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26/01/1990 | FRANCE | N°74051

France | France, Conseil d'État, 1 ss, 26 janvier 1990, 74051


Vu, 1) sous le n° 74 051, la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 11 décembre 1985 et 11 avril 1986 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. X..., demeurant au lieudit "les Carayols", Viviers-en-Montagne (81290), et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1°) annule l'article 2 du jugement du 23 septembre 1985 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a annulé, à la demande d'aménagement foncier du Tarn en date du 9 février 1984 en tant qu'elle concerne le compte 387 appartenant à ce propriétaire ;
2°) rejette la

demande présentée par M. Jacques Y... devant le tribunal administratif...

Vu, 1) sous le n° 74 051, la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 11 décembre 1985 et 11 avril 1986 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. X..., demeurant au lieudit "les Carayols", Viviers-en-Montagne (81290), et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1°) annule l'article 2 du jugement du 23 septembre 1985 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a annulé, à la demande d'aménagement foncier du Tarn en date du 9 février 1984 en tant qu'elle concerne le compte 387 appartenant à ce propriétaire ;
2°) rejette la demande présentée par M. Jacques Y... devant le tribunal administratif de Toulouse,
Vu, 2) sous le n° 74 088, le recours enregistré le 13 décembre 1985 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le MINISTRE DE L'AGRICULTURE, et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1°) annule l'article 2 du jugement du 23 septembre 1985 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a annulé, à la demande de M. Jacques Y..., la décision de la commission d'aménagement foncier du Tarn en date du 9 février 1984 en tant qu'elle concerne le compte 387 appartenant audit M. Jacques Y... ;
2°) rejette la demande présentée par M. Jacques Y... devant le tribunal administratif de Toulouse,
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu le code rural ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. de Bellescize, Conseiller d'Etat,
- les observations de Me Ryziger, avocat de M. X...,
- les conclusions de Mme de Clausade, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que la requête de M. X... et le recours du MINISTRE DE L'AGRICULTURE sont dirigés contre le même jugement ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;
Sur la requête n° 74 051 de M. X... :
Considérant que la personne qui, devant le tribunal administratif, est régulièrement intervenue, soit à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, soit pour demander le rejet d'un tel recours, n'est recevable à interjeter appel du jugement rendu sur ce recours contrairement aux conclusions de son intervention que si elle aurait eu qualité soit pour introduire elle- même le recours, soit, à défaut d'intervention de sa part, pour former tierce-opposition contre le jugement faisant droit au recours ;
Considérant que, par un jugement en date du 23 septembre 1985, le tribunal administratif de Toulouse a annulé, à la demande de M. Jacques Y..., une décision de la commission départementale d'aménagement foncier du Tarn du 9 février 1984 en tant que cette décision concernait le compte n° 387 des biens appartenant à M. Y... ; que 'il ressort des motifs de ce jugement, qui sont le support nécessaire du dispositif, que le tribunal s'est fondé sur la circonstance que, en n'invitant pas M. Jacques Y... à désigner le centre de son exploitation et en situant d'office ledit centre au centre d'exploitation des parents de l'intéressé, la commission départementale avait entaché sa décision d'illégalité, cette circonstance, alors même que M. X... avait reçu de la commission départementale la parcelle apportée par M. Jacques Y..., n'a pas eu pour effet de lui donner qualité pour contester le jugement attaqué qui ne le concerne pas ; que, par suite, M. X..., qui n'aurait pas été recevable à former une tierce opposition s'il n'était pas intervenu devant le tribunal administratif, n'a pas non plus qualité pour faire appel ;
Sur le recours n° 74 088 du MINISTRE DE L'AGRICULTURE :

Considérant qu'aux termes de l'article 19 du code rural : "Le remembrement, applicable aux propriétés rurales non bâties, se fait au moyen d'une nouvelle distribution des parcelles morcelées et dispersées. Il a principalement pour but, par la constitution d'exploitations rurales d'un seul tenant ou à grandes parcelles bien groupées, d'améliorer l'exploitation agricole des biens qui y sont soumis .... Sauf accord des propriétaires et exploitants intéressés, le nouveau lotissement ne peut allonger la distance moyenne des terres au centre d'exploitation principal, si ce n'est dans la mesure nécessaire au regroupement parcellaire" ;
Considérant qu'il résulte des termes mêmes de ces dispositions qu'elles ont un but essentiellement économique et que c'est uniquement en vue d'assurer une meilleure exploitation des terres qu'elles prescrivent leur regroupement et leur rapprochement des bâtiments d'exploitation ; qu'il s'ensuit que, pour l'application des dispositions susreproduites, doivent être regardés comme "bâtiments d'exploitation" les bâtiments qui, pouvant être affectés au logement du personnel et pouvant abriter le cheptel et le matériel, sont de nature à être appelés de ce fait à la desserte des terres, même si pour une cause quelconque cette desserte se trouve momentanément interrompue, et que c'est seulement si cette desserte doit être regardée comme définitivement abandonnée que le rapprochement desdites terres peut être opéré avec d'autres bâtiments ; qu'il appartient aux commissions communales et départementales de remembrement de se livrer à cette appréciation sous le contrôle du juge d'après l'ensemble des circonstances de l'affaire et compte tenu notamment des intentions manifestées par le propriétaire de l'exploitation rurale dont s'agit en ce qui concerne le maintien, la reprise ou l'abandon de la desserte de ses terres par les bâtiments dont il dispose ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. Jacques Y... a informé la commission départementale qu'il souhaitait conserver la parcelle qu'il avait apportée au remembrement et sur laquelle il envisageait de construire une maison d'habitation et d'entreprendre un élevage hors sol de gibier ; qu'en outre, il indiquait qu'il était locataire de terres situées à proximité et sur lesquelles des bâtiments étaient édifiés ; qu'il résulte de ce qui précède que la commission départementale était suffisamment informée des intentions de M. Jacques Y... en ce qui concerne le centre d'exploitation qu'il entendait désigner ; que, par suite, c'est à tort que le tribunal administratif s'est fondé sur la circonstance que la commission "n'a pas invité l'intéressé à désigner le centre de son exploitation" et qu'elle a ainsi "méconnu les dispositions de l'article 19 du code rural en situant d'office le centre d'exploitation de l'intéressé au centre d'exploitation de ses parents et en déplaçant les parcelles attribuées pour les rapprocher dudit centre" pour annuler la décision de la commission départementale d'aménagement du Tarn en date du 9 février 1984 en tant qu'elle concerne le compte 387 des biens appartenant à M. Jacques Y... ;
Considérant, toutefois, qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. Jacques Y... devant le tribunal administratif de Toulouse ;
Considérant, d'une part, qu'il ressort des pièces du dossier qu'il n'existait pas de bâtiments sur l'unique parcelle dont M. Jacques Y... était propriétaire ; que si l'intéressé était locataire de 12 hectares 65 ares de terres situées à proximité de cette parcelle d'apport, les bâtiments existant sur ces terres n'offraient pas, en raison de leur état de vétusté, les qualités techniques requises pour constituer un centre d'exploitation ; que, dans ces conditions, la commission départementale a pu à bon droit, en application des dispositions précitées de l'article 19 du code rural, rapprocher l'apport de M. Jacques Y... du centre d'exploitation de ses parents, qui constituait en fait son propre centre d'exploitation à la date à laquelle la commission a statué ;

Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 4 du code rural, la commission départementale d'aménagement foncier "a qualité pour modifier le remembrement ou pour en provoquer la modification ainsi que pour fixer l'ordre dans lequel les travaux de remembrement seront effectués dans la commune" ; qu'il résulte de ces dispositions qu'en raison des pouvoirs ainsi conférés à la commission départementale, ses décisions se substituent à celles de la commission communale critiquées devant elle ; que, par suite, les vices dont seraient entachées les délibérations ou les décisions de cette commission sont sans influence sur la légalité de la décision de la commission départementale ;
Considérant, enfin, que la circonstance que M. Jacques Y... n'habite plus chez ses parents, celle que des travaux entrepris dans le cadre du remembrement ne reçoivent pas son accord et celle que le remembrement a été effectué sur des terrains qui seraient ultérieurement urbanisables sont sans influence sur la légalité de la décision de la commission départementale ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le MINISTRE DE L'AGRICULTURE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a annulé la décision en date du 9 février 1984 de la commission départementale d'aménagement foncier du Tarn en tant qu'elle concerne le compte 387 des biens appartenant à M. Jacques Y... ;
Article 1er : La requête de M. X... est rejetée.
Article 2 : L'article 2 du jugement du tribunal administratif deToulouse en date du 23 septembre 1985 est annulé.
Article 3 : La demande présentée par M. Jacques Y... devant le tribunal administratif de Toulouse est rejetée.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. X..., à M. Jacques Y... et au ministre de l'agriculture et de la forêt.


Synthèse
Formation : 1 ss
Numéro d'arrêt : 74051
Date de la décision : 26/01/1990
Type d'affaire : Administrative

Analyses

AGRICULTURE - REMEMBREMENT FONCIER AGRICOLE - ATTRIBUTIONS ET COMPOSITION DES LOTS - AMELIORATION DES CONDITIONS D'EXPLOITATION - Bâtiments et centre d'exploitation - Notion.

AGRICULTURE - REMEMBREMENT FONCIER AGRICOLE - REGLES DE PROCEDURE CONTENTIEUSE SPECIALES - VOIES DE RECOURS - Tierce opposition - Recevabilité - Absence.

PROCEDURE - VOIES DE RECOURS - APPEL - RECEVABILITE - Absence - Remembrement.

PROCEDURE - VOIES DE RECOURS - TIERCE-OPPOSITION - RECEVABILITE - Absence - Remembrement.


Références :

Code rural 19, 4

Cf. Ducret, 1982-04-24, n° 18572.


Publications
Proposition de citation : CE, 26 jan. 1990, n° 74051
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: de Bellescize
Rapporteur public ?: Mme de Clausade

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1990:74051.19900126
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