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09/11/1990 | FRANCE | N°81285

France | France, Conseil d'État, 3 / 5 ssr, 09 novembre 1990, 81285


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 18 août 1986 et 18 décembre 1986 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mme Michèle X..., demeurant "La Fontaine des Epousées", Bulgnéville à Contrexeville (88140), Mme X... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 19 juin 1986 par lequel le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de la décision implicite du maire de Bulgnéville, refusant de lui accorder une indemnité à la suite de son licenciement après suppressio

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Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 18 août 1986 et 18 décembre 1986 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mme Michèle X..., demeurant "La Fontaine des Epousées", Bulgnéville à Contrexeville (88140), Mme X... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 19 juin 1986 par lequel le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de la décision implicite du maire de Bulgnéville, refusant de lui accorder une indemnité à la suite de son licenciement après suppression de l'emploi de secrétaire général de mairie par la commune, d'autre part, à la condamnation de la commune de Bulgnéville à lui verser la somme de 95 967,78 F, avec intérêts de droit et la capitalisation des intérêts ;
2°) d'annuler la décision implicite de refus ci-dessus analysée du maire de Bulgnéville ;
3°) de condamner la commune de Bulgnéville à lui verser la somme de 95 967,78 F avec les intérêts de droit à compter du 15 septembre 1984 et les intérêts capitalisés ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des communes et notamment ses articles L.416-9, L.416-10 et L.416-11 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Labarre, Conseiller d'Etat,
- les observations de la S.C.P. Desaché, Gatineau, avocat de Mme Michèle X... et de la S.C.P. Lesourd, Baudin, avocat de la commune de Bulgnéville,
- les conclusions de M. Pochard, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 416-11 du code des communes, en vigueur à la date de licenciement de Mme X... prononcé par arrêté du 10 novembre 1983 : "L'agent titulaire, dont l'emploi a été supprimé et qui ne peut être affecté à un emploi équivalent, reçoit une indemnité en capital égale à un mois de traitement par année de service, à moins de remplir, au moment du licenciement, les conditions exigées pour avoir droit à une pension de retraite proportionnelle avec jouissance immédiate." ; qu'il résulte de la disposition précitée, combinée avec celle de l'article L. 416-10 du même code, que le législateur a entendu instituer un droit à indemnité de licenciement au profit de tous les fonctionnaires communaux licenciés à la suite de suppression d'emploi qui, ne pouvant prétendre à une retraite proportionnelle avec jouissance immédiate, n'auraient pu être affectés à des emplois équivalents dans les cadres de la commune même dont ils étaient les agents ;
Considérant qu'il est constant que Mme X..., qui ne réunissait pas les conditions exigées pour avoir droit à une retraite proportionnelle avec jouissance immédiate, n'a pas été affectée, à la suite de son licenciement provoqué par la suppression de l'emploi de secrétaire général de la commune de Bulgnéville dont elle était titulaire, à un autre emploi de ladite commune ; que, par suite, c'est à tort que le tribunal administratif s'est fondé sur la circonstance qu'elle avait été reclassée dans un emploi similaire d'une autre commune du même département pour rejeter sa demande ;

Considérant toutefois qu'il appartient au Conseil d'Etat saisi de l'ensemble du litige, par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par Mme X... devant le tribunal administratif de Nancy ;
Considérant que, par un jugement en date du 28 juin 1984, le même tribunal administratif a, d'une part, rejeté la demande de Mme X... en tant qu'elle tendait à l'annulation de la délibération du conseil municipal de Bulgnéville en date du 12 avril 1983 portant suppression de son emploi pour raison d'économie, et, d'autre part, annulé l'arrêté du maire de Bulgnéville, licenciant l'intéressée de son emploi, en application de ladite délibération ; que ce jugement est devenu définitif ; que Mme X... qui, à la suite de ce jugement ne pouvait être regardée comme licenciée, ne pouvait donc prétendre au bénéfice de l'indemnité prévue par l'article L. 416-11 susrappelé du code des communes ;
Considérant cependant, qu'en ne prenant aucune décision pour régulariser la situation de ce fonctionnaire communal, comme il était tenu de le faire à la suite du jugement du tribunal administratif de Nancy en date du 28 juin 1984, le maire de Bulgnéville a commis une faute de nature à engager la responsabilité de la commune à l'égard de Mme X... ; qu'il sera fait une juste appréciation du préjudice qui en est résulté pour l'intéressée, en condamnant la commune de Bulgnéville à payer à Mme X..., une indemnité de 40 000 F ;
Sur les intérêts :

Considérant que Mme X... a droit aux intérêts de la somme de 40 000 F à compter du jour de la réception par le maire de Bulgnéville de sa demande, soit le 15 septembre 1984 ;
Sur les intérêts des intérêts :
Considérant que la capitalisation des intérêts a été demandée le 18 août 1986 ; qu'à cette date, il était dû au moins une année d'intérêts ; que, dès lors, conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil, il y a lieu de faire droit à cette demande ;

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nancy en date du 19 juin 1986, ensemble la décision du maire de Bulgnéville en date du 15 septembre 1984 sont annulés.
Article 2 : La commune de Bulgnéville est condamnée à verser à Mme X... la somme de 40 000 F, avec intérêts au taux légal à compter du 15 septembre 1984. Les intérêts échus le 18 août 1986 seront capitalisés à cette date pour produire eux-mêmes intérêts.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme X... est rejeté.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à Mme X..., à la commune de Bulgnéville et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : 3 / 5 ssr
Numéro d'arrêt : 81285
Date de la décision : 09/11/1990
Type d'affaire : Administrative

Analyses

COMMUNE - AGENTS COMMUNAUX - EMPLOIS COMMUNAUX - SUPPRESSION D'EMPLOIS.

COMMUNE - AGENTS COMMUNAUX - CESSATION DE FONCTIONS - LICENCIEMENT - INDEMNITE DE LICENCIEMENT.

RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - FAITS SUSCEPTIBLES OU NON D'OUVRIR UNE ACTION EN RESPONSABILITE - AGISSEMENTS ADMINISTRATIFS SUSCEPTIBLES D'ENGAGER LA RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE.


Références :

Arrêté du 10 novembre 1983
Code civil 1154
Code des communes L416-11, L416-10


Publications
Proposition de citation : CE, 09 nov. 1990, n° 81285
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Labarre
Rapporteur public ?: Pochard

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1990:81285.19901109
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