre la SOCIETE ANONYME ETABLISSEMENTS ARIZZOLI BERNARD PERRE sur le fondement des principes dont s'inspirent les articles 1792 et 2270 du code civil ;
En ce qui concerne les requêtes de la SOCIETE ANONYME ETABLISSEMENTS ARIZZOLI BERNARD PERRE et du BUREAU D'ETUDES TECHNIQUES POUR L'URBANISME ET L'EQUIPEMENT, :
Sur le moyen tiré de ce que le tribunal administratif aurait été saisi après l'expiration du délai de mise en jeu de la responsabilité décennale :

Considérant qu'il résulte des stipulations de l'article 4-7ème du marché passé, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, par la société d'équipement du département de la Vienne, seules applicables en l'espèce à l'exclusion notamment du cahier des prescriptions communes annexés au décret du 20 octobre 1962, lequel n'est obligatoire que pour les marchés de l'Etat et des établissements publics nationaux, que le point de départ du délai de mise en jeu de la responsabilité décennale est fixé à la date de la réception définitive ; qu'eu égard à l'existence de cette clause contractuelle, la circonstance que la prise de possession de l'ouvrage par la ville de Poitiers était antérieure à la réception définitive est sans influence sur le point de départ du délai de mise en jeu de la garantie décennale ; que la réception définitive des travaux de génie civil, au titre desquels la responsabilité des constructeurs est recherchée, a été prononcée le 28 octobre 1971 ; qu'ainsi le délai n'était pas expiré lorsque la ville de Poitiers a saisi le tribunal administratif le 18 mai 1981 ;
Sur la responsabilité des désordres affectant les voies de circulation intérieure de la chaufferie :
Considérant d'une part qu'il résulte de l'instruction et notamment du rapport de l'expert désigné par le tribunal administratif, que les désordres affectant les voies de circulation intérieure, lesquels consistent en un affaissement desdites voies, sont appelés à s'aggraver, selon l'expert, de façon inéluctable et dans des proportions importantes ; qu'ainsi ces désordres rendent à terme l'ouvrage impropre à sa destination ;

Considérant, d'autre part, que ces désordres trouvent, ainsi que l'affirme notamment l'expert, leur origine dans un tassement des remblais imputable tant à la conception de l'ouvrage qu'à l'exécution et à la surveillance des travaux ; qu'ainsi c'est à bon droit que le tribunal, dont le jugement est suffisamment motivé sur ce point, a estimé que ces désordres, dont il ne résulte pas de l'instruction qu'ils auraient été aggravés par un défaut de surveillance imputable au maître de l'ouvrage, engagent, sur le fondement des principes dont s'inspirent les articles 1792 et 2270 du code civil, la responsabilité de la SOCIETE ANONYME ETABLISSEMENTS ARIZZOLI BERNARD PERRE et du BUREAU D'ETUDES TECHNIQUES POUR L'URBANISME ET L'EQUIPEMENT, lequel a été désigné comme maître d' euvre par un contrat en date du 27 novembre 1964 et a signé, en cette qualité, le procès-verbal de réception définitive des travaux de génie civil ;
Sur la responsabilité des désordres affectant les canalisations d'évacuation des eaux pluviales :
Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment du rapport d'expertise, que les désordres affectant les canalisations d'évacuation des eaux pluviales sont imputables, notamment, à l'exécution des travaux ; qu'ainsi, et alors même qu'il n'aurait pas relevé de fautes à l'encontre de la SOCIETE ANONYME ETABLISSEMENTS ARIZZOLI BERNARD PERRE, c'est à bon droit que le tribunal a estimé que ces désordres, dont il ne résulte pas non plus de l'instruction qu'ils auraient été aggravés par un défaut de surveillance imputable au maître de l'ouvrage, engagent la responsabilité de cette société ;
Sur le montant de la réparation :

Considérant que s'il ne résulte pas de l'instruction que les réparations préconisées par l'expert apportent une plus value à l'ouvrage, il y a lieu en revanche, eu égard à la date à laquelle se sont manifestés les désordres, d'appliquer, sur le montant de la remise en état, un abattement de 35 % et, par suite, de ramener de 575 887 F à 374 327 F le montant de la condamnation mise à la charge de la SOCIETE ANONYME ETABLISSEMENTS ARIZZOLI BERNARD PERRE et du BUREAU D'ETUDES TECHNIQUES POUR L'URBANISME ET L'ENVIRONNEMENT par l'article 1er du jugement attaqué et de 129 712 F à 84 313 F le montant de la condamnation mise à la charge de la SOCIETE ANONYME ETABLISSEMENTS ARIZZOLI BERNARD PERRE par l'article 2 de ce jugement ; que ledit jugement attaqué doit être réformé sur ces points ;
Sur les conclusions de la SOCIETE ANONYME ETABLISSEMENTS ARIZZOLI BERNARD PERRE tendant à être garantie par les autres constructeurs :
Considérant que les conclusions de la SOCIETE ANONYME ETABLISSEMENTS ARIZZOLI BERNARD PERRE tendant à être garantie par les autres constructeurs sont nouvelles en appel et par suite irrecevables ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Poitiers, en date du 30 mai 1984, est annulé en tant qu'il a condamnéla SOCIETE ANONYME MONTENAY, solidairement avec la SOCIETE ANONYME ETABLISSEMENTS ARIZZOLI BERNARD PERRE, à réparer les désordres affectant l'installation de chauffage de la zone à urbaniser en priorité dite "des Couronneries" et à supporter les frais d'expertise.
Article 2 : La demande présentée par la ville de Poitiers devantle tribunal administratif de Poitiers est rejetée en tant qu'elle est dirigée contre la SOCIETE ANONYME MONTENAY.
Article 3 : La somme que la SOCIETE ANONYME ETABLISSEMENTS ARIZZOLI BERNARD PERRE et le BUREAU D'ETUDES TECHNIQUES POUR L'URBANISME ET L'EQUIPEMENT, ont été solidairement condamnés à verserà la ville de Poitiers par l'article 1er du jugement attaqué est ramenée de 575 887 F à 374 327 F.
Article 4 : La somme que la SOCIETE ANONYME ETABLISSEMENTS ARIZZOLI BERNARD PERRE a été condamnée à verser à la ville de par l'article 2 du jugement attaqué est ramenée de 129 712 Fà 84 313 F.
Article 5 : Le jugement du tribunal administratif de Poitiers, en date du 30 mai 1984, est réformé en ce qu'il a de contraire à la présente décision.
Article 6 : Le surplus des conclusions des requêtes de la SOCIETE ANONYME ETABLISSEMENTS ARIZZOLI BERNARD PERRE et du BUREAU D'ETUDES TECHNIQUES POUR L'URBANISME ET L'EQUIPEMENT, est rejeté.
Article 7 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE ANONYME ETABLISSEMENTS ARIZZOLI BERNARD PERRE, à la SOCIETE ANONYMEMONTENAY, au BUREAU D'ETUDES TECHNIQUES POUR L'URBANISME ET L'EQUIPEMENT, à la ville de Poitiers et au ministre de l'intérieur.


Type d'affaire : Administrative

Analyses

MARCHES ET CONTRATS ADMINISTRATIFS - RAPPORTS ENTRE L'ARCHITECTE - L'ENTREPRENEUR ET LE MAITRE DE L'OUVRAGE - RESPONSABILITE DES CONSTRUCTEURS A L'EGARD DU MAITRE DE L'OUVRAGE - RESPONSABILITE DECENNALE - CHAMP D'APPLICATION - Société chargée de l'exploitation de l'ouvrage - Impossibilité d'engager sa responsabilité décennale.

MARCHES ET CONTRATS ADMINISTRATIFS - RAPPORTS ENTRE L'ARCHITECTE - L'ENTREPRENEUR ET LE MAITRE DE L'OUVRAGE - RESPONSABILITE DES CONSTRUCTEURS A L'EGARD DU MAITRE DE L'OUVRAGE - RESPONSABILITE DECENNALE - DELAI DE MISE EN JEU - POINT DE DEPART DU DELAI - Application des dispositions contractuelles - Date de la réception définitive des travaux même en cas de prise de possession antérieure - Délai non expiré.

MARCHES ET CONTRATS ADMINISTRATIFS - RAPPORTS ENTRE L'ARCHITECTE - L'ENTREPRENEUR ET LE MAITRE DE L'OUVRAGE - RESPONSABILITE DES CONSTRUCTEURS A L'EGARD DU MAITRE DE L'OUVRAGE - RESPONSABILITE DECENNALE - DESORDRES DE NATURE A ENGAGER LA RESPONSABILITE DECENNALE DES CONSTRUCTEURS - ONT CE CARACTERE - Désordres rendant les ouvrages impropres à leur destination.


Références :

Code civil 1792, 2270
Décret 62-1279 du 20 octobre 1962


Publications
Proposition de citation: CE, 29 déc. 1989, n° 60769
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Pochard
Rapporteur public ?: de Guillenchmidt

Origine de la décision
Formation : 3 / 5 ssr
Date de la décision : 29/12/1989
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 60769
Numéro NOR : CETATEXT000007734382 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;1989-12-29;60769 ?
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