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14/11/1990 | FRANCE | N°58041

France | France, Conseil d'État, 7 / 9 ssr, 14 novembre 1990, 58041


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat les 29 mars 1984 et 20 juin 1984, présentés pour M. Alfred X..., demeurant ... ; M. X... demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du 19 janvier 1984 en tant que par ce jugement, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande en décharge des suppléments d'impôt sur le revenu auxquels il a été assujetti au titre des années 1973 à 1976 ;
2°) prononce la décharge des impositions contestées ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu

le code général des impôts ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des c...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat les 29 mars 1984 et 20 juin 1984, présentés pour M. Alfred X..., demeurant ... ; M. X... demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du 19 janvier 1984 en tant que par ce jugement, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande en décharge des suppléments d'impôt sur le revenu auxquels il a été assujetti au titre des années 1973 à 1976 ;
2°) prononce la décharge des impositions contestées ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Zémor, Conseiller d'Etat,
- les observations de Me Choucroy, avocat de M. X...,
- les conclusions de M. Fouquet, Commissaire du gouvernement ;

Sur le moyen tiré de l'irrégularité de la procédure d'imposition suivie à l'encontre de la société "Delta" :
Considérant que, pour soutenir que l'administration ne pouvait fonder le rehaussement de son revenu global sur les constatations faites à l'occasion de la vérification de comptabilité de la société "Delta", M. X... se prévaut de l'irrégularité dont serait entachée, selon lui, la procédure d'imposition suivie à l'encontre de cette société ; que, toutefois, un tel moyen est inopérant au regard des impositions personnelles établies au nom de ce contribuable ;
Sur la charge de la preuve :
Considérant qu'il résulte de l'instruction que les sommes qui ont été retenues pour l'assiette de l'impôt sur les sociétés dû par la société "Delta" au titre des années 1974 à 1976 ont fait l'objet d'impositions à l'égard de cette société ; qu'en réponse à la demande présentée par l'administration en application des dispositions de l'article 117 du code général des impôts, M. X..., associé majoritaire, a déclaré être lui-même le bénéficiaire, à concurrence de la moitié de leur montant, des revenus qui seraient considérés comme distribués à la suite des redressements susmentionnés, par deux lettres en date du 29 décembre 1978 et du 27 août 1979 qu'il a signées conjointement avec Mme Y..., gérante de la société "Delta" ; que si l'administration établit ainsi que le requérant doit être regardé comme ayant appréhendé les bénéfices réputés distribués par la société "Delta", cette circonstance ne la dispense pas d'apporter la preuve de l'existence et du montant de ces distributions dès lors, en effet, que l'intéressé a exprimé son refus d'accepter les redressements découlant de leur rattachement à ses revenus globaux ;

Sur le bien-fondé de l'imposition :
Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction que la comptabilité de la société à responsabilité limitée "Delta" présentait, pour les années soumises à vérification, des omissions répétées d'enregistrement des recettes avec une absence presque totale de pièces justificatives des ventes ainsi que de graves erreurs relatives à la comptabilisation des achats ; que ces irrégularités étaient de nature à oter à sa comptabilité tout caractère probant ; que l'administration était dès lors en droit de procéder à la reconstitution extra-comptable des résultats des exercices litigieux ;
Considérant, en second lieu, que, pour déterminer les bénéfices de la société "Delta", le vérificateur, faute de comptabilité probante, a reconstitué d'un côté les achats par totalisation des factures présentées et, d'un autre, les recettes de la société dont les ventes étaient presque exclusivement faites à crédit, à partir des dossiers de crédit, d'une part, et en tenant compte, d'autre part, des acomptes versés par les clients ; que si M. X... prétend que le vérificateur aurait opéré un tri arbitraire entre les pièces qui lui ont été communiquées, il n'apporte aucune justification à l'appui de cette allégation ; qu'il ne saurait, pour critiquer la méthode suivie par le vérificateur, faire état, sans même la produire, d'une comptabilité reconstituée par un cabinet d'expertise comptable postérieurement à la vérification de la société "Delta" ;
Considérant toutefois que le vérificateur a rejeté les déductions opérées directement sur les ventes des créances considérées par la société comme irrécupérables dès lors, en effet, que l'incertitude quant à leur règlement définitif ne pouvait à ce stade être constatée que par voie de provision ; que l'administration, n'établit pas que les rehaussements de bénéfices résulant de l'imputation à l'actif du bilan de la société "Delta" des créances considérées par celle-ci comme irrécupérables ont correspondu à l'appréhension par M. X..., de revenus distribués à concurrence du montant de ces créances ; que le requérant est, par suite, fondé à demander la réduction des bases des suppléments d'impôt sur le revenu litigieux à concurrence de la moitié des montants de ces créances qui s'élèvent, ainsi qu'il ressort des pièces du dossier à 101 790 F pour 1974, 89 389 F pour 1975 et 119 167 F pour 1976 et la réformation en ce sens du jugement du tribunal administratif de Toulouse ;
Article 1er : Les bases d'imposition à l'impôt sur le revenu de M. X... sont réduites de 50 895 F pour 1974, 44 695 F pour 1975, 59 584 F pour 1976.
Article 2 : M. X... est déchargé de la différence entre les cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 1974 à 1976 et celles qui ressortent de l'application de l'article 1er de la présente décision.
Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de Toulouse en date du 19 janvier 1984 est réformé en ce qu'il a de contraire à la présente décision.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. X... est rejeté.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. X... et au ministre délégué auprès du ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et du budget, chargé du budget.


Synthèse
Formation : 7 / 9 ssr
Numéro d'arrêt : 58041
Date de la décision : 14/11/1990
Sens de l'arrêt : Réduction
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

- RJ1 CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOTS SUR LES REVENUS ET BENEFICES - REVENUS ET BENEFICES IMPOSABLES - REGLES PARTICULIERES - REVENUS DES CAPITAUX MOBILIERS ET ASSIMILABLES - REVENUS DISTRIBUES - NOTION DE REVENUS DISTRIBUES - Absence - Rehaussement du bénéfice de la société ne correspondant pas à l'appréhension de revenus distribués (1).

19-04-02-03-01-01-02 La circonstance que le contribuable, associé majoritaire de la société, a déclaré être lui-même le bénéficiaire des revenus qui seraient considérés comme distribués, ne dispense pas l'administration d'apporter la preuve de l'existence et du montant de ces distributions, dès lors que l'intéressé a refusé le redressement de son revenu.

CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOTS SUR LES REVENUS ET BENEFICES - REVENUS ET BENEFICES IMPOSABLES - REGLES PARTICULIERES - REVENUS DES CAPITAUX MOBILIERS ET ASSIMILABLES - REVENUS DISTRIBUES - NOTION DE REVENUS DISTRIBUES - IMPOSITION PERSONNELLE DU BENEFICIAIRE - Charge de la preuve - Preuve incombant à l'administration - Contribuable s'étant désigné lui-même comme bénéficiaire mais ayant refusé le redressement.

19-04-02-03-01-01 Le redressement imposé à la société provient de ce que la société a indûment déduit du montant de ses ventes des créances considérées comme irrécupérables alors que l'incertitude quant à leur règlement définitif ne pouvait à ce stade être constatée que par voie de provision. L'administration n'établit pas que les rehaussements de bénéfices résultant de l'imputation de ces créances à l'actif du bilan de la société ont correspondu à l'appréhension par le contribuable, associé majoritaire de la société, de revenus distribués.


Références :

CGI 117

1. Plénière 1984-12-05, Etienvre, p. 403 ;

1989-09-29, 75303, Venutolo


Publications
Proposition de citation : CE, 14 nov. 1990, n° 58041
Publié au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Rougevin-Baville
Rapporteur ?: M. Zémor
Rapporteur public ?: M. Fouquet
Avocat(s) : Me Choucroy, Avocat

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1990:58041.19901114
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