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08/06/1990 | FRANCE | N°76775

France | France, Conseil d'État, 8 / 7 ssr, 08 juin 1990, 76775


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat les 19 mars et 18 juillet 1986, présentés pour M. Maurice X..., demeurant ... ; M. X... demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement en date du 22 janvier 1986 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande en décharge des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée auxquels il a été assujetti pour la période du 1er octobre 1975 au 31 décembre 1977 par un avis de mise en recouvrement en date du 14 avril 1981 ;
2°) prono

nce la décharge de ces droits et des pénalités dont ils ont été assort...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat les 19 mars et 18 juillet 1986, présentés pour M. Maurice X..., demeurant ... ; M. X... demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement en date du 22 janvier 1986 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande en décharge des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée auxquels il a été assujetti pour la période du 1er octobre 1975 au 31 décembre 1977 par un avis de mise en recouvrement en date du 14 avril 1981 ;
2°) prononce la décharge de ces droits et des pénalités dont ils ont été assortis ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de Mme Daussun, Auditeur,
- les observations de Me Jacoupy, avocat de M. Maurice X...,
- les conclusions de M. Chahid-Nouraï, Commissaire du gouvernement ;

Sur l'étendue du litige :
Considérant que, par une décision en date du 22 janvier 1987, postérieure à l'introduction du pourvoi, le directeur des services fiscaux du Morbihan a accordé à M. X... le dégrèvement, à concurrence d'une somme de 18 425,05 F, des pénalités auxquelles il avait été assujetti à raison des droits rappelés au titre de la période correspondant à l'exercice clos en 1977 ; que les conclusions de la requête de M. X... sont, dans cette mesure, devenues sans objet ;
Sur le bien-fondé des impositions :
En ce qui concerne le redressement afférent à l'inscription d'une dette au passif du bilan de l'exercice clos en 1976 :
Considérant qu'aux termes de l'article 1975 du code général des impôts, repris à l'article L.189 du livre des procédures fiscales : "Les prescriptions sont interrompues ... par tous actes comportant reconnaissance des redevables" ; que, pour l'application de cette disposition l'effet interruptif de prescription ne peut résulter que d'un acte ou d'une démarche par lesquels le redevable se réfère clairement à une créance définie par sa nature, son montant, et l'identité du créancier ;
Considérant que l'administration se prévaut de l'inscription au passif du bilan de l'exercice clos le 30 septembre 1976 de l'entreprise individuelle alors dirigée par M. X... d'une somme de 136 212,21 F sous la rubrique "dette de taxe sur la valeur ajoutée due à l'Etat", pour soutenir que cette inscription correspond à des minorations de base imposable et à des déductions pratiquées à tort pendant la période correspondant aux exercices clos en 1974 et en 1975 et prescrits à l'époque de la vérification, et que cette inscription a inerrompu la prescription ; qu'il résulte de l'instruction que l'inscription à laquelle a procédé le requérant, si elle détermine le montant de la créance en cause ainsi que son bénéficiaire, ne permet pas de définir son objet avec une précision suffisante ; que, dès lors, une telle inscription au bilan ne peut être regardée comme constituant à elle seule, en l'absence de tout autre acte du redevable ayant cet objet, un acte comportant reconnaissance du redevable au sens des dispositions précitées de l'article 1975 du code général des impôts ; que, par suite, elle n'a pas interrompu la prescription ; que, dès lors, M. X... est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a rejeté sa demande en décharge des compléments de taxe sur la valeur ajoutée ainsi que des pénalités mis à sa charge à raison de ce chef de redressement ;

En ce qui concerne le redressement afférent à la taxe sur la valeur ajoutée se rapportant au stock disparu :
Considérant qu'aux termes de l'article 271 du code général des impôts dans sa rédaction applicable à l'espèce : "1. La taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les éléments du prix d'une opération imposable est déductible de la taxe sur la valeur ajoutée applicable à cette opération. 2. A cet effet, les assujettis, qui sont autorisés à opérer globalement l'imputation de la taxe sur la valeur ajoutée, sont tenus de procéder à une régularisation : a. Si les marchandises ont disparu ;" et qu'aux termes de l'article 221 de l'annexe II audit code : "1. Le montant de la taxe dont la déduction a déjà été opérée doit être reversé dans le cas ci-après : Lorsque les marchandises ont disparu ; ( ...) 3. Les régularisations visées au 1 ci-dessus ne sont pas exigées lorsque les biens ont été détruits avant toute utilisation ou cession et qu'il est justifié de cette destruction" ;
Considérant que le service a assujetti M. X... à un complément de taxe sur la valeur ajoutée à raison de la régularisation du montant de la taxe déduite sur des éléments de stock comptabilisés pour une valeur de 154 896 F au bilan clos le 31 décembre 1977 et ayant disparu au cours des années suivantes ; que si M. X... soutient avoir été dispensé, en vertu des dispositions de l'article 221 de l'annexe II au code général des impôts précité, de l'obligation de régularisation prévue à l'article 271-2 précité du même code, il lui incombait d'apporter la justification de la destruction des éléments de stock dont s'agit ; que la seule production d'attestations établies en des termes vagues et imprécis, à une date d'ailleurs postérieure aux opérations en cause, ne saurait constituer cette justification ; qu'ainsi ce chef de demande ne peut qu'être écarté ;

En ce qui concerne le redressement afférent à la taxe sur la valeur ajoutée se rapportant aux recettes de location de caravanes :
Considérant qu'aux termes de l'article 266 du code général des impôts dans sa rédaction applicable à l'espèce : "1. Le chiffre d'affaires imposable est constitué ( ...) c) Pour les prestations de services, par le prix des services ou la valeur des biens ou services reçus en paiement" ; et qu'aux termes du 3 de l'article 267 du même code dans sa rédaction applicable à l'espèce : "Sous réserve des dispositions de l'article 266-1-f, les sommes remboursées aux personnes qui rendent compte exactement à leurs commettants des débours effectués en leur lieu et place n'entrent pas dans le prix des services à raison desquels elles sont imposées ..." ; que si les documents produits en première instance par le requérant permettent d'établir que M. X... agissait en vertu d'un mandat des propriétaires de caravanes à qui il reversait une part du produit des locations, ils n'apportent pas la justification ni de ce qu'il aurait rendu auxdits propriétaires un compte exact de l'ensemble de l'opération et des débours engagés à cette occasion, ni de ce que sa rémunération aurait été fixée au préalable par référence au prix des locations ; que dès lors, M. X... ne pouvant se prévaloir des dispositions précitées de l'article 267-3 du code général des impôts, la totalité du produit des locations était légalement passible de la taxe sur la valeur ajoutée ;
Sur les pénalités :
Considérant que, devant les premiers juges, M. X... n'a invoqué, dans le délai du recours contentieux, aucun moyen propre aux pénalités ; que, par suite, les moyens qu'il invoque en appel, relatifs à ces pénalités, constituent une demande nouvelle qui, non expressément reprise dans une production postérieure au 1er janvier 1987, n'est pas recevable ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X... est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande en décharge des compléments de la taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge à hauteur d'un montant de 136 212,21 F ainsi que des pénalités y afférentes ;
Article 1er : A concurrence de la somme de 18 425,05 F en ce qui concerne les pénalités afférentes aux compléments de taxe sur la valeur ajoutée rappelés au titre de la période correspondant à l'exercice clos le 31 décembre 1977, il n'y a pas lieu de statuer surla requête de M. X....
Article 2 : M. X... est déchargé du supplément d'imposition àla taxe sur la valeur ajoutée, ainsi que des pénalités afférentes, mis à sa charge au titre de la période correspondant à l'exercice clos le 30 septembre 1976 à hauteur de 136 212,21 F.
Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de Rennes en date du 22 janvier 1986 est réformé en ce qu'il a de contraire à la présente décision.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. X... est rejeté.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. X... et au ministre délégué auprès du ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et du budget, chargé du budget.


Synthèse
Formation : 8 / 7 ssr
Numéro d'arrêt : 76775
Date de la décision : 08/06/1990
Sens de l'arrêt : Réformation décharge
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

19-01-03-04 CONTRIBUTIONS ET TAXES - GENERALITES - REGLES GENERALES D'ETABLISSEMENT DE L'IMPOT - PRESCRIPTION -Actes interruptifs de prescription - Existence - Autres actes interruptifs de prescription - Acte comportant reconnaissance - Inscription au passif du bilan d'une dette de taxe sur la valeur ajoutée (non en l'espèce).

19-01-03-04 Aux termes de l'article 1975 du C.G.I., repris à l'article L.189 du livre des procédures fiscales : "Les prescriptions sont interrompues ... par tous actes comportant reconnaissance des redevables". Pour l'application de cette disposition l'effet interruptif de prescription ne peut résulter que d'un acte ou d'une démarche par lesquels le redevable se réfère clairement à une créance définie par sa nature, son montant, et l'identité du créancier. L'administration se prévaut de l'inscription au passif du bilan de l'exercice clos le 30 septembre 1976 de l'entreprise d'une somme sous la rubrique "dette de taxe sur la valeur ajoutée due à l'Etat", pour soutenir que cette inscription correspond à des minorations de base imposable et à des déductions pratiquées à tort pendant la période correspondant aux exercices clos en 1974 et en 1975 et prescrits à l'époque de la vérification, et que cette inscription a interrompu la prescription. L'inscription à laquelle a procédé le contribuable, si elle détermine le montant de la créance en cause ainsi que son bénéficiaire, ne permet pas de définir son objet avec une précision suffisante. Dès lors, une telle inscription au bilan ne peut être regardée comme constituant à elle seule, en l'absence de tout autre acte du redevable ayant cet objet, un acte comportant reconnaissance au sens des dispositions de l'article 1975 du code général des impôts.


Références :

CGI 1975, 271, 271 par. 2, 266, 267, 267 par. 3
CGIAN2 221
Livre des procédures fiscales L189


Publications
Proposition de citation : CE, 08 jui. 1990, n° 76775
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Rougevin-Baville
Rapporteur ?: Mme Daussun
Rapporteur public ?: M. Chahid-Nouraï

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1990:76775.19900608
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