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11/07/1990 | FRANCE | N°84994;85264

France | France, Conseil d'État, 1 / 4 ssr, 11 juillet 1990, 84994 et 85264


Vu, 1°) sous le n° 84 994, la requête, enregistrée le 10 février 1987 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le CENTRE HOSPITALIER GENERAL DE NEUFCHATEAU, représenté par son directeur, à ce dûment habilité par une délibération du conseil d'administration en date du 5 mars 1987, et dont le domicile est ... (88307) ; le centre hospitalier demande que le Conseil d'Etat :
- annule le jugement en date du 18 décembre 1986 par lequel le tribunal administratif de Nancy a annulé la décision du directeur du centre hospitalier refusant de communiquer à l'Uni

on syndicale des ambulanciers vosgiens les conditions de prix arrêtée...

Vu, 1°) sous le n° 84 994, la requête, enregistrée le 10 février 1987 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le CENTRE HOSPITALIER GENERAL DE NEUFCHATEAU, représenté par son directeur, à ce dûment habilité par une délibération du conseil d'administration en date du 5 mars 1987, et dont le domicile est ... (88307) ; le centre hospitalier demande que le Conseil d'Etat :
- annule le jugement en date du 18 décembre 1986 par lequel le tribunal administratif de Nancy a annulé la décision du directeur du centre hospitalier refusant de communiquer à l'Union syndicale des ambulanciers vosgiens les conditions de prix arrêtées dans les conventions passées entre cet hôpital et l'entreprise X... pour le service médical d'urgence et le transport par ambulance ;
- rejette la demande présentée par l'Union syndicale des ambulanciers vosgiens ;
- ordonne qu'il sera sursis à l'exécution du jugement attaqué ;
Vu, 2°) sous le n° 85 264, l'ordonnance en date du 13 février 1987, enregistrée le 20 février 1987, par laquelle le président du tribunal administratif de Nancy a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R.74 du code des tribunaux administratifs, la requête du CENTRE HOSPITALIER GENERAL DE NEUFCHATEAU, et tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution du jugement susvisé du tribunal administratif de Nancy en date du 18 décembre 1986 ;
Vu l'ordonnance du 13 avril 1987 par laquelle le Président de la 1ère sous-section de la section du contentieux a rejeté les conclusions des requêtes tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution du jugement ;
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 modifiée, portant diverses mesures d'amélioration des relations entre l'administration et le public et diverses dispositions d'ordre administratif, social et fiscal ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Faure, Maître des requêtes,
- les conclusions de M. Tuot, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que les requêtes du CENTRE HOSPITALIER GENERAL DE NEUFCHATEAU enregistrées sous les n os 84 994 et 85 264 présentent à juger la même question ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;
Sur la recevabilité de la demande présentée au tribunal administratif :
En ce qui concerne le délai :
Considérant qu'aux termes de l'article 2 de la loi du 17 juillet 1978 : "Sous réserve des dispositions de l'article 6, les documents administratifs sont de plein droit communiqués aux personnes qui en font la demande ..." et qu'aux termes de l'article 7 de cette loi, modifié par la loi du 11 juillet 1979, dans sa rédaction alors en vigueur : "Le refus de communication est notifié au demandeur sous forme de décision écrite motivée. Le défaut de réponse pendant plus de deux mois vaut décision de refus. En cas de refus exprès ou tacite, l'intéressé sollicite l'avis de la commission prévue à l'article 5. Cet avis doit être donné au plus tard dans le mois de la saisine de la commission. L'autorité compétente est tenue d'informer celle-ci de la suite qu'elle donne à l'affaire dans les deux mois de la réception de cet avis. Le délai du recours contentieux est prorogé jusqu'à la notification à l'administré de la réponse de l'autorité compétente. Lorsqu'il est saisi d'un recours contentieux contre un refus de communication d'un document administratif, le juge administratif doit statuer dans le délai de six mois à compter de l'enregistrement de la requête" ;

Considérant qu'il ressort des dispositions précitées que, lorsqu'une demande de communication de documents administratifs a été rejetée par une décision explicite ou implicite de l'autorité administrative, ce refus ne peut être déféré directement au juge de l'excès de pouvoir ; que l'intéressé doit avoir, au préalable, saisi de ce refus, dans le délai du recours pour excès de pouvoir ayant couru contre cette décision, la commission prévue à l'article 5 de la loi, dite "commission d'accès aux documents administratifs" ; que, dans le cas où, au vu de l'avis exprimé par cette commission, l'autorité administrative compétente confirme son refus de communication, l'intéressé peut déférer cette décision au juge de l'excès de pouvoir jusqu'à l'expiration du délai du recours contentieux décompté à partir de la notification qui lui est faite d'une décision explicite de confirmation de refus de communication ;
Considérant qu'à la suite d'une première saisine de la commission d'accès aux documents administratifs le 2 mai 1985, l'Union syndicale des ambulanciers vosgiens a reçu communication des conventions passées par le CENTRE HOSPITALIER GENERAL DE NEUFCHATEAU avec M. X..., ambulancier, pour l'exécution du service médical d'urgence et le transport par ambulance à la charge de l'hôpital ainsi que des appels d'offres correspondant à ces conventions ; qu'elle a, le 19 août 1985, demandé au centre hospitalier de lui communiquer les conditions de prix des deux accords, qui ne figuraient pas dans le texte des conventions ; que ce dernier lui ayant par une lettre du 22 août 1985 opposé un refus, l'Union syndicale des ambulanciers vosgiens, ainsi qu'elle y était tenue dès lors qu'il s'agissait d'une nouvelle demande, a saisi le 25 septembre 1985 la commission d'accès aux documents administratifs qui, dans son avis du 24 octobre 1985 adressé le 12 novembre suivant au centre hospitalier, a admis qu'il y avait lieu de communiquer l'ensemble des documents constituant les conventions, y compris l'acte d'engagement de l'entreprise retenue ainsi que des extraits des procès-verbaux de dépouillement des offres des entreprises retenues, en indiquant que les mentions de ces procès-verbaux relatives aux offres non retenues étaient couvertes par le secret en matière commerciale et industrielle visé à l'article 6 de la loi du 17 juillet 1978 et par suite n'étaient communicables qu'aux entreprises auteurs de ces offres ; qu'aucune décision explicite de confirmation de refus de communication n'ayant été prise par la direction du CENTRE HOSPITALIER GENERAL DE NEUFCHATEAU, l'Union syndicale des ambulanciers vosgiens n'était pas forclose lorsqu'elle a, le 15 mai 1986, saisi le tribunal administratif de Nancy d'une demande tendant à l'annulation de la décision de refus du centre hospitalier du 22 août 1985 ; que la circonstance que, par lettre du 20 janvier 1986, la commission d'accès aux documents administratifs a confirmé au centre hospitalier, à la demande de celui-ci, son avis en date du 24 octobre 1985 est sans influence sur la recevabilité de ladite demande ;

En ce qui concerne l'intérêt pour agir :
Considérant qu'il résulte des dispositions de l'article 2 de la loi du 17 juillet 1978 précitées que toute personne à laquelle est opposé un refus de communication d'un document administratif justifie d'un intérêt lui donnant qualité pour demander l'annulation de ce refus ; que, par suite, le CENTRE HOSPITALIER GENERAL DE NEUFCHATEAU n'est pas fondé à soutenir que l'Union syndicale des ambulanciers vosgiens n'avait pas qualité pour demander au tribunal administratif de Nancy l'annulation de la décision du 22 août 1985 par laquelle ledit centre a refusé de lui communiquer certains documents administratifs ;
Sur la légalité du refus de communication :
Considérant qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 17 juillet 1978, modifié par la loi du 11 juillet 1979 : "Le droit de toute personne à l'information est précisé et garanti par le présent titre en ce qui concerne la liberté d'accès aux documents administratifs de caractère non nominatif ..." et qu'aux termes de l'article 6 de la même loi : "Les administrations ... peuvent refuser de laisser consulter ou de communiquer un document administratif dont la consultation ou la communication porterait atteinte ... - au secret en matière commerciale et industrielle ..." ;
Considérant, en premier lieu, que les documents déterminant les conditions de prix arrêtées entre l'administration et l'entreprise retenue à l'issue d'un appel d'offres ne constituent pas, par eux-mêmes, des documents de caractère nominatif au sens de l'article 1er précité de la loi du 17 juillet 1978 et entrent ainsi dans le champ d'application de ladite loi ;

Considérant, en deuxième lieu, que le CENTRE HOSPITALIER GENERAL DE NEUFCHATEAU ne précise pas en quoi la communication des documents en cause, qui ne comportent aucune mention relative aux offres non retenues, porterait atteinte au secret en matière commerciale et industrielle ; qu'il ne saurait, en tout état de cause, utilement se prévaloir de l'arrêté du ministre des affaires sociales et de la solidarité nationale en date du 13 mars 1986 qui n'était pas encore en vigueur à la date de la décision de refus litigieuse ;
Considérant, enfin, que la disposition de l'article 299 du code des marchés publics prévoyant que la commission chargée de juger l'appel d'offres "dresse un procès-verbal des opérations qui ne peut être rendu public ni communiqué à aucun candidat", ne fait pas obstacle à la communication à des tiers de l'acte d'engagement de l'entreprise retenue et des conditions de prix des marchés, dès lors que cette communication peut être exigée par application des dispositions de la loi du 17 juillet 1978 ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le CENTRE HOSPITALIER GENERAL DE NEUFCHATEAU n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy qui ne s'est pas mépris sur la portée de la décision attaquée, a annulé sa décision du 22 août 1985 en tant qu'elle porte refus de communiquer à l'Union syndicale des ambulanciers vosgiens les extraits de documents relatifs aux conditions de prix des marchés passés entre le centre hospitalier et M. X... ;
Article 1er : Les requêtes n os 84 994 et 85 264 du CENTRE HOSPITALIER GENERAL DE NEUFCHATEAU sont rejetées.
Article 2 : La présente décision sera notifiée au CENTRE HOSPITALIER GENERAL DE NEUFCHATEAU, à l'Union syndicale des ambulanciers vosgiens et au ministre de la solidarité, de la santé et de la protection sociale.


Synthèse
Formation : 1 / 4 ssr
Numéro d'arrêt : 84994;85264
Date de la décision : 11/07/1990
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Recours pour excès de pouvoir

Analyses

DROITS CIVILS ET INDIVIDUELS - ACCES AUX DOCUMENTS ADMINISTRATIFS - ACCES AUX DOCUMENTS ADMINISTRATIFS AU TITRE DE LA LOI DU 17 JUILLET 1978 - Combinaison avec d'autres textes - Code des marchés publics (art - 299) - Obstacle à la communication de l'acte d'engagement de l'entreprise retenue et des conditions de prix des marchés - Absence.

26-06-01, 26-06-01-02-02 En premier lieu, les documents déterminant les conditions de prix arrêtées entre l'administration et l'entreprise retenue à l'issue d'un appel d'offres ne constituent pas, par eux-mêmes, des documents de caractère nominatif au sens de l'article 1er de la loi du 17 juillet 1978 et entrent ainsi dans le champ d'application de ladite loi en l'absence d'atteinte au secret en matière commerciale et industrielle. En second lieu, la disposition de l'article 299 du code des marchés publics prévoyant que la commission chargée de juger l'appel d'offres "dresse un procès-verbal des opérations qui ne peut être rendu public ni communiqué à aucun candidat", ne fait pas obstacle à la communication à des tiers de l'acte d'engagement de l'entreprise retenue et des conditions de prix des marchés, dès lors que cette communication peut être exigée par application des dispositions de la loi du 17 juillet 1978. Documents communicables.

DROITS CIVILS ET INDIVIDUELS - ACCES AUX DOCUMENTS ADMINISTRATIFS - ACCES AUX DOCUMENTS ADMINISTRATIFS AU TITRE DE LA LOI DU 17 JUILLET 1978 - DROIT A LA COMMUNICATION - DOCUMENTS ADMINISTRATIFS COMMUNICABLES - Absence d'obstacle lié au caractère nominatif du document - Documents déterminant les conditions de prix arrêtées entre l'administration et l'entreprise retenue après appel d'offres.


Références :

Code des marchés publics 299
Loi 78-753 du 17 juillet 1978 art. 2, art. 7, art. 5, art. 6, art. 1
Loi 79-587 du 11 juillet 1979


Publications
Proposition de citation : CE, 11 jui. 1990, n° 84994;85264
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Combarnous
Rapporteur ?: M. Faure
Rapporteur public ?: M. Tuot

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1990:84994.19900711
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