La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

17/01/1990 | FRANCE | N°78289

France | France, Conseil d'État, 10/ 8 ssr, 17 janvier 1990, 78289


Vu la requête enregistrée le 7 mai 1986 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour la société à responsabilité limitée "ETABLISSEMENTS BOENNEC", dont le siège est à Ster-Vad à Pont-l'Abbe (29120), et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du 2 avril 1986 par lequel le tribunal administratif de Rennes a joint et rejeté ses demandes dirigées contre d'une part la décision du 9 septembre 1985 par laquelle le président du conseil général du Finistère a attribué un lot sur le terre-plein du port de Quimper-Corniguel à la société

"Algues Bretagne Atlantique", et d'autre part la décision du 11 septembre 1...

Vu la requête enregistrée le 7 mai 1986 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour la société à responsabilité limitée "ETABLISSEMENTS BOENNEC", dont le siège est à Ster-Vad à Pont-l'Abbe (29120), et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du 2 avril 1986 par lequel le tribunal administratif de Rennes a joint et rejeté ses demandes dirigées contre d'une part la décision du 9 septembre 1985 par laquelle le président du conseil général du Finistère a attribué un lot sur le terre-plein du port de Quimper-Corniguel à la société "Algues Bretagne Atlantique", et d'autre part la décision du 11 septembre 1985 par laquelle la même autorité lui a refusé l'attribution du même lot,
2°) annule lesdites décisions,
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi du 24 juillet 1966 sur les sociétés commerciales, notamment son article 5 ;
Vu la loi du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public, notamment son article 1er ;
Vu la loi du 22 juillet 1983 complétant la loi du 7 janvier 1983 relative à la répartition des compétences entre les communes, les départements, les régions et l'Etat, notamment son article 6 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de Mlle Pineau, Auditeur,
- les observations de la S.C.P. Le Bret, de Lanouvelle, avocat de la société à responsabilité limitée ETABLISSEMENTS J. BOENNEC et de Me Odent, avocat de la société Algues Bretagne Atlantique (A.B.A.),
- les conclusions de Mme Leroy, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que, par un jugement du 2 avril 1986, le tribunal administratif de Rennes a joint et rejeté les demandes présentées par la société à responsabilité limitée "ETABLISSEMENTS BOENNEC" et dirigées contre, d'une part, la décision du 9 septembre 1985 par laquelle le président du conseil général du Finistère a autorisé la société "Algues Bretagne Atlantique" à occuper un lot sur le terre-plein du port de Quimper-Corniguel, et, d'autre part, la décision du 11 septembre 1985 par laquelle la même autorité a rejeté la demande des "ETABLISSEMENTS BOENNEC" tendant à l'attribution du même lot ;
Sur les moyens tirés de ce que la société "Algues Bretagne Atlantique" n'était pas encore constituée lorsque l'autorisation domaniale litigieuse a été demandée et n'était pas immatriculée au registre du commerce lorsque cette autorisation a été accordée :
Considérant que l'article 5 de la loi du 24 juillet 1966 sur les sociétés commerciales dispose que : "les sociétés commerciales jouissent de la personnalité morale à dater de leur immatriculation au registre du commerce ... Les personnes qui ont agi au nom d'une société en formation avant qu'elle ait acquis la jouissance de la personnalité morale sont tenues solidairement et indéfiniment des actes ainsi accomplis, à moins que la société, après avoir été régulièrement constituée et immatriculée, ne reprenne les engagements souscrits. Ces engagements sont alors réputés avoir été souscrits dès l'origine par la société" ;
Considérant qu'il résulte de ces dispositions, d'une part, que l'autorisation d'occuper une parcelle domaniale a pu être valablement demandée par M. X... agissant au nom de la société A.B.A. en cours de formation en vue de l'exercice des futures activités de cette société et, d'autre part, que le président du Conseil général a pu légalement accorder l'autorisation à une société qui n'avait pas encore été immatriculée au registre du commerce ; qu'ainsi les moyens soulevés par la société "ETABLISSEMENTS J. BOENNEC" ne sauraient être accueillis ;
Sur le moyen tiré de ce que le président du conseil général aurait dû statuer par une seule décision sur la demande présentée par les formateurs de la société "Algues Bretagne Atlantique" et par la société des "ETABLISSEMENTS J. BOENNEC :

Considérant que, saisi de deux demandes différentes présentées pour le compte de personnes distinctes, le président du conseil général du Finistère n'était pas tenu de statuer par une seule décision sur ces demandes, alors même qu'elles avaient le même objet et avaient été instruites conjointement ;
Sur le défaut de motivation de la décision du 11 septembre 1985 :
Considérant qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public dispose : "Doivent être motivées les décisions qui ... refusent un avantage dont l'attribution constitue un droit pour les personnes qui remplissent les conditions légales pour les obtenir" ;
Considérant que l'autorisation d'occuper une dépendance du domaine public n'est pas un avantage dont l'attribution constitue un droit au sens des dispositions précitées de la loi du 11 juillet 1979 ; que, dès lors, le président du conseil général du Finistère n'était pas tenu de motiver son refus d'accueillir la demande présentée par la société des "ETABLISSEMENTS J. BOENNEC" ;
Sur les motifs du choix opéré par le président du conseil général :
Considérant qu'il appartient à l'autorité chargée du domaine public de délivrer des autorisations d'occupation en considération tant de l'intérêt général que de l'intérêt dudit domaine ; que ni le principe de la loyauté de la concurrence, ni le respect des règles applicables aux installations classées ne sauraient faire obstacle à l'exercice de ces pouvoirs de gestion ; que, par suite, les moyens tirés, d'une part, de ce que la société "Algues Bretagne Atlantique" aurait été constituée par d'anciens salariés des "ETABLISSEMENTS BOENNEC" pour la concurrencer de façon déloyale et, d'autre part, de ce que son projet ne respecterait pas la législation sur les installations classées sont inopérants ;

Considérant qu'il résulte des pièces du dossier que les décisions attaquées n'ont pas été prises en considération de l'antériorité de la demande de la société "Algues Bretagne Atlantique" sur celles des "ETABLISSEMENTS BOENNEC" ; que le moyen tiré de ce que le président du conseil général se serait cru lié par cette antériorité doit donc être écarté ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le projet de la société "Algues Bretagne Atlantique", tendant à l'installation sur le terre-plein du port de Quimper-Corniguel d'une usine de traitement du maërl approvisionné par voie maritime, reposait sur une technique éprouvée et bénéficiait d'engagements financiers précis ; qu'en outre, il apportait au port un complément de trafic maritime utile ; qu'en lui donnant la préférence pour ces raisons, le président du conseil général ne s'est donc pas fondé sur un motif erroné et n'a méconnu ni l'intérêt général ni l'intérêt du domaine public maritime ; qu'ainsi et nonobstant, d'une part, le fait que la société venait de se constituer et, d'autre part, l'avis contraire du conseil portuaire, le président du conseil général n'a pas excédé ses pouvoirs en prenant les décisions attaquées ;
Sur le moyen tiré de ce que la société "Algues Bretagne Atlantique" ne respecterait pas les conditions de l'autorisation qui lui a été accordée :
Considérant que la violation alléguée des conditions de l'autorisation d'occupation est sans effet sur la légalité de cette décision ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société à responsabilité limitée "ETABLISSEMENTS BOENNEC" n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté ses demandes ;
Article 1er : La requête de la société à responsabilité limitée "ETABLISSEMENTS BOENNEC" est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la société à responsabilité limitée "ETABLISSEMENTS BOENNEC", à la société "AlguesBretagne Atlantique", au président du conseil général du Finistère et au ministre de l'équipement, du logement, des transports et de la mer.


Synthèse
Formation : 10/ 8 ssr
Numéro d'arrêt : 78289
Date de la décision : 17/01/1990
Type d'affaire : Administrative

Analyses

ACTES LEGISLATIFS ET ADMINISTRATIFS - VALIDITE DES ACTES ADMINISTRATIFS - FORME - QUESTIONS GENERALES - MOTIVATION - MOTIVATION OBLIGATOIRE - MOTIVATION OBLIGATOIRE EN VERTU DES ARTICLES 1 ET 2 DE LA LOI DU 11 JUILLET 1979 - DECISION REFUSANT UN AVANTAGE DONT L'ATTRIBUTION CONSTITUE UN DROIT - Absence - Refus d'autorisation d'occuper une dépendance du domaine public.

COMMERCE - INDUSTRIE - INTERVENTION ECONOMIQUE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - ORGANISATION PROFESSIONNELLE DES ACTIVITES ECONOMIQUES - DIVERS - Registre du commerce - Société en formation.

DOMAINE - DOMAINE PUBLIC - REGIME - OCCUPATION - UTILISATIONS PRIVATIVES DU DOMAINE - AUTORISATIONS UNILATERALES - Autorisation d'occupation du domaine public portuaire départemental - (1) Pouvoirs du président du conseil général (2) motivation du refus d'autorisation - Obligation - Absence.

PORTS - UTILISATION DES PORTS - Utilisation privative du domaine public portuaire - Autorisation d'occupation - Motifs - Intérêt général et intérêt du domaine public.


Références :

Loi 66-537 du 24 juillet 1966 art. 5
Loi 79-587 du 11 juillet 1979 art. 1


Publications
Proposition de citation : CE, 17 jan. 1990, n° 78289
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mlle Pineau
Rapporteur public ?: Mme Leroy

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1990:78289.19900117
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award