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08/06/1990 | FRANCE | N°109533

France | France, Conseil d'État, 3 / 5 ssr, 08 juin 1990, 109533


Vu la requête sommaire, enregistrée le 2 août 1989 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, et le mémoire complémentaire enregistré le 1er septembre 1989, présentés pour M. Jean I...
H..., demeurant à Santa Maria Sicche (20190) ; M. H... demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du 16 juin 1989 par lequel le tribunal administratif de Bastia a rejeté ses protestations contre les élections qui se sont déroulées les 12 et 19 mars 1989 pour l'élection des conseillers municipaux de la commune de Santa Maria Sicche ;
2°) annule lesdites opérations é

lectorales ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code électoral ;
V...

Vu la requête sommaire, enregistrée le 2 août 1989 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, et le mémoire complémentaire enregistré le 1er septembre 1989, présentés pour M. Jean I...
H..., demeurant à Santa Maria Sicche (20190) ; M. H... demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du 16 juin 1989 par lequel le tribunal administratif de Bastia a rejeté ses protestations contre les élections qui se sont déroulées les 12 et 19 mars 1989 pour l'élection des conseillers municipaux de la commune de Santa Maria Sicche ;
2°) annule lesdites opérations électorales ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code électoral ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Le Chatelier, Auditeur,
- les observations de Me Garaud, avocat de M. Jean I...
H... et de Me Spinosi, avocat de M. G...,
- les conclusions de M. Pochard, Commissaire du gouvernement ;

En ce qui concerne le premier tour de scrutin :
Sur le grief relatif à l'irrégularité de la campagne électorale :
Considérant que si M. H... soutient que les opérations électorales ont été viciées par le fait qu'un camion portant des affiches appelant à voter en faveur de M. G... a circulé dans la commune les journées des 11 et 12 mars 1989, cette manoeuvre n'a pas été, en l'espèce, de nature à altérer la sincérité du scrutin ;
Sur les griefs tirés de l'irrégularité du vote par procuration :
Considérant qu'aux termes de l'article R.72 du code électoral : "Pour les personnes résidant en France, les procurations sont établies par acte dressé devant le juge du tribunal d'instance de leur résidence ou le juge qui en exerce les fonctions ou le greffier en chef de ce tribunal, ainsi que devant tout officier de police judiciaire, autre que les maires et leurs adjoints, que ce juge aura désigné. A la demande de ce magistrat, le premier président de la cour d'appel ou le président du tribunal supérieur peut désigner, en outre, d'autres magistrats ou d'autres greffiers en chef, en activité ou à la retraite. Les officiers de police judiciaire compétents pour établir les procurations ou leurs délégués, se déplacent à la demande des personnes qui, en raison des maladies ou d'infirmités graves, ne peuvent manifestement comparaître devant eux. Les délégués des officiers de police judiciaire sont choisis par l'officier de police judiciaire déléguant avec l'agrément du magistrat qui l'a désigné" ;

Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction que dix procurations émises par des électeurs de la commune de Santa-Maria-Siché ont été établies par des délégués d'officiers de police judiciaire figurant sur les listes agréées prévues par les dispsitions précitées de l'article R. 72 du code électoral ; que, cependant, ceux-ci ne sont pas au nombre des autorités compétentes pour établir des procurations ; que, par suite, les votes émis au moyen de ces procurations doivent être déclarés nuls et, dix voix doivent être déduites tant du nombre des suffrages exprimés que de celui obtenu par chacun des candidats élus ;
Considérant, en second lieu, qu'il résulte des dispositions des articles L. 71 et suivants et R. 71 et suivants du code électoral qu'un électeur ayant donné une procuration à un mandataire pour voter en son nom ne peut, avant l'expiration de sa validité, donner une nouvelle procuration à un autre mandataire sans avoir au préalable résilié la procuration initiale dans les conditions fixées par l'article R. 78 ; qu'il résulte de l'instruction que, contrairement à ce qu'affirme le requérant, la procuration délivrée par Mme A... le 23 février 1989 était régulière dès lors que la validité de la précédente procuration consentie par elle avait expiré le 2 octobre 1988 ; qu'en revanche, Mme Y... a établi successivement deux procurations valables pour un an à deux mandataires différents ; qu'à la date du scrutin, la première procuration, qui n'avait pas été résiliée dans les formes réglementaires, était encore valable ; que, dès lors, le vote émis pour Mme Y... par le mandataire figurant sur la deuxième procuration l'a été dans des conditions irrégulières et qu'il convient de déduire une voix tant du nombre des suffrages exprimés que de celui obtenu de chacun des candidats élus ;

Considérant, enfin, que quels qu'aient été les moyens dont disposait l'administration pour faire face à la situation créée par la grève des services postaux, l'impossibilité où se sont trouvées deux électrices de la commune de Santa-Maria-Siché dont les procurations n'ont pu être acheminées avant le premier tour de scrutin, d'exprimer leur suffrage est de nature à avoir altéré les résultats des opérations électorales ; qu'eu égard à l'impossibilité où se trouve le juge de l'élection de présumer la façon dont se seraient répartis les suffrages qui n'ont pu être exprimés, il lui appartient, pour en apprécier l'influence sur le scrutin, de placer les candidats dont l'élection est contestée dans la situation la plus défavorable et d'ajouter les deux suffrages qui n'ont pu être ainsi émis au nombre total des suffrages exprimés pour le calcul de la majorité absolue sans modifier le nombre de suffrages obtenus par les différents candidats ;
Considérant qu'il résulte de l'ensemble des rectifications opérées tant sur le nombre total des suffrages exprimés au premier tour de scrutin que par ceux recueillis par chacun des candidats, que M. J..., qui a dans ces conditions recueilli 259 voix, n'atteint plus la majorité absolue des suffrages exprimés qui est désormais de 263 suffrages ; que, dès lors, son élection doit être annulée ;
En ce qui concerne le second tour de scrutin :
Considérant, en premier lieu, que, d'une part, bien qu'un candidat proclamé élu à l'issue des opérations du premier tour de scrutin n'ait pas obtenu en réalité la majorité absolue des suffrages exprimés et que son élection soit annulée par la présente décision, les opérations du premier tour n'ont pas été, en elles-mêmes, entachées d'irrégularités de nature à entraîner l'annulation des opérations du second tour ; que, d'autre part, le second tour de scrutin n'ayant pas eu lieu pour la désignation d'un nombre de conseillers supérieur à celui des sièges qui étaient légalement à pourvoir, l'annulation de l'élection de M. J... n'emporte pas, par voie de conséquence, l'annulation des opérations du deuxième tour de scrutin ;

Considérant, en second lieu, qu'en admettant même que les irrégularités relevées sur certains votes émis grâce à des procurations au cours du premier tour de scrutin aient entaché les opérations du second tour et que le nombre de suffrages correspondant soit déduit du nombre des voix attribuées aux candidats proclamés élus, ceux-ci conservent la majorité relative nécessaire pour être élus au second tour ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. H... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bastia a rejeté celles des conclusions de ses protestations contre les opérations électorales qui se sont déroulées les 12 et 19 mars 1989 qui tendaient à l'annulation de l'élection de M. J... comme conseiller municipal de Santa-Maria-Siché ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Bastia en date du 16 juin 1989 est annulé en ce qu'il a rejeté la protestation de M. H... en tant qu'elle tendait à l'annulation de l'élection de M. J....
Article 2 : L'élection de M. J... en qualité de conseiller municipal est annulée.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. H... est rejeté.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. H..., à M.d'Ornano, M. G..., M. X..., Mme F..., M. E..., Mme Z..., M. K..., M. B..., M. C..., M. J..., M. D... et au ministre de l'intérieur.


Type d'affaire : Administrative

Analyses

ELECTIONS - ELECTIONS MUNICIPALES - OPERATIONS ELECTORALES - VOTE PAR PROCURATION.

ELECTIONS - REGLES DE PROCEDURE CONTENTIEUSE SPECIALES - POUVOIRS DU JUGE - CONSEQUENCES TIREES PAR LE JUGE DES IRREGULARITES - NOUVEAU DECOMPTE DES VOIX.

ELECTIONS - REGLES DE PROCEDURE CONTENTIEUSE SPECIALES - POUVOIRS DU JUGE - ANNULATION D'UNE ELECTION - CONSEQUENCES DE L'ANNULATION.


Références :

Code électoral R72, L71, R71, R78


Publications
Proposition de citation: CE, 08 jui. 1990, n° 109533
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Le Chatelier
Rapporteur public ?: Pochard

Origine de la décision
Formation : 3 / 5 ssr
Date de la décision : 08/06/1990
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 109533
Numéro NOR : CETATEXT000007799306 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;1990-06-08;109533 ?
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