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04/04/1990 | FRANCE | N°63858

France | France, Conseil d'État, 9 / 7 ssr, 04 avril 1990, 63858


Vu la requête et le mémoire, enregistrés le 9 novembre 1984 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés par la SOCIETE ANONYME ALLOMAT, dont le siège est ..., représentée par son président-directeur général en exercice, domicilié audit siège et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1°) annule un jugement en date du 22 juin 1984 par lequel le tribunal administratif d' Orléans a rejeté sa demande tendant à la décharge des impositions complémentaires à l'impôt sur les sociétés ainsi que de la retenue à la source auxquelles elle a été assujettie au tit

re de l'année 1975 ;
2°) lui accorde décharge des impositions contestées ;
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Vu la requête et le mémoire, enregistrés le 9 novembre 1984 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés par la SOCIETE ANONYME ALLOMAT, dont le siège est ..., représentée par son président-directeur général en exercice, domicilié audit siège et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1°) annule un jugement en date du 22 juin 1984 par lequel le tribunal administratif d' Orléans a rejeté sa demande tendant à la décharge des impositions complémentaires à l'impôt sur les sociétés ainsi que de la retenue à la source auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 1975 ;
2°) lui accorde décharge des impositions contestées ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le III de l'article 81 de la loi n° 86-1317 du 30 décembre 1986 modifié par l'article 93 de la loi n° 87-1060 du 30 décembre 1987 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de Mme Bechtel, Maître des requêtes,
- les conclusions de Mme Liébert-Champagne, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que par une décision en date du 10 juillet 1986, la SOCIETE ANONYME ALLOMAT a bénéficié d'un dégrèvement de 461 978 F sur l'imposition mise à sa charge au titre de la retenue à la source sur les revenus distribués au cours de l'exercice 1975 ainsi que des pénalités y afférentes ; qu'il n'y a pas lieu, à concurrence de ladite somme, de statuer sur la demande présentée par la SOCIETE ANONYME ALLOMAT ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant, d'une part, qu'il appartenait aux premiers juges de fonder leur appréciation sur l'ensemble des éléments portés à leur connaissance ; qu'ils ont pu notamment à bon droit se fonder sur les motifs du jugement en date du 28 janvier 1981 du tribunal correctionnel de Chartres concernant des faits en relation étroite avec le litige qui leur était soumis ;
Considérant, d'autre part, que le jugement attaqué, qui relève notamment que la société portugaise Saturnus a été le bénéficiaire initial de la commission litigieuse, n'est pas entaché de contradiction dans la désignation du bénéficiaire de ladite commission ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la société ALLOMAT n'avait soulevé en première instance aucun moyen relatif à la régularité de la procédure d'imposition ; que les moyens relatifs à la régularité de cette procédure, soulevés pour la première fois en appel sont, par suite, irrecevables ;

Sur le bien-fondé des impositions :
En ce qui concerne l'impôt sur les sociétés :
Considérant que si, en vertu des dispositions combinées des articles 39-1-1°) et 209 du code général des impôts, le bénéfice net imposable est établi sous déduction notamment des frais généraux de toute nature, pareille déduction ne peut être admise que si l'entreprise justifie, en faisant état de circonstances ou de documents appropriés, de la réalité de ces frais et dépenses et du fait qu'ils ont été exposés dans l'intérêt de l'exploitation ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que la SOCIETE ANONYME ALLOMAT a versé en 1975 une commission de 1 472 000 F à la société Saturnus en rémunération du rôle d'intermédiaire qu'elle aurait joué dans la conclusion avec une société algérienne de deux marchés de "camps" faits d'installations préfabriquées au Sahara ; que les documents versés au dossier, et notamment la correspondance entre le président-directeur général de la SOCIETE ANONYME ALLOMAT et des destinataires non identifiés de la société Saturnus comportent des contradictions quant à la réalité du rôle d'intermédiaire joué par cette dernière ; qu'en outre, cette correspondance, constituée exclusivement de copies n'apporte aucune précision fiable ni quant à sa date ni quant à l'identité de ses destinataires ; qu'ainsi la SOCIETE ANONYME ALLOMAT ne peut être regardée comme justifiant suffisamment de ce que les versements litigieux étaient effectués dans l'intérêt de l'exploitation ; qu'elle ne satisfait dès lors ni aux prescriptions des dispositions précitées du code, ni aux termes des réponses ministérielles à MM. Y... et X..., députés, invoquées par la requérante, et qui n'ajoutent pas à la loi fiscale ; qu'il en résulte que la SOCIETE ANONYME ALLOMAT n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d' Orléans a admis la réintégration de la commission litigieuse dans son bénéfice imposable au titre de l'année 1975 ;

En ce qui concerne la retenue à la source appliquée à la commission litigieuse :
Considérant qu'en application de l'article 109 du code général des impôts, l'administration a assujetti la somme de 1 472 000 F, versée en 1975 à la société portugaise Saturnus ayant son siège à Lisbonne, par la SOCIETE ANONYME ALLOMAT et réintégrée dans les bénéfices de celle-ci, à la retenue à la source d'abord au taux de 25 %, puis, après dégrèvement en cours d'instance, au taux de 15 % pour tenir compte des dispositions de l'article 11 de la convention franco-portugaise du 14 janvier 1971, aux termes desquelles : "1°) Les dividendes payés par une société qui est un résident d'un Etat contractant à un résident de l'autre Etat contractant sont imposables dans cet autre Etat. 2. Toutefois ces dividendes peuvent être imposés dans l'Etat contractant dont la société qui paie les dividendes est un résident et selon la législation de cet Etat, mais l'impôt ainsi établi ne peut excéder 15 % du montant brut des dividendes" ;
Considérant qu'aux termes du 3 du même article II de cette convention : "Le terme "dividendes", employé dans le présent article, désigne les revenus provenant d'actions, actions ou bons de jouissance, parts de mines, parts de fondateur ou autres parts bénéficiaires à l'exception des créances, ainsi que les revenus d'autres parts sociales assimilées aux revenus d'actions par la législation fiscale de l'Etat dont la société distributrice est un résident" ; qu'il ressort clairement de ces dispositions qu'elles ne visent pas les revenus réputés distribués au sens du 1-1° de l'article 109 du code général des impôts ;
Considérant que la somme versée par la SOCIETE ANONYME ALLOMAT à la société Saturnus ayant son siège au Portugal n'entre clairement dans aucune des catégories de produits que la convention franco-portugaise rend imposable en France, lorsque, comme en l'espèce, la partie versante y a son domicile fiscal ; que c'est, par suite, à tort que les sommes dont il s'agit ont été assujetties à la retenue à la source, établie par l'article 119 bis du code général des impôts ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SOCIETE ANONYME ALLOMAT est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté sa demande tendant à la décharge des droits et pénalités en matière de la retenue à la source qui lui ont été assignés au titre de l'année 1975 ;
Article 1er : La SOCIETE ANONYME ALLOMAT est déchargée des droits et pénalités en matière de retenue à la source qui lui ont été assignés au titre de l'année 1975.
Article 2 : Le jugement en date du 22 juin 1984 du tribunal administratif d' Orléans est réformé en ce qu'il a de contraire à la présente décision.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de la SOCIETE ANONYME ALLOMAT est rejeté.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE ANONYME ALLOMAT et au ministre délégué auprès du ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et du budget, chargé du budget.


Synthèse
Formation : 9 / 7 ssr
Numéro d'arrêt : 63858
Date de la décision : 04/04/1990
Sens de l'arrêt : Décharge
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

19-01-01-05-02,RJ1 CONTRIBUTIONS ET TAXES - GENERALITES - TEXTES FISCAUX - CONVENTIONS INTERNATIONALES - CONVENTIONS BILATERALES -Portugal (convention du 14 janvier 1971) - Article 23 - Portée (1).

19-01-01-05-02 En application de l'article 109 du C.G.I., l'administration a assujetti une somme, versée à une société portugaise ayant son siège à Lisbonne, par la société A. et réintégrée dans les bénéfices de celle-ci, à la retenue à la source au taux de 15 % pour tenir compte des dispositions de l'article 11 de la convention franco-portugaise du 14 janvier 1971, aux termes desquelles : "1°) Les dividendes payés par une société qui est un résident d'un Etat contractant à un résident de l'autre Etat contractant sont imposables dans cet autre Etat. 2) Toutefois ces dividendes peuvent être imposés dans l'Etat contractant dont la société qui paie les dividendes est un résident et selon la législation de cet Etat, mais l'impôt ainsi établi ne peut excéder 15 % du montant brut des dividendes". Aux termes du 3 du même article II de cette convention : "le terme "dividendes", employé dans le présent article, désigne les revenus provenant d'actions, actions ou bons de jouissance, parts de mines, parts de fondateur ou autres parts bénéficiaires à l'exception des créances, ainsi que les revenus d'autres parts sociales assimilées aux revenus d'actions par la législation fiscale de l'Etat dont la société distributrice est un résident". Il ressort clairement de ces dispositions qu'elles ne visent pas les revenus réputés distribués au sens du 1-1° de l'article 109 du C.G.I.. L'article 23 de la convention franco-portugaise aux termes duquel "les éléments du revenu d'un résident d'un Etat contractant qui ne sont pas expressément mentionnés dans les articles précédents de la convention, ne sont imposables que dans cet Etat, à condition qu'ils y soient assujettis à l'impôt selon la législation fiscale de cet Etat", ne subordonne pas l'exemption de retenue à la source à la condition que les revenus distribués par la société française soient imposables au Portugal (sol. impl.) (1).


Références :

CGI 109, 119 bis, 39 1 1°, 209
Convention fiscale du 14 janvier 1971 France / Portugal art. 11

1. Comp. avec la solution inverse pour la convention franco-italienne de 1958, 1983-06-10, n° 27391, p. 242


Publications
Proposition de citation : CE, 04 avr. 1990, n° 63858
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Rougevin-Baville
Rapporteur ?: Mme Bechtel
Rapporteur public ?: Mme Liébert-Champagne

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1990:63858.19900404
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