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07/03/1990 | FRANCE | N°69881

France | France, Conseil d'État, 1 / 4 ssr, 07 mars 1990, 69881


Vu le recours du MINISTRE DE L'URBANISME, DU LOGEMENT ET DES TRANSPORTS enregistré au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 26 juin 1985 ; le MINISTRE DE L'URBANISME DU LOGEMENT ET DES TRANSPORTS demande que le Conseil d'Etat :
1°) réforme le jugement du 23 avril 1985 par lequel le tribunal administratif de Nice l'a condamné à verser à M. Y... la somme de 805 000 F, qu'il estime excessive, en réparation du préjudice subi du fait d'un refus illégal de permis de construire, et a fixé au 18 octobre 1982 le point de départ des intérêts ;
2°) réduise à une somme i

nférieure à 8 000 F la somme due à M. Y... au titre des honoraires d'a...

Vu le recours du MINISTRE DE L'URBANISME, DU LOGEMENT ET DES TRANSPORTS enregistré au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 26 juin 1985 ; le MINISTRE DE L'URBANISME DU LOGEMENT ET DES TRANSPORTS demande que le Conseil d'Etat :
1°) réforme le jugement du 23 avril 1985 par lequel le tribunal administratif de Nice l'a condamné à verser à M. Y... la somme de 805 000 F, qu'il estime excessive, en réparation du préjudice subi du fait d'un refus illégal de permis de construire, et a fixé au 18 octobre 1982 le point de départ des intérêts ;
2°) réduise à une somme inférieure à 8 000 F la somme due à M. Y... au titre des honoraires d'architecte, et fixe au 11 janvier 1985 le point de départ des intérêts dus sur la somme de 420 000 F ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Faure, Maître des requêtes,
- les observations de la S.C.P. Tiffreau, Thouin-Palat, avocat de M. Y...,
- les conclusions de M. Tuot, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que, par un jugement en date du 27 novembre 1981 devenu définitif, le tribunal administratif de Nice a annulé l'arrêté du maire de Toulon en date du 6 octobre 1977 rejetant la demande de permis de construire présentée par M. Y... en vue de l'édification à Toulon d'un groupe de 4 immeubles de 2 étages comprenant 56 logements et 111 garages ; que M. Z... ayant le 4 juin 1982 présenté une nouvelle demande de permis de construire pour le même projet une seconde décision de rejet a été prise par le maire de Toulon le 1er septembre 1982 pour des motifs tirés des nouvelles dispositions du plan d'occupation des sols révisé rendues publiques à partir du 14 août 1980 ; que, par le jugement attaqué en date du 23 avril 1985, le tribunal administratif de Nice a décidé que le refus illégalement opposé par le maire de Toulon à la première demande de permis de construire engageait la responsabilité de l'Etat, et a condamné l'Etat à verser à M. Y... une indemnité de 805 000 F, dont 800 000 F au titre des frais d'honoraires d'architecte inutilement exposés par l'intéressé ;
Sur le recours du MINISTRE DE L'URBANISME DU LOGEMENT ET DES TRANSPORTS :
Considérant que, sans contester le principe de la responsabilité de l'Etat, le MINISTRE DE L'URBANISME DU LOGEMENT ET DES TRANSPORTS soutient, d'une part que le montant de l'indemnité allouée au titre des frais d'honoraires d'architecte est excessif, et, d'autre part, que le point de départ des intérêts afférents à une partie de cette indemnité doit être fixé à la date du 11 janvier 1985 et non à celle du 18 octobre 1982 ;

Considérant, sur le premier point, que M. X... justifie avoir versé à l'architecte une somme de 800 000 F qui correspond, selon le contrat qu'il avait conclu avec cet homme de l'art, à la fraction des honoraires due au titre de l'étude du projet et de l'établissement du dossier de permis de construire ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que le montant des honoraires ainsi prévu était excessif au regard de l'importance et du coût du projet ;
Considérant, sur le second point, que, si une partie de ces honoraires n'a été payée à l'architecte par M. Y... qu'en janvier 1985, cette circonstance ne faisait pas obstacle à ce que le point de départ des intérêts afférents à l'indemnité réparant les préjudices subis par l'intéressé fût fixé au 18 octobre 1982, date à laquelle le MINISTRE DE L'URBANISME DU LOGEMENT ET DES TRANSPORTS a reçu sa demande préalable d'indemnité ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les conclusions du recours du MINISTRE DE L'URBANISME DU LOGEMENT ET DES TRANSPORTS ne peuvent être accueillies ;
Sur le recours incident de M. Y... :
Considérant, en premier lieu, que si, en refusant illégalement d'accorder à M. Y... par son arrêté du 6 octobre 1977 le permis de construire qu'il avait demandé, le maire de Toulon a commis une faute de nature à engager la responsabilité de l'Etat, il résulte de l'instruction que le préjudice dont l'intéressé demande réparation, causé par la privation des bénéfices qu'il pouvait attendre de la vente des immeubles dont il envisageait la construction, ne peut être regardé comme la conséquence directe de la faute de service ainsi commise mais est entièrement imputable à la modification des règles du plan d'occupation des sols de la ville de Toulon résultant de la révision de ce plan ; que les dispositions de l'article L. 160-5 du code de l'urbanisme font obstacle à ce qu'un tel préjudice soit indemnisé ; que, par suite, M. Y... n'est pas fondé à soutenir, par la voie du recours incident, que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté la demande d'indemnité pour ledit préjudice ;

Considérant, en deuxième lieu, que M. Y... ne développe aucun moyen à l'appui de ses conclusions tendant à l'annulation du jugement attaqué en tant que celui-ci a rejeté le surplus de sa demande d'indemnité ; que ces conclusions ne sont, dès lors, pas recevables ;
Considérant, enfin, que, si M. Y... demande que les intérêts échus le 9 avril 1984 soient capitalisés pour produire, eux-mêmes, intérêts à cette date, le tribunal administratif a fait droit à cette demande par l'article 2 de son jugement ;
Article 1er : Le recours du MINISTRE DE L'URBANISME DU LOGEMENT ET DES TRANSPORTS et le recours incident de M. Y... sont rejetés.
Article 2 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'équipement, du logement, des transports et de la mer et à M. Y....


Synthèse
Formation : 1 / 4 ssr
Numéro d'arrêt : 69881
Date de la décision : 07/03/1990
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - RESPONSABILITE EN RAISON DES DIFFERENTES ACTIVITES DES SERVICES PUBLICS - SERVICES DE L'URBANISME - Institution de servitudes d'urbanisme (article L - 160-5 du code de l'urbanisme) - Atteinte à des droits acquis - Absence d'atteinte à des droits acquis - Permis de construire illégalemen refusé - Modification ultérieure du P - O - S - (1).

60-02-05, 60-01-05, 60-02-05-01, 60-04-01-03-01 Si, en refusant illégalement d'accorder à M. B. par son arrêté du 6 octobre 1977 le permis de construire qu'il avait demandé, le maire de Toulon a commis une faute de nature à engager la responsabilité de l'Etat, le préjudice dont l'intéressé demande réparation, causé par la privation des bénéfices qu'il pouvait attendre de la vente des immeubles dont il envisageait la construction, ne peut être regardé comme la conséquence directe de la faute de service ainsi commise mais est entièrement imputable à la modification des règles du plan d'occupation des sols de la ville de Toulon résultant de la révision de ce plan. Les dispositions de l'article L.160-5 du code de l'urbanisme font obstacle à ce qu'un tel préjudice soit indemnisé (1).

- RJ1 RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - RESPONSABILITE EN RAISON DES DIFFERENTES ACTIVITES DES SERVICES PUBLICS - SERVICES DE L'URBANISME - PERMIS DE CONSTRUIRE - Responsabilité à raison d'un refus illégal de permis de construire - Modification ultérieure des règles d'urbanisme - Caractère direct du préjudice - Absence - Privation des bénéfices attendus de la vente des immeubles (1).

- RJ1 RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - REPARATION - PREJUDICE - CARACTERE DIRECT DU PREJUDICE - ABSENCE - Urbanisme - Refus illégal de permis de construire - Modification ultérieure des règles d'urbanisme - Préjudice résultant de la perte des bénéfices attendus de la vente des immeubles (1).

RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - FAITS SUSCEPTIBLES OU NON D'OUVRIR UNE ACTION EN RESPONSABILITE - RESPONSABILITE REGIE PAR DES TEXTES SPECIAUX - Servitudes instituées en application du code de l'urbanisme (article L - 160-5 du code de l'urbanisme) - Absence d'indemnisation sauf si ces servitudes portent atteinte à des droits acquis ou entraînent une modification de l'état antérieur des lieux déterminant un dommage direct - matériel et certain - Absence en l'espèce de droit à indemnité.


Références :

Code de l'urbanisme L160-5

1.

Cf. Section, 1989-09-29, Mme Lamarche-Jacomet, p. 179, pour la perte de valeur vénale du terrain d'assiette ;

Comp. 1989-11-08, Degouy, p. 228, pour le refus illégal d'un transfert de permis de construire


Publications
Proposition de citation : CE, 07 mar. 1990, n° 69881
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : Mme Bauchet
Rapporteur ?: M. Faure
Rapporteur public ?: M. Tuot

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1990:69881.19900307
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