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29/10/1990 | FRANCE | N°95216

France | France, Conseil d'État, 4 / 1 ssr, 29 octobre 1990, 95216


Vu 1°) sous le n° 95 216 la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 15 février 1988 et 14 juin 1988 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mme Monique X..., demeurant ... ; Mme X... demande au Conseil d'Etat :
- d'annuler le jugement du 10 décembre 1987 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 21 mars 1986 du maire de Metz la licenciant de son emploi de musicienne contractuelle et à la condamnation de la ville de Metz à lui verser la somme de 426 250,68 F

avec les intérêts de droits à compter du 12 juin 1986 ;
- de décl...

Vu 1°) sous le n° 95 216 la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 15 février 1988 et 14 juin 1988 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mme Monique X..., demeurant ... ; Mme X... demande au Conseil d'Etat :
- d'annuler le jugement du 10 décembre 1987 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 21 mars 1986 du maire de Metz la licenciant de son emploi de musicienne contractuelle et à la condamnation de la ville de Metz à lui verser la somme de 426 250,68 F avec les intérêts de droits à compter du 12 juin 1986 ;
- de déclarer illégale la décision de licenciement dont elle a été l'objet et de condamner la ville de Metz à lui payer la somme de 426 250,68 F, augmentée des intérêts de droit à compter du 12 juin 1986 ;
3° d'ordonner la capitalisation des intérêts ;
Vu 2°) sous le n° 95 217, la requête, enregistrée au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 15 février 1988, et le mémoire complémentaire, enregistré le 14 juin 1988, présentés pour Mme Ellie Y..., demeurant ... ; Mme Y... demande au Conseil d'Etat :
- d'annuler le jugement du 10 décembre 1987 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 21 mars 1986 du maire de Metz la licenciant de son emploi de musicienne contractelle et à la condamnation de la ville de Metz à lui verser la somme de 426 250,68 F avec les intérêts de droit à compter du 25 novembre 1986 ;
- de déclarer illégale la décision de licenciement dont elle a été l'objet et de condamner la commune de Metz à lui payer la somme de 426 250,68 F, augmentée des intérêts de droit à compter du 25 novembre 1986 ;
- d'ordonner la capitalisation des intérêts ;
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu le code des communes ;
Vu la loi n° 84-55 du 26 janvier 1984 ;
Vu les décrets n° 72-512 du 22 juin 1972, 76-1054 du 18 novembre 1976, et 86-83 du 17 janvier 1986 ;
Vu le décret n° 84-1250 du 26 novembre 1985 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Legal, Auditeur,
- les observations de la SCP Célice, Blancpain, avocat de Mmes Monique X... et Ellie Y... et de Me Copper-Royer, avocat de la ville de Metz,
- les conclusions de Mme Laroque, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que les requêtes présentées par Mmes X... et Y... tendant à l'annulation d'un même jugement ; qu'il convient de les joindre pour statuer par une seule décision ;
Sur les conclusions tendant à l'octroi d'une indemnité en réparation du préjudice que les requérantes auraient subi du fait de l'illégalité de la mesure prononçant leur licenciement :
Considérant, d'une part, que Mmes X... et Y... sont en tout état de cause recevables à invoquer l'illégalité fautive de ces mesures à l'appui de leurs conclusions à fin de dommages-intérêts ;
Considérant, d'autre part, qu'à la date du 1er avril 1986 à laquelle leur licenciement a été prononcé, Mmes X... et Y..., musiciennes contractuelles de la ville de Metz, restaient régies par le contrat passé entre chacune d'elles et cette collectivité à compter du 1er mai 1976, renouvelé par accord exprès des parties à compter du 1er mai 1979 et du 1er mai 1982 et tacitement reconduit à compter du 1er mai 1985 pour 3 ans, faute d'avoir été dénoncé par la ville au moins six mois avant le 30 avril 1985 conformément aux stipulations dudit contrat ; que les conditions dans lesquelles aurait été résiliée la convention passée entre la ville de Metz et l'association "Orchestre philharmonique de Lorraine" et mettant les musiciens de la ville à la disposition de cette association sont sans incidence sur la validité des contrats passés entre la ville et ses agents ; que si la ville soutient qu'elle a pu faire application des stipulations de l'article 6 de ces contrats permettant le licenciement pour insuffisance professionnelle, il est constant que les formalités prévues par les articles 28 et 29 du règlement de l'orchestre auquel renvoie cette stipulation n'ont pas été respectées ; que si la ville allègue que les requérantes ont donné leur accord à leur cessation d'activité, ce moyen manque en fait ; qu'enfin, les dispositions de l'article 68 du règlement de l'orchestre philharmonique de Lorraine qui prévoit l'hypothèse d'une réduction des effectifs de cet orchestre ne permettent le licenciement des musiciens qui ne seraient pas maintenus qu'à l'expiration de leurs contrats en cours ; qu'ainsi, Mmes X... et Y... sont fondées à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a jugé légal leur licenciement et rejeté leur demande d'indemnité en réparation de l'illégalité entachant cette mesure ;

Considérant, que, dans les circonstances de l'affaire, il sera fait une juste appréciation du préjudice subi par les requérantes en ayant été illégalement privées de leur rémunération pendant 24 mois en condamnant la ville de Metz à leur verser à chacune d'entre elles une somme de 280 000 F ;
Sur les conclusions relatives à l'indemnité de licenciement, au préavis et aux congés payés :
Considérant qu'en vertu de l'article 69 du règlement du 1er mai 1976 auquel renvoient les contrats tacitement reconduits, le licenciement donne lieu au versement d'une indemnité égale à un mois de traitement par année de présence, le maximum de l'indemnité étant fixé à une année de traitement ; que la différence entre la somme qui aurait dû être versée à ce titre et celle qui a été effectivement versée s'élève à 46 694,52 F pour Mme X... et à 54 476,94 F pour Mme Y... ; que Mmes X... et Y... sont ainsi fondées à demander l'annulation du jugement attaqué dans la mesure où il a rejeté leurs conclusions indemnitaires correspondant au montant de l'indemnité de licenciement ;
Considérant, en revanche, qu'aucune disposition applicable aux requérantes n'imposait que leur fût versée, en dehors de l'hypothèse de la dénonciation aux échéances triennales, une indemnité de préavis de six mois ; qu'enfin aucun texte ni aucun principe général ne reconnaît à l'ensemble des agents publics un droit à une indemnité compensatrice de congé payé dans le cas où l'agent cesse ses services avant d'avoir pu bénéficier de son congé ; que, dès lors, Mmes X... et Y... ne sont pas fondées à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leurs conclusions tendant à l'augmentation de leur indemnité de préavis et à l'octroi d'une indemnité compensatrice de congés payés ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, que la ville de Metz est condamnée à verser à Mme X... la somme de 326 694,52 F augmentée des intérêts au taux légal à compter du 12 juin 1986 et à Mme Y... la somme de 334 476,94 F augmentée des intérêts au taux légal à compter du 25 novembre 1986 ;
Considérant que la capitalisation des intérêts a été demandée le 14 juin 1988 ; qu'à cette date il était dû au moins une année d'intérêts ; qu'il y a, dès lors, lieu de faire droit aux demandes des requérantes ;
Article 1er : Le jugement du 10 décembre 1987 du tribunal administratif de Strasbourg est annulé dans la mesure où il a rejeté les conclusions des demandes de Mmes X... et Y... tendant à la condamnation de la ville de Metz à leur verser une indemnité correspondant à la perte de rémunération subie du fait de leur licenciement illégal et à une revalorisation du montant de leur indemnité de licenciement.
Article 2 : La ville de Metz est condamnée à payer à Mme X... la somme de 326 694,52 F avec intérêts au taux légal à compter du 12 juin 1986 et à Mme Y... la somme de 334 476,94 F avec intérêts au taux légal à compter du 25 novembre 1986. Les intérêts échus respectivement sur chacune de ces sommes le 14 juin 1988 seront capitalisés pour produire eux-mêmes intérêts.
Article 3 : Le surplus des conclusions des requêtes est rejeté.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à Mme Monique X..., à Mme Ellie Y..., au maire de Metz et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : 4 / 1 ssr
Numéro d'arrêt : 95216
Date de la décision : 29/10/1990
Type d'affaire : Administrative

Analyses

COMMUNE - AGENTS COMMUNAUX - CESSATION DE FONCTIONS - LICENCIEMENT - INDEMNITE DE LICENCIEMENT.

COMMUNE - AGENTS COMMUNAUX - CESSATION DE FONCTIONS - LICENCIEMENT - LICENCIEMENT DES AGENTS NON TITULAIRES.

RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - RESPONSABILITE EN RAISON DES DIFFERENTES ACTIVITES DES SERVICES PUBLICS - SERVICES PUBLICS COMMUNAUX.


Publications
Proposition de citation : CE, 29 oct. 1990, n° 95216
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Legal
Rapporteur public ?: Mme Laroque

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1990:95216.19901029
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