Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 19 octobre 1987 et 19 février 1988 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour le syndicat national des industriels de l'alimentation animale (SNIA), dont le siège est ... ; le syndicat national des industriels de l'alimentation animale demande l'annulation pour excès de pouvoir du décret n° 87-676 du 17 août 1987 relatif à la taxe parafiscale de stockage du secteur céréalier ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu l'ordonnance n° 59-2 du 2 janvier 1959 portant loi organique relative aux lois de finances ;
Vu la loi n° 86-19 du 6 janvier 1986 relative à l'abaissement à soixante ans de l'âge de la retraite des personnes non salariées des professions agricoles, et notamment son article 21 ;
Vu la sixième directive du conseil des communautés européennes en date du 17 mai 1977 ;
Vu le règlement n° 2727/75 du conseil des communautés européennes du 29 octobre 1975 modifié par le règlement n° 1579/86 du 23 mai 1986 et les règlements pris pour son application ;
Vu le code général des impôts ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Lambron, Maître des requêtes,
- les observations de Me Capron, avocat de la syndicat NATIONAL DES industriels de l'alimentation animale (SNIA),
- les conclusions de Mme Hagelsteen, Commissaire du gouvernement ;
Sur le moyen tiré de l'irrégularité de la consultation du Conseil d'Etat :
Considérant qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article 9 du décret du 30 juillet 1963 : "Les affaires ressortissant aux différents départements ministériels sont réparties entre les sections administratives du Conseil d'Etat conformément aux dispositions d'un arrêté du Premier ministre, pris sur la proposition du Garde des sceaux, ministre de la justice" ; qu'en vertu de l'arrêté du 28 octobre 1986, les affaires dépendant du ministère de l'agriculture sont examinées par la section des travaux publics ; que l'institution d'une taxe parafiscale de stockage du secteur céréalier est une affaire dépendant du ministère de l'agriculture au sens des dispositions susrappelées ; que le décret attaqué, qui institue ladite taxe, a été, par suite, légalement examiné par la seule section des travaux publics du Conseil d'Etat ;
Sur les moyens tirés de la violation de l'ordonnance du 2 janvier 1959 portant loi organique relative aux lois de finances :
Considérant, d'une part, qu'aux termes du I de l'article 21 de la loi du 6 janvier 1986 susvisée, l'Office national interprofessionnel des céréales est un établissement public à caractère industriel et commercial ; que, par suite, le moyen tiré de ce que le décret attaqué instituerait une taxe parafiscale au profit d'un établissement public administratif et méconnaîtrait par là-même les dispositions de l'article 4 de l'ordonnance du 2 janvier 1959 suivant lesquelles les taxes parafiscales sont perçues au profit d'une personne morale de droit public ou privé autre que l'Etat, les collectivités territoriales et leurs établissements publics administratifs, manque en fait ;
Considérant, d'autre part, que les dépenses couvertes par le produit de la taxe parafiscale de stockage du secteur céréalier s'inscrivent dans le cadre des interventions prévues par le règlement du Conseil des communautés européennes en date du 29 octobre 1975 modifié, portant organisation commune des marchés dans le secteur des céréales, et dont l'Office national interprofessionnel des céréales est chargé en France d'assurer la mise en oeuvre ; qu'ainsi cette taxe est perçue dans un intérêt économique ou social au sens de l'article 4 de l'ordonnance du 2 janvier 1959 précitée ;
Sur le moyen tiré de la violation de l'article 267 du code général des impôts :
Considérant que ce moyen n'est pas assorti de précisions suffisantes pour permettre d'en apprécier le bien-fondé ;
Sur le moyen tiré de la violation de l'article 33 de la 6ème directive du Conseil des communautés européennes en date du 17 mai 1977 :
Considérant que selon cet article, les dispositions de la 6ème directive du Conseil des communautés européennes "ne font pas obstacle au maintien ou à l'introduction par un Etat membre ... de tous impôts, droits et taxes n'ayant pas le caractère de taxes sur le chiffre d'affaires" ; que la taxe parafiscale de stockage, dont le montant est fixé par tonne de céréales et qui n'est appliquée qu'une seule fois, au stade de la rétrocession, de la mise en oeuvre ou de l'importation, ne peut être regardée comme un impôt général grevant la circulation des biens et services et frappant les transactions commerciales d'une façon comparable à une taxe sur le chiffre d'affaires ; que, par suite, le syndicat requérant n'est pas fondé à soutenir que le décret attaqué méconnaît les dispositions précitées de la 6ème directive ;
Sur le moyen tiré de la rétroactivité du décret :
Considérant que compte tenu des conditions particulières dans lesquelles s'exercent les activités agricoles, les dispositions réglementaires fixant le régime applicable à un produit agricole pour une campagne déterminée doivent nécessairement produire effet pour l'ensemble de la campagne considérée ; qu'il en va ainsi notamment des dispositions réglementaires instituant une taxe parafiscale sur un produit agricole ; que, dès lors, le Gouvernement pouvait légalement prévoir par le décret attaqué, en date du 17 août 1987, que la perception de la taxe parafiscale de stockage était autorisée dès la campagne de commercialisation 1987-1988, ladite campagne commençant le 1er juillet 1987 ;
Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que le syndicat national des industriels de l'alimentation animale n'est pas fondé à soutenir que le décret attaqué est entaché d'illégalité ;
Article 1er : La requête du syndicat national des industriels de l'alimentation animale est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée au syndicat national des industriels de l'alimentation animale, à l'Office national interprofessionnel des céréales, au ministre de l'agriculture et de la forêt et au ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et du budget et au Premier ministre.