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09/03/1990 | FRANCE | N°76876

France | France, Conseil d'État, 2 / 6 ssr, 09 mars 1990, 76876


Vu le recours sommaire et le mémoire complémentaire du ministre de l'industrie, des P. et T. et du tourisme, enregistrés les 21 mars et 21 juillet 1986 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1°) réforme le jugement en date du 21 janvier 1986 par lequel le tribunal administratif de Nice a limité à 15 734 200 F l'indemnité due à l'Etat par la Société des Chantiers du Nord et de la Méditerranée (SCNM) en réparation du préjudice causé par l'incendie du navire-câblier "Marcel X...",
2°) rejette les demandes présentées de

vant le tribunal administratif de Nice par la Société des Chantiers du Nord...

Vu le recours sommaire et le mémoire complémentaire du ministre de l'industrie, des P. et T. et du tourisme, enregistrés les 21 mars et 21 juillet 1986 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1°) réforme le jugement en date du 21 janvier 1986 par lequel le tribunal administratif de Nice a limité à 15 734 200 F l'indemnité due à l'Etat par la Société des Chantiers du Nord et de la Méditerranée (SCNM) en réparation du préjudice causé par l'incendie du navire-câblier "Marcel X...",
2°) rejette les demandes présentées devant le tribunal administratif de Nice par la Société des Chantiers du Nord et de la Méditerranée (SCNM) tendant, d'une part, au paiement de travaux exécutés sur le "Marcel X...", d'autre part, à l'annulation d'un état exécutoire émis à son encontre pour la somme de 53 644 808,46 F,
3°) condamne la Société des Chantiers du Nord et de la Méditerranée (SCNM) à verser à l'Etat une indemnité de 53 644 808,46 F ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des marchés de l'Etat ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Dubos, Maître des requêtes,
- les observations de la S.C.P. Lemaitre, Monod, avocat du ministre des postes, des télécommunications et de l'espace et de la S.C.P. Le Prado, avocat de la Société des Chantiers du Nord et de la Méditerranée (SCNM),
- les conclusions de M. Faugère, Commissaire du gouvernement ;

Sur les conclusions relatives au règlement des travaux exécutés par la Société des Chantiers du Nord et de la Méditerranée (SCNM) sur le navire "Marcel X..." :
Considérant qu'en exécution de deux marchés en date des 11 et 12 décembre 1980, la Société des Chantiers du Nord et de la Méditerranée (SCNM) a effectué divers travaux sur le navire-câblier "Marcel X..." appartenant à l'administration des PTT ; qu'il résulte de l'instruction que les travaux prévus aux marchés étaient, à l'exception de quelques travaux de finition, achevés le 6 janvier 1981 date à laquelle un incendie a entièrement détruit le bateau, et que l'administration des PTT avait, avant cette même date, pris possession dudit bateau ; que si, en raison de l'incendie, ces travaux n'ont pu faire l'objet de la réception prévue par les marchés, cette circonstance n'est pas par elle-même de nature à priver la société du droit d'obtenir le règlement des travaux exécutés ;
Considérant que le solde non contesté des travaux dû à l'entreprise s'élève à la somme de 4 265 000 F ; que le ministre de l'industrie, des P. et T. et du tourisme n'est, dès lors, pas fondé à demander que l'Etat soit déchargé du paiement de cette somme au prfit de la Société des Chantiers du Nord et de la Méditerranée (SCNM) ;
Sur la responsabilité de l'incendie survenu le 6 janvier 1981 :
Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment du rapport des experts commis par les premiers juges que l'incendie survenu le 6 janvier 1981 qui a entièrement détruit le "Marcel X..." a eu pour origine la brusque inflammation, lors d'une opération de soudure, de résidus d'un diluant qui avait servi quelques instants auparavant au nettoyage de tuyauteries ; que l'imprudence qu'ont commise les préposés de l'entreprise en utilisant un diluant très inflammable au lieu du diluant habituel, ininflammable, constitue une faute qui engage la responsabilité de la Société des Chantiers du Nord et de la Méditerranée (SCNM) ; que, toutefois, l'incendie n'a eu ces très graves conséquences qu'en raison de retards et d'insuffisances de la lutte contre l'incendie imputables à l'équipage du bateau ; que le tribunal administratif a fait une juste appréciation des responsabilités encourues en l'espèce en limitant la part de responsabilité incombant à la société à la moitié ; qu'il suit de là que les conclusions du recours du ministre tendant à une augmentation de la part de responsabilité incombant à la société et celles du recours incident formé par cette dernière en vue d'être déchargée de toute responsabilité ne peuvent être accueillies ;
Sur la réparation :

Considérant qu'aux termes de l'article 13-1 des marchés des 11 et 12 décembre 1980 : "Le fournisseur est civilement responsable en toutes circonstances des faits d'imprudence, de maladresse ou de négligences imputables à son personnel ... a) Tous les risques dont le fournisseur supporte la responsabilité civile sont couverts jusqu'à concurrence de 20 000 000 F pour les dommages consécutifs à un incendie ou à une explosion ( ...) b) Sous ces réserves, l'administration des PTT conserve à sa charge ( ...) les risques prévus au paragraphe a) ci-dessus qui excéderaient les montants indiqués" ;
Considérant que l'imprudence des préposés de la Société des Chantiers du Nord et de la Méditerranée (SCNM) qui est à l'origine de l'incendie du "Marcel X..." ne présente pas le caractère d'une faute lourde de nature à exclure l'application de la stipulation précitée des marchés passés par l'Etat avec la Société des Chantiers du Nord et de la Méditerranée (SCNM) ; que le ministre de l'industrie, des P. et T. et du tourisme n'est, dès lors, pas fondé à soutenir que la limitation du montant de la réparation que prévoit cette stipulation ne serait pas opposable à l'Etat ;
Considérant que le préjudice qui a résulté pour l'Etat de la destruction du "Marcel X..." s'élève à la somme non contestée de 102 900 108 F ; que la part de ce préjudice incombant à l'entreprise excède la somme de 20 000 000 F à laquelle se trouve limitée sa responsabilité en cas d'incendie ; que c'est, par suite, à bon droit que le tribunal administratif a fixé à 20 000 000 F le montant de l'indemnité due par la Société des Chantiers du Nord et de la Méditerranée (SCNM) à l'Etat en réparation du préjudice causé par l'incendie du "Marcel X..." et qu'il a, déduction faite des sommes qui restaient dues au titre des marchés, fixé à 15 734 200 F le montant de la créance de l'Etat sur cette société ;
Article 1er : Le recours du ministre de l'industrie, des P. et T. et du tourisme et le recours incident de la Société des Chantiers du Nord et de la Méditerranée (SCNM) sont rejetés.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la Société des Chantiers du Nord et de la Méditerranée (SCNM) et au ministre des postes, des télécommunications et de l'espace.


Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

- RJ1 MARCHES ET CONTRATS ADMINISTRATIFS - EXECUTION TECHNIQUE DU CONTRAT - ALEAS DU CONTRAT - Incendie de l'ouvrage sur lequel ont porté les travaux ayant fait l'objet du marché - Conséquences (1).

39-03-03, 39-05-02, 39-06-01-01-01 En exécution de deux marchés en date des 11 et 12 décembre 1980, la Société des Chantiers du Nord et de la Méditerranée (SCNM) a effectué divers travaux sur le navire-câblier "Marcel Bayard" appartenant à l'administration des PTT. Les travaux prévus aux marchés étaient, à l'exception de quelques travaux de finition, achevés le 6 janvier 1981 date à laquelle un incendie a entièrement détruit le bateau. L'administration des PTT avait, avant cette même date, pris possession dudit bateau. Si, en raison de l'incendie, ces travaux n'ont pu faire l'objet de la réception prévue par les marchés, cette circonstance n'est pas, par elle-même, de nature à priver la société du droit d'obtenir le règlement des travaux exécutés (1).

- RJ1 MARCHES ET CONTRATS ADMINISTRATIFS - EXECUTION FINANCIERE DU CONTRAT - REGLEMENT DES MARCHES - Incendie de l'ouvrage sur lequel ont porté les travaux ayant fait l'objet du marché - Conséquences (1).

- RJ1 MARCHES ET CONTRATS ADMINISTRATIFS - RAPPORTS ENTRE L'ARCHITECTE - L'ENTREPRENEUR ET LE MAITRE DE L'OUVRAGE - RESPONSABILITE DES CONSTRUCTEURS A L'EGARD DU MAITRE DE L'OUVRAGE - QUESTIONS GENERALES - RECEPTION DES TRAVAUX - Prise de possession de travaux sans réception définitive - Conséquences - Incendie de l'ouvrage sur lequel ont porté les travaux (1).


Références :

1. Comp. 1952-07-16, E.D.F., p. 379


Publications
Proposition de citation: CE, 09 mar. 1990, n° 76876
Publié au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : M. Combarnous
Rapporteur ?: M. Dubos
Rapporteur public ?: M. Faugère
Avocat(s) : SCP Lemaître, Monod, SCP Le Prado, Avocat

Origine de la décision
Formation : 2 / 6 ssr
Date de la décision : 09/03/1990
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 76876
Numéro NOR : CETATEXT000007794082 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;1990-03-09;76876 ?
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