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05/10/1990 | FRANCE | N°48972

France | France, Conseil d'État, 5 ss, 05 octobre 1990, 48972


Vu la décision en date du 15 juin 1988, par laquelle le Conseil d'Etat statuant au contentieux a, sur la requête de Mme Josette Y..., enregistrée sous le n° 48 972, et tendant à ce que le Conseil d'Etat annule le jugement du 7 janvier 1983 du tribunal administratif de Saint-Denis de la Réunion rejetant sa demande tendant à ce que la commune du Tampon soit reconnue responsable de l'accident dont elle a été victime et condamne la commune du Tampon à lui verser la somme de 500 000 F avec intérêts de droit en réparation du préjudice subi, ordonné une expertise en vue de déterminer

le taux d'invalidité permanente partielle dont Mme Y... est att...

Vu la décision en date du 15 juin 1988, par laquelle le Conseil d'Etat statuant au contentieux a, sur la requête de Mme Josette Y..., enregistrée sous le n° 48 972, et tendant à ce que le Conseil d'Etat annule le jugement du 7 janvier 1983 du tribunal administratif de Saint-Denis de la Réunion rejetant sa demande tendant à ce que la commune du Tampon soit reconnue responsable de l'accident dont elle a été victime et condamne la commune du Tampon à lui verser la somme de 500 000 F avec intérêts de droit en réparation du préjudice subi, ordonné une expertise en vue de déterminer le taux d'invalidité permanente partielle dont Mme Y... est atteinte et de fournir tous éléments utiles pour l'évaluation du préjudice corporel qu'elle a subi ;
Vu le rapport d'expertise, enregistré le 2 mai 1989 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat ;
Vu, enregistrée le 6 novembre 1989, l'intervention présentée par le ministre de l'économie, des finances et du budget, et tendant à ce que le Conseil d'Etat condamne la commune du Tampon, dans la limite de l'indemnité qui sera mise à sa charge et en sus de la créance du ministre de l'éducation nationale, au paiement au profit du Trésor de la somme de 414 808,75 F, exigible en application de l'article 1er alinéa 3 de l'ordonnance n° 59-76 du 7 janvier 1959, somme qui devra être majorée des intérêts au taux légal depuis la date de la demande ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu l'ordonnance n° 59-76 du 7 janvier 1959 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de Mme Mitjavile, Auditeur,
- les observations de la S.C.P. Guiguet, Bachellier, Potier de la Varde, avocat de Mme Josette Y... et de Me Ravanel, avocat de la commune de Tampon,
- les conclusions de M. Stirn, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que par décision du 15 juin 1988, le Conseil d'Etat statuant au Contentieux a déclaré la commune de Tampon (Réunion) entièrement responsable des conséquences dommageables de l'accident dont a été victime, le 12 avril 1977, Mme Y... et ordonné une expertise médicale afin que soit appréciée l'étendue du préjudice corporel subi par l'intéressée ;
Sur le montant du préjudice :
Considérant qu'il résulte de l'instruction que X... ROLLAND qui, à la suite de l'accident dont elle a été victime, a bénéficié jusqu'à son admission à la retraite, de congés de maladie avec maintien de son traitement au taux plein, n'a pas subi, du fait de cet accident, de perte de revenus ; que la pension de retraite et les prestations d'invalidité qui lui ont ensuite été servies, lui ont assuré des revenus équivalents à ceux dont elle aurait bénéficié si elle avait normalement poursuivi sa carrière jusqu'à la limite d'âge ; qu'en revanche, il résulte également de l'instruction, et notamment de l'expertise ordonnée par le Conseil d'Etat, que Mme Y..., qui demeure atteinte d'une incapacité permanente partielle de 50 %, a subi des troubles dans ses conditions d'existence ; qu'elle a enduré des souffrances physiques et qu'elle supporte un préjudice esthétique ; qu'il sera fait une juste appréciation de ces chefs de préjudice en les évaluant à la somme de 100 000 F ;
Considérant que, pour évaluer le préjudice global résultant de l'accident litigieux, il y a lieu d'ajouter à cette somme de 100 000 F, le montant des frais assumés par l'Etat par suite de cet accident, soit 531 382,17 F au titre des rémunérations servies à Mme Y... jusqu'à son admission à la retraite et 221 372,43 F de frais médicaux et pharmaceutiques, ainsi que le montant du capital constitutif de la part "service" de la pension qui lui a été concédée, jusqu'au jour où le fonctionnaire aurait atteint la limite d'âge, ainsi que de la part "invalidité" de cette pension, soit 414 808,75 F ; qu'ainsi, le préjudice global s'élève à 1 267 563,35 F ;
Sur les droits respectifs de l'Etat et de Mme Y... :

Considérant qu'aux termes de l'article 1er de l'ordonnance du 7 janvier 1959 : "I. - Lorsque le décès, l'infirmité ou la maladie d'un agent de l'Etat est imputable à un tiers, l'Etat dispose de plein droit contre ce tiers, par subrogation aux droits de la victime ou de ses ayants-droit, d'une action en remboursement de toutes les prestations versées ou maintenues à la victime ou à ses ayants-droits à la suite du décès, de l'infirmité ou de la maladie. II. - Cette action concerne notamment : Le traitement ou la solde et les indemnités accessoires pendant la période d'interruption du service ; - Les frais médicaux et pharmaceutiques ; - Le capital-décès ; - Les arrérages des pensions et rentes viagères d'invalidité ainsi que les allocations et majorations accessoires ; - Les arrérages des pensions de retraite et de réversion prématurées, jusqu'à la date à laquelle la victime aurait pu normalement faire valoir ses droits à pension, ainsi que les allocations et majorations accessoires ; - Les arrérages des pensions d'orphelin. III. - Le remboursement par le tiers responsable des arrérages de pensions ou rentes ayant fait l'objet d'une concession définitive est effectuée par le versement d'une somme liquidée en calculant le capital représentatif de la pension ou de la rente" ;
Considérant qu'il résulte de ces dispositions que l'Etat est fondé à demander à la commune du Tampon le remboursement des dépenses qu'il a exposées du fait de l'accident dont s'agit dans la limite des sommes mises à la charge de ladite commune, à l'exception des indemnités destinées à réparer les troubles de nature non pécuniaire subis par l'intéressée lesquels ne sont couverts, en l'espèce par aucune des prestations qui lui ont été ou lui seront servies par l'Etat ; que, par suite, l'Etat est fondé à demander le remboursement de l'intégralité des prestations qu'il a supportées, soit 1 167 563,35 F ; que les droits de X... ROLLAND s'élèvent, après déduction de cette somme, à 100 000 F ;
Sur les intérêts et les intérêts des intérêts :

Considérant que Mme Y... a droit aux intérêts de la somme de 100 000 F qui lui est due à compter de la date de réception par l'administration de sa demande d'indemnité du 14 octobre 1980 ;
Considérant que Mme Y... a demandé la capitalisation des intérêts le 27 février 1990 ; qu'à cette date, il était dû au moins une année d'intérêts ; que, dès lors, conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil, il y a lieu de faire droit à cette demande ;
Considérant que le ministre de l'économie, des finances et du budget a demandé que l'Etat perçoive, à compter du 2 novembre 1989, les intérêts sur la somme de 414 808,75 F qui lui est due ; qu'il y a lieu de faire droit à cette demande ;
Sur les frais d'expertise exposés devant le Conseil d'Etat :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'affaire, de mettre ces frais à la charge de la commune du Tampon ;
Article 1er : La commune du Tampon est condamnée à verser à X... ROLLAND la somme de 100 000 F avec intérêts au taux légal à compter de la date de réception par l'administration de la demande d'indemnité adressée par l'intéressée le 14 octobre 1980. Les intérêts échus le 27 février 1990 seront capitalisés à cette date pour produire eux-mêmes intérêts.
Article 2 : La commune du Tampon est condamnée à verser à l'Etat la somme de 1 167 563,35 F dont 414 808,75 F avec intérêt au taux légal à compter du 2 novembre 1989.
Article 3 : Les frais d'expertise exposés devant le Conseil d'Etat sont mis à la charge de la commune du Tampon.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à Mme Y..., à la commune du Tampon, à la commune de Saint-Pierre, à la caisse générale de sécurité sociale de la Réunion, au ministre de l'intérieur, au ministre d'Etat, ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports et au ministre délégué auprès du ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et du budget, chargé du budget.


Synthèse
Formation : 5 ss
Numéro d'arrêt : 48972
Date de la décision : 05/10/1990
Type d'affaire : Administrative

Analyses

RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - REPARATION - EVALUATION DU PREJUDICE - TROUBLES DANS LES CONDITIONS D'EXISTENCE - TROUBLES DANS LES CONDITIONS D'EXISTENCE SUBIS PAR LA VICTIME D'UN ACCIDENT.

RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - REPARATION - EVALUATION DU PREJUDICE - SOUFFRANCES PHYSIQUES.

RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - REPARATION - EVALUATION DU PREJUDICE - PREJUDICE ESTHETIQUE.

TRAVAUX PUBLICS - DIFFERENTES CATEGORIES DE DOMMAGES - DOMMAGES SUR LES VOIES PUBLIQUES TERRESTRES.


Références :

Code civil 1154
Ordonnance 59-76 du 07 janvier 1959 art. 1


Publications
Proposition de citation : CE, 05 oct. 1990, n° 48972
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Mitjavile
Rapporteur public ?: Stirn

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1990:48972.19901005
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