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21/09/1990 | FRANCE | N°67776

France | France, Conseil d'État, 3 / 5 ssr, 21 septembre 1990, 67776


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 12 avril 1985 et 6 août 1985 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la société civile immobilière "HAMEAU DU BEAUVOIR", dont le siège est ..., représentée par son gérant en exercice, et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1°) réforme le jugement en date du 30 janvier 1985 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a condamné l'Etat à ne lui payer que la somme de 166 608,61 F en réparation du préjudice que lui a causé la délivrance d'un permis de construire illégal,


2°) condamne l'Etat à lui verser une indemnité de 3 980 816,90 F avec int...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 12 avril 1985 et 6 août 1985 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la société civile immobilière "HAMEAU DU BEAUVOIR", dont le siège est ..., représentée par son gérant en exercice, et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1°) réforme le jugement en date du 30 janvier 1985 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a condamné l'Etat à ne lui payer que la somme de 166 608,61 F en réparation du préjudice que lui a causé la délivrance d'un permis de construire illégal,
2°) condamne l'Etat à lui verser une indemnité de 3 980 816,90 F avec intérêts de droit à compter du 29 juillet 1981 et intérêts capitalisés,
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Schneider, Maître des requêtes,
- les observations de la S.C.P. Vier, Barthélémy, avocat de la SCI LE HAMEAU DU BEAUVOIR,
- les conclusions de M. Toutée, Commissaire du gouvernement ;

Sur la responsabilité :
Considérant que, par un arrêté en date du 10 décembre 1976, le préfet de la Drôme a délivré à la société civile immobilière "HAMEAU DU BEAUVOIR" un permis de construire pour 42 maisons individuelles à Romans ; que ce permis a été annulé par un jugement du tribunal administratif de Grenoble devenu définitif ; qu'en accordant ce permis illégal, le préfet de la Drôme a commis une faute qui engage la responsabilité de l'Etat ; que, toutefois, en présentant une demande de permis pour un projet dont elle ne pouvait ignorer qu'il n'était pas conforme aux dispositions du plan d'urbanisme alors en vigueur de la ville de Romans, la société civile immobilière requérante a elle-même commis une faute qui exonère partiellement l'Etat de sa responsabilité ; qu'en fixant à un quart la partie des conséquences dommageables de l'illégalité commise devant rester à la charge de la société requérante, le tribunal administratif a fait une juste appréciation des circonstance de l'espèce ;
Sur le préjudice :
Considérant, en premier lieu, que les sommes déboursées par la société pour l'acquisition du terrain ont été engagées par elle antérieurement à la délivrance du permis de construire annulé ; que, dès lors, la perte en capital qu'elle soutient avoir subie du fait que le terrain lui aurait été vendu au prix d'un terrain constructible, les frais engagés pour cette acquisition et les frais financiers de l'emprunt contracté à cette fin ne peuvent être regardés comme la conséquence du permis irrégulièrement délivré ;

Considérant, en deuxième lieu, que la société ne justifie ni de la nature ni du montant de frais et dommages divers dont elle demande le remboursement ; que le manque à gagner résultant de la privation des bénéfices escomptés des ventes de maisons envisagées par la société qui n'est pas la conséquence de l'illégalité du permis délivré à la société mais de l'inconstructibilité des terrains d'assiette n'est pas susceptible de donner lieu à indemnisation ;
Considérant, en troisième lieu, qu'il ne résulte pas de l'instruction que les honoraires d'avoué, les frais d'huissier et de contentieux juridique exposés par la société pour un montant de 5 375,81 F aient été la conséquence du permis illégalement délivré ;
Considérant, enfin, que le versement par la société des impôts et taxes afférents au terrain dont elle était propriétaire est sans lien direct avec la faute commise par l'Etat ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société civile immobilière "HAMEAU DU BEAUVOIR" n'est pas fondée à demander un relèvement de l'indemnité de 166 608,61 F que lui a allouée le tribunal administratif au titre des dépenses afférentes aux travaux indissociables des opérations de construction et aux honoraires d'architecte qu'elle a exposées inutilement ;
Sur les intérêts et les intérêts des intérêts :
Considérant que la société civile immobilière "HAMEAU DU BEAUVOIR" a droit aux intérêts au taux légal de l'indemnité à laquelle le tribunal administratif a condamné l'Etat à compter du 29 juillet 1981, date de sa première demande d'indemnité à l'administration ;

Considérant que la capitalisation des intérêts a été demandée les 12 avril 1985, 17 décembre 1986 et 2 novembre 1989 ; qu'à ces trois dates, il était dû au moins une année d'intérêts ; que, dès lors, en application de l'article 1154 du code civil, il y a lieu de faire droit auxdites demandes ;
Article 1er : L'indemnité de 166 608,61 F à laquelle l'Etat a été condamné envers la société civile immobilière "HAMEAU DU BEAUVOIR" par l'article 1er du jugement susvisé du tribunal administratif de Grenoble en date du 19 décembre 1984 portera intérêts au taux légal à compter du 29 juillet 1981. Les intérêts échus les 12 avril 1985, 17 décembre 1986 et 2 novembre 1989 seront capitalisés à ces dates pour produire eux-mêmes intérêts.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de la société civile immobilière "HAMEAU DU BEAUVOIR" est rejeté.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à la société civile immobilière "HAMEAU DU BEAUVOIR" et au ministre de l'équipement, du logement, des transports et de la mer.


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