Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 16 octobre 1985 et 14 février 1986 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la société civile immobilière "LE CAMP ROMAIN" et la société civile immobilière "LE FORUM" ; les sociétés demandent que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du 22 juillet 1985 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté leur demande en décharge de l'impôt sur les sociétés auquel elles ont été assujetties au titre de l'année 1980 ;
2°) accorde la décharge des impositions contestées,
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Massenet, Conseiller d'Etat,
- les observations de la SCP Coutard, Mayer, avocat des sociétés civiles immobilières "LE CAMP ROMAIN" et "LE FORUM",
- les conclusions de M. Fouquet, Commissaire du gouvernement ;
Sur les conclusions de la société civile immobilière "LE FORUM" :
Considérant que le tribunal administratif de Nice a été saisi le 14 février 1984 d'une demande émanant de la société civile immobilière "LE CAMP ROMAIN" et de la société civile immobilière "LE FORUM" et tendant à la décharge de l'impôt sur les sociétés auquel ces sociétés avaient été respectivement assujetties au titre de l'année 1980 ; qu'il ressort des pièces du dossier que la société "LE FORUM", seconde dénommée dans cette demande, a, pour régulariser ces conclusions, produit un nouveau mémoire qui a été enregistré le 17 septembre 1984 sous un autre numéro ; que, dès lors, le jugement attaqué, dont le dispositif statue d'ailleurs exclusivement sur les conclusions de la société "LE CAMP ROMAIN" et dont les motifs ne font pas par eux-mêmes obstacle à la régularisation que la société "LE FORUM" a entendu opérer ainsi qu'il a été dit, ne fait pas grief à la société "LE FORUM" ; que, par suite, elle n'est pas recevable à en demander l'annulation ;
Sur les conclusions de la société civile immobilière "LE CAMP ROMAIN" :
Considérant qu'aux termes de l'article 1655 ter du code général des impôts : "Les sociétés qui ont, en fait, pour unique objet, soit la construction ou l'acquisition d'immeubles ou de groupes d'immeubles en vue de leur division par fractions destinées à être attribuées aux associés en propriété ou en jouissance, soit la gestion de ces immeubles ou groupes d'immeubles ainsi divisés, soit la location pour le compte d'un ou plusieurs des membres de la société de tout ou partie des immeubles ou fractions d'immeubles appartenant à chacun de ces membres, sont réputées, quelle que soit leur forme juridique, ne pas avoir de personnalité distincte de celle de leurs membres pur l'application des impôts directs" ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'à la date à laquelle elle a été constituée, la société civile immobilière "LE CAMP ROMAIN" avait, en fait, pour unique objet la construction, sur le terrain acquis par elle à cette fin, d'immeubles en vue de leur division en fractions destinées à être attribuées aux associés en propriété et répondait, dès lors, aux conditions fixées au texte précité ; que les ventes à des tiers de très faibles portions de ce terrain qu'elle a réalisées avant 1980 ne peuvent, dans les circonstances de l'espèce, être regardées comme des opérations étrangères à la réalisation de son objet social ; que, dans ces conditions, ladite société civile immobilière a conservé le bénéfice de l'article 1655 ter en dépit de la circonstance qu'elle a, en définitive, été empêchée de réaliser cet objet social en raison de l'impossibilité d'obtenir les autorisations d'urbanisme nécessaires et qu'elle a dû en conséquence revendre le terrain en 1980 pour pouvoir être liquidée ; que la circonstance que certains associés se seraient livrés habituellement, en leur nom propre ou à raison de leur participation à d'autres sociétés, à des opérations de la nature de celles que vise l'article 35-I-1° du code général des impôts n'a pas été de nature à la placer en dehors du champ d'application de l'article 1655 ter précité ; que, par suite, la société civile immobilière "LE CAMP ROMAIN" est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa requête en décharge de l'impôt sur les sociétés auquel elle a été assujettie au titre de l'année 1980 à raison de la plus-value réalisée lors de la vente de ce terrain ;
Article 1er : Les conclusions de la société civile immobilière "LE FORUM" sont rejetées.
Article 2 : La société civile immobilière "LE CAMP ROMAIN" est déchargée de l'impôt sur les sociétés auquel elle a été assujettie autitre de l'année 1980.
Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de Nice en date du 22 juillet 1985 est réformé en ce qu'il a de contraire à la présente décision.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à la société civile immobilière "LE CAMP ROMAIN", à la société civile immobilière "LE FORUM" et au ministre délégué auprès du ministre d'Etat, ministrede l'économie, des finances et du budget, chargé du budget.