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26/10/1990 | FRANCE | N°69726;69727

France | France, Conseil d'État, Assemblee, 26 octobre 1990, 69726 et 69727


Vu 1°) la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 21 juin 1985 et 21 octobre 1985 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat sous le n° 69 726, présentés pour la fédération nationale du commerce extérieur des produits alimentaires, dont le siège est ..., et tendant à l'annulation pour excès de pouvoir de l'arrêté interministériel en date du 15 avril 1985 portant application du décret n° 84-1297 du 31 décembre 1984 instituant des taxes parafiscales au profit du comité central des pêches maritimes, des comités locaux des pêches maritimes, et de

l'institut français de recherche pour l'exploitation de la mer,
Vu 2°)...

Vu 1°) la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 21 juin 1985 et 21 octobre 1985 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat sous le n° 69 726, présentés pour la fédération nationale du commerce extérieur des produits alimentaires, dont le siège est ..., et tendant à l'annulation pour excès de pouvoir de l'arrêté interministériel en date du 15 avril 1985 portant application du décret n° 84-1297 du 31 décembre 1984 instituant des taxes parafiscales au profit du comité central des pêches maritimes, des comités locaux des pêches maritimes, et de l'institut français de recherche pour l'exploitation de la mer,
Vu 2°) la requête sommaire, enregistrée le 21 juin 1985 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat sous le n° 69 727, et le mémoire complémentaire, enregistré le 21 octobre 1985, présentées pour le syndicat national des négociants et transformateurs de saumon, dont le siège est ..., et tendant à l'annulation pour excès de pouvoir de l'arrêté interministériel en date du 15 avril 1985 portant application du décret n° 84-1297 du 31 décembre 1984 instituant des taxes parafiscales au profit du comité central des pêches maritimes, des comités locaux des pêches maritimes et de l'institut français de recherche pour l'exploitation de la mer ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le traité en date du 25 mars 1957 instituant la communauté économique européenne ;
Vu l'ordonnance n° 59-2 du 2 janvier 1959 ;
Vu le décret n° 84-1297 du 31 décembre 1984 ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Turquet de Beauregard, Conseiller d'Etat,
- les observations de Me Delvolvé, avocat de la fédération nationale du commerce extérieur des produits alimentaires et du syndicat national des négociants et transformateurs de saumon,
- les conclusions de M. Fouquet, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que les requêtes de la fédération nationale du commerce extérieur des produits alimentaires et du syndicat national des négociants et transformateurs de saumon sont dirigées contre un même arrêté interministériel en date du 15 avril 1985 portant application du décret en Conseil d'Etat du 31 décembre 1984 instituant des taxes parafiscales au profit du comité central des pêches maritimes, des comités locaux des pêches maritimes et de l'institut français de recherche pour l'exploitation de la mer ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que les trois signataires de l'arrêté attaqué avaient, en leur qualité de directeur de cabinet respectivement du ministre de l'économie, des finances et du budget, du secrétaire d'Etat auprès du ministre de l'économie, des finances et du budget, chargé du budget et de la consommation et du secrétaire d'Etat auprès du ministre de l'urbanisme, du logement et des transports, chargé de la mer, régulièrement reçu délégation de signature à l'effet de signer notamment les arrêtés ministériels, par des décisions publiées en date respectivement du 23 juillet 1984, du 11 décembre 1984 et du 6 août 1984 ; qu'ainsi le moyen tiré de l'incompétence des signataires de l'arrêté attaqué ne peut être accueilli ;
Considérant qu'aux termes de l'article 4 de l'ordonnance susvisée du 2 janvier 1959 portant loi organique relative aux lois de finances : "Les taxes parafiscales, perçues dans un intérêt économique ou social au profit d'une personne morale de droit public ou privé autre que l'Etat, les collectivités territoriales et leurs établissements publics administratifs, sont établies par décret en Conseil d'Etat ... La perception de ces taxes au-delà de la date du 31 décembre de l'année de leur établissement doit être autorisée chaque année par une loi de finances" ; que les dispositions précitées, qui réservent la compétence du législateur pour autoriser la perception des taxes parafiscales au-delà du 31 décembre de l'année de leur établissement, ne font pas obstacle à ce qu'un décret en Conseil d'Etat instituant des taxes parafiscales prévoie que ses dispositions soient applicables après cette date et renvoie à un arrêté le soin de fixer les taux des taxes dans la limite des taux maximum qu'il fixe lui-même ; qu'ainsi le moyen tiré de ce que l'arrêté attaqué, qui fixe les taux des taxes parafiscales instituées par le décret du 31 décembre 1984 jusqu'au 31 décembre 1988 dans la limite de taux maximum, aurait été pris sur le fondement d'un règlement pris en méconnaissance des dispositions précitées de l'ordonnance du 2 janvier 1959 ne saurait être accueilli ;

Considérant que, si les requérants invoquent l'incompatibilité avec le Marché commun des taxes parafiscales instituées par le décret pour l'application duquel a été pris l'arrêté attaqué, les stipulations des articles 92 et 93-1 et 2 du traité du 25 mars 1957 instituant la communauté économique européenne ne créent pas pour les particuliers de droits dont ceux-ci puissent se prévaloir devant une juridiction nationale ;
Considérant, enfin, que les requérants invoquent à l'encontre de l'arrêté attaqué un moyen tiré de la méconnaissance de la dernière phrase de l'article 93-3 du traité du 25 mars 1957 instituant la communauté économique européenne ;
Considérant qu'aux termes dudit article : "La commission est informée, en temps utile pour présenter ses observations, des projets tendant à instituer ou à modifier des aides. Si elle estime qu'un projet n'est pas compatible avec le marché commun, aux termes de l'article 92, elle ouvre sans délai la procédure prévue au paragraphe précédent. L'Etat membre intéressé ne peut mettre à exécution les mesures projetées, avant que cette procédure ait abouti à une décision finale" ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que l'arrêté attaqué, qui avait pour effet de faire entrer en vigueur dès sa publication les taxes parafiscales instituées par le décret du 31 décembre 1984, a été pris le 15 février 1985 alors que la commission des communautés européennes, qui avait été informée du projet, n'avait pas pris la décision finale prévue par les stipulations précitées ; que cette décision, par laquelle la commission a constaté que le projet n'était pas incompatible avec le marché commun, a été notifiée au Gouvernement français le 25 octobre 1985 ;

Considérant que la réponse au moyen ci-dessus analysé dépend de la question de savoir si la dernière phrase de l'article 93.3 du traité du 25 mars 1957 doit être interprétée comme imposant aux autorités des Etats membres une obligation dont la méconnaissance affecte la validité des actes comportant mise à exécution de mesures d'aide, compte tenu notamment de l'intervention ultérieure d'une décision de la commission déclarant ces mesures compatibles avec le marché commun ; que cette interprétation soulève une contestation sérieuse ; que, par suite, il y a lieu, en application de l'article 177 du traité, de surseoir à statuer jusqu'à ce que la Cour de Justice des Communautés Européennes se soit prononcée sur cette question préjudicielle ;
Article 1er : Il est sursis à statuer sur les requêtes de la fédération nationale du commerce extérieur des produits alimentaires et du syndicat national des négociants et transformateurs de saumon jusqu'à ce que le Cour de Justice des Communautés Européennes se soit prononcée sur la question préjudicielle définie dans les motifs de la présente décision.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la fédération nationale du commerce extérieur des produits alimentaires, au syndicat national des négociants et transformateurs de saumon, au ministre d'Etat, ministre des affaires étrangères, au ministre délégué auprès du ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et du budget, chargé du budget et au ministre délégué auprèsdu ministre de l'équipement, du logement, des transports et de la mer, chargé de la mer, ainsi qu'au Président de la Cour de Justice des Communautés Européennes.


Synthèse
Formation : Assemblee
Numéro d'arrêt : 69726;69727
Date de la décision : 26/10/1990
Sens de l'arrêt : Sursis à statuer question préjudicielle à la cour de justice des communautés européennes
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Recours pour excès de pouvoir

Analyses

- RJ1 COMMUNAUTES EUROPEENNES - PORTEE DES REGLES DE DROIT COMMUNAUTAIRES - STIPULATIONS DU TRAITE DE ROME - Articles 92 et 93 - 1 et 2 - Absence d'effet direct (1).

15-02-01, 15-03-04 Les stipulations des articles 92 et 93-1 et 2 du traité du 25 mars 1957 instituant la Communauté économique européenne ne créent pas pour les particuliers de droits dont ceux-ci puissent se prévaloir devant une juridiction nationale.

COMMUNAUTES EUROPEENNES - APPLICATION PAR LE JUGE ADMINISTRATIF FRANCAIS DES REGLES DE DROIT COMMUNAUTAIRES - RENVOI PREJUDICIEL A LA COUR DE JUSTICE DES COMMUNAUTES EUROPEENNES - Interprétation de stipulations du traité - Article 93-3 - Portée de l'obligation d'informer la commission.

15-03-02 Aux termes de l'article 93-3 du traité du 25 mars 1957 instituant la Communauté économique européenne : "La Commission est informée, en temps utile pour présenter ses observations, des projets tendant à instituer ou à modifier des aides. Si elle estime qu'un projet n'est pas compatible avec le Marché commun, aux termes de l'article 92, elle ouvre sans délai la procédure prévue au paragraphe précédent. l'Etat membre intéressé ne peut mettre à exécution les mesures projetées, avant que cette procédure ait abouti à une décision finale". L'arrêté interministériel en date du 15 avril 1985 portant application du décret du 31 décembre 1984 instituant des taxes parafiscales au profit du comité central des pêches maritimes, des comités locaux de pêches maritimes, et de l'Institut français de recherche pour l'exploitation de la mer, qui avait pour effet de faire entrer en vigueur dès sa publication les taxes parafiscales instituées par le décret du 31 décembre 1984, a été pris le 15 février 1985 alors que la Commission des Communautés européennes, qui avait été informée du projet, n'avait pas pris la décision finale prévue par les stipulations précitées. Cette décision, par laquelle la Commission a constaté que le projet n'était pas incompatible avec le Marché commun, a été notifiée au gouvernement français le 25 octobre 1985. La réponse au moyen tiré de la méconnaissance de cette disposition dépend de la question de savoir si la dernière phrase de l'article 93-3 du traité du 25 mars 1957 doit être interprétée comme imposant aux autorités des Etats membres une obligation dont la méconnaissance affecte la validité des actes comportant mise à exécution de mesures d'aide, compte tenu notamment de l'intervention ultérieure d'une décision de la Commission déclarant ces mesures compatibles avec le Marché commun. Cette interprétation soulève une contestation sérieuse. Par suite, il y a lieu, en application de l'article 177 du traité, de surseoir à statuer jusqu'à ce que la Cour de justice des Communautés européennes se soit prononcée sur cette question préjudicielle.

- RJ1 COMMUNAUTES EUROPEENNES - APPLICATION PAR LE JUGE ADMINISTRATIF FRANCAIS DES REGLES DE DROIT COMMUNAUTAIRES - CAS OU LES DISPOSITIONS DES TRAITES NE PEUVENT ETRE UTILEMENT INVOQUEES - Absence d'effet direct des articles 92 et 93 - 1 et 2 du Traité de Rome (1).

19-01-01-05-01 Les stipulations des articles 92 et 93-1 et 2 du traité du 25 mars 1957 instituant la communauté économique européenne ne créent pas pour les particuliers de droits dont ceux-ci puissent se prévaloir devant une juridiction nationale. Aux termes de l'article 93-3 du traité du 25 mars 1957 instituant la communauté économique européenne : "La commission est informée, en temps utile pour présenter ses observations, des projets tendant à instituer ou à modifier des aides. Si elle estime qu'un projet n'est pas compatible avec le marché commun, aux termes de l'article 92, elle ouvre sans délai la procédure prévue au paragraphe précédent. L'Etat membre intéressé ne peut mettre à exécution les mesures projetées, avant que cette procédure ait abouti à une décision finale". L'arrêté interministériel en date du 15 avril 1985 portant application du décret du 31 décembre 1984 instituant des taxes parafiscales au profit du comité central des pêches maritimes, des comités locaux de pêches maritimes, et de l'institut français de recherche pour l'exploitation de la mer, qui avait pour effet de faire entrer en vigueur dès sa publication les taxes parafiscales instituées par le décret du 31 décembre 1984, a été pris le 15 février 1985 alors que la commission des communautés européennes, qui avait été informée du projet, n'avait pas pris la décision finale prévue par les stipulations précitées. Cette décision, par laquelle la commission a constaté que le projet n'était pas incompatible avec le marché commun, a été notifiée au gouvernement français le 25 octobre 1985. La réponse au moyen tiré de la méconnaissance de cette disposition dépend de la question de savoir si la dernière phrase de l'article 93-3 du traité du 25 mars 1957 doit être interprétée comme imposant aux autorités des Etats membres une obligation dont la méconnaissance affecte la validité des actes comportant mise à exécution de mesures d'aide, compte tenu notamment de l'intervention ultérieure d'une décision de la commission déclarant ces mesures compatibles avec le marché commun. Cette interprétation soulève une contestation sérieuse. Par suite, il y a lieu, en application de l'article 177 du traité de surseoir à statuer jusqu'à ce que la Cour de justice des communautés européennes se soit prononcée sur cette question préjudicielle.

- RJ1 - RJ2 CONTRIBUTIONS ET TAXES - GENERALITES - TEXTES FISCAUX - CONVENTIONS INTERNATIONALES - CONVENTIONS MULTILATERALES - Communauté européenne - Traité instituant la Communauté économique européenne - A) Articles 92 - 93-1 et 93-2 - Absence d'effet direct (1) - B) Article 93-3 - Moyen tiré de la méconnaissance par le gouvernement français de l'obligation de consulter la commission et de ne pas mettre en oeuvre la mesure projetée avant une décision finale - Contestation sérieuse (2).

- RJ2 CONTRIBUTIONS ET TAXES - PRELEVEMENTS AUTRES QUE FISCAUX ET PARAFISCALITE - TAXES PARAFISCALES - Taxe parafiscale ayant le caractère d'une aide au sens de l'article 93-3 du traité de Rome - Question préjudicielle posée à la Cour de justice des communautés européennes (2).

19-08-01 L'arrêté interministériel en date du 15 avril 1985 portant application du décret du 31 décembre 1984 instituant des taxes parafiscales au profit du comité central des pêches maritimes, des comités locaux de pêches maritimes, et de l'institut français de recherche pour l'exploitation de la mer, qui avait pour effet de faire entrer en vigueur dès sa publication les taxes parafiscales instituées par le décret du 31 décembre 1984, a été pris le 15 février 1985 alors que la commission des communautés européennes, qui avait été informée du projet, n'avait pas pris la décision finale prévue par les stipulations précitées. Cette décision, par laquelle la commission a constaté que le projet n'était pas incompatible avec le marché commun, a été notifiée au gouvernement français le 25 octobre 1985. La réponse au moyen tiré de la méconnaissance de cette disposition dépend de la question de savoir si la dernière phrase de l'article 93-3 du traité du 25 mars 1957 doit être interprétée comme imposant aux autorités des Etats membres une obligation dont la méconnaissance affecte la validité des actes comportant mise à exécution de mesures d'aide, compte tenu notamment de l'intervention ultérieure d'une décision de la commission déclarant ces mesures compatibles avec le marché commun. Cette interprétation soulève une contestation sérieuse. Par suite, il y a lieu, en application de l'article 177 du traité de surseoir à statuer jusqu'à ce que la Cour de justice des communautés européennes se soit prononcée sur cette question préjudicielle.


Références :

Arrêté interministériel du 15 avril 1985 décision attaquée
Décret 84-1297 du 31 décembre 1984
Ordonnance 59-2 du 02 janvier 1959 art. 4
Traité Rome du 25 mars 1957 art. 92, art. 93-1, art. 93-3, art. 117

1.

Cf. Section 1967-02-10, Société des Etablissements Petitjean, p. 63. 2.

Cf. C.J.C.E. 1990-02-14, 301/87, République Française c/ Commission, RJF 8-9/90, n° 1143 ;

1990-03-21, 142/87, Royaume de Belgique c/ Commission, RJF 8-9/90, n° 1143


Publications
Proposition de citation : CE, 26 oct. 1990, n° 69726;69727
Publié au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Long
Rapporteur ?: M. Turquet de Beauregard
Rapporteur public ?: M. Fouquet
Avocat(s) : Me Delvolvé, Avocat

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1990:69726.19901026
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