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21/01/1991 | FRANCE | N°100115

France | France, Conseil d'État, 3 / 5 ssr, 21 janvier 1991, 100115


Vu 1°), sous le n° 100 115, la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 18 juillet 1988 et le 18 novembre 1988, présentés pour la COMMUNE DE SOLLIES-PONT (Var) représentée par son maire en exercice à ce dûment habilité par une délibération du conseil municipal de ladite commune en date du 30 janvier 1989 ; la COMMUNE DE SOLLIES-PONT demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du 20 mai 1988 par lequel le tribunal administratif de Nice l'a condamnée à verser à M. Roger X... la somme de 200

000 F avec intérêts de droit en réparation du préjudice résultant de l...

Vu 1°), sous le n° 100 115, la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 18 juillet 1988 et le 18 novembre 1988, présentés pour la COMMUNE DE SOLLIES-PONT (Var) représentée par son maire en exercice à ce dûment habilité par une délibération du conseil municipal de ladite commune en date du 30 janvier 1989 ; la COMMUNE DE SOLLIES-PONT demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du 20 mai 1988 par lequel le tribunal administratif de Nice l'a condamnée à verser à M. Roger X... la somme de 200 000 F avec intérêts de droit en réparation du préjudice résultant de la transformation de son service à temps plein, en qualité de moniteur d'éducation physique et sportive, en un service à temps partiel ;
2°) rejette la demande présentée par M. Roger X... ;
3°) à titre subsidiaire, ramène le montant de la condamnation encourue par la commune à la somme maximale de 10 000 F ;
Vu 2°), sous le n° 100 595, la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés le 2 août 1988 et le 2 décembre 1988, présentés pour M. X..., demeurant ... ; M. X... demande que le Conseil d'Etat :
1°) réforme le jugement du 20 mai 1988 par lequel le tribunal administratif de Nice a condamné la commune de Solliès-Pont à lui verser une indemnité de 200 000 F avec intérêts de droit, qu'il estime insuffisante, en réparation du préjudice résultant de la transformation de son service à temps plein, en qualité de moniteur d'éducation physique et sportive, en un service à temps partiel ;
2°) condamne la commune de Solliès-Pont à lui verser la somme de 861 264 F ainsi que les intérêts et les intérêts des intérêts ;
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu le code des communes ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de Mme Sophie Bouchet, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Boré, Xavier, avocat de la VILLE DE SOLLIES-PONT et de la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocat de M. Roger X...,
- les conclusions de M. Toutée, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que les requêtes de la COMMUNE DE SOLLIES-PONT et de M. X... sont dirigées contre le même jugement du tribunal administratif de Nice en date du 20 mai 1988 ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;
Sur la recevabilité de la demande de première instance de M. X... :
Considérant, d'une part, que, contrairement à ce que soutient la COMMUNE DE SOLLIES-PONT, la demande présentée au tribunal administratif de Nice par M. X... le 18 septembre 1987 répond aux conditions posées par les dispositions de l'article R. 77 du code des tribunaux administratifs alors en igueur ; que la circonstance que M. X... n'ait pas invoqué l'illégalité de la délibération du 25 octobre 1983 dans sa demande de première instance est sans incidence sur la recevabilité de sa demande d'indemnité dès lors que M. X... avait fondé sa demande sur la faute qu'aurait constituée l'illégalité de l'arrêté du 30 octobre 1983 pris en application de cette délibération ;
Considérant, d'autre part, que le fait que M. X... n'ait pas contesté dans le délai du recours contentieux l'arrêté du 30 octobre 1983, le nommant dans l'emploi de moniteur municipal d'éducation physique et sportive précédemment transformé par la délibération du 25 octobre 1983 du conseil municipal de Solliès-Pont n'était pas de nature à rendre irrecevable son recours en indemnité fondé notamment sur l'illégalité dudit arrêté, dès lors que cette décision n'avait pas un objet exclusivement pécuniaire ;
Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant que le moyen tiré de ce que les visas du jugement attaqué feraient une mention incomplète des productions des parties devant le tribunal administratif manque en fait ; que, contrairement à ce que soutient la commune, le jugement attaqué est suffisamment motivé ;
Au fond :
Sur la responsabilité de la commune :
Considérant, en premier lieu, que par une décision du 10 décembre 1986, le Conseil d'Etat statuant au contentieux a annulé l'arrêté du 9 avril 1982 en tant que celui-ci prévoyait que M. X... serait astreint à effectuer, au titre de son emploi de moniteur municipal d'éducation physique et sportive, trois heures de travaux annexes, consistant notamment en des activités de peinture et de désherbage ;
Considérant, en second lieu, que par les arrêtés des 24 août 1982, 13 septembre 1983 et 13 octobre 1983, le maire de la COMMUNE DE SOLLIES-PONT a infligé plusieurs sanctions disciplinaires à M. X... ; que la commune n'établit pas que, préalablement à l'intervention de chacune de ces sanctions, M. X... ait été mis à même de demander communication de son dossier ; que, dans ces conditions, lesdites sanctions sont entachées d'illégalité pour avoir été prises selon une procédure irrégulière ;
Considérant, enfin, qu'en transformant, par délibération en date du 25 octobre 1983, l'emploi permanent à temps plein de moniteur municipal d'éducation physique et sportive qu'occupait M. X... en emploi à temps non complet, le conseil municipal de la COMMUNE DE SOLLIES-PONT a, parallèlement à une augmentation d'une heure de la durée hebdomadaire de ses obligations de service, portée de 26 h à 27 h, diminué, par suppression du coefficient multiplicateur antérieurement appliqué pour la prise en compte des heures de préparation, la rémunération de l'intéressé ; qu'il ressort des pièces du dossier que, nonobstant le motif d'économies budgétaires allégué par la commune, la délibération susmentionnée avait pour but d'inciter l'intéressé à présenter sa démission et qu'elle est ainsi, de même que l'arrêté en date du 30 octobre 1983 pris en application de cette délibération, entachée de détournement de pouvoir ;

Considérant que l'illégalité de l'arrêté du 9 avril 1982, des arrêtés des 24 août 1982, 13 septembre 1983 et 13 octobre 1983 infligeant diverses sanctions à M. X..., de la délibération du 25 octobre 1983 et de l'arrêté du 30 octobre 1983 ont constitué des fautes de nature à engager la responsabilité de la COMMUNE DE SOLLIES-PONT à l'égard de M. X... ;
Sur le préjudice subi par M. X... :
Considérant que M. X... a subi un préjudice moral du fait de l'arrêté du 9 avril 1982, annulé pour excès de pouvoir par une décision du Conseil d'Etat statuant au Contentieux, en date du 10 décembre 1986, et des arrêtés des 24 août 1982, 13 septembre 1983 et 13 octobre 1983 lui infligeant irrégulièrement diverses sanctions disciplinaires ; que, dans les circonstances de l'affaire et alors que la COMMUNE DE SOLLIES-PONT n'établit pas que le comportement de M. X... ait présenté un caractère fautif pouvant justifier le prononcé de sanctions disciplinaires, il sera fait une exacte appréciation de ce chef de préjudice en l'évaluant à 30 000 F ;
Considérant que si la délibération du 25 octobre 1983 et l'arrêté du 30 octobre 1983 ont illégalement privé M. X... d'une partie de son traitement en transformant son emploi à temps complet en emploi à temps non complet, le requérant, en l'absence de service fait, ne peut prétendre au rappel de son traitement, mais est fondé à demander à la COMMUNE DE SOLLIES-PONT la réparation du préjudice qu'il a réellement subi ; qu'en premier lieu, en ce qui concerne les pertes de rémunération et alors qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la réduction de la durée de service imposée par la COMMUNE DE SOLLIES-PONT ait permis à M. X... de se livrer à d'autres activités rémunérées, il sera fait une juste appréciation de ce chef de préjudice en l'évaluant à 120 000 F ; qu'en second lieu, il résulte de l'instruction qu'il sera fait une juste appréciation du préjudice résultant pour M. X... de ce que la diminution de sa rémunération à la suite de la transformation de l'emploi qu'il occupait ne lui a pas permis de constituer les droits à pension auxquels il aurait pu prétendre s'il avait continué à assurer ses fonctions dans un emploi permanent à temps complet en l'évaluant à 50 000 F ;

Considérant, en revanche, que, s'agissant de préjudices qui présentent un caractère éventuel et incertain, M. X... ne saurait prétendre à être indemnisé ni au titre des heures supplémentaires dont il aurait été privé à partir d'octobre 1983, ni à celui de la perte de revenus qu'il subirait jusqu'au jour de sa mise à la retraite ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède qu'il y a lieu de rejeter les conclusions de la commune et celles de M. X... en ce qui concerne le montant de l'indemnité ;
Sur les intérêts des intérêts :
Considérant que M. X... a demandé les 2 août 1988 et 27 septembre 1989 la capitalisation des intérêts afférents à l'indemnité ; qu'à chacune de ces dates, le jugement attaqué n'ayant pas encore été exécuté, il était dû sur la totalité du montant de l'indemnité au moins une année d'intérêts ; que, dès lors, conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil, il y a lieu de faire droit à ces demandes ;
Article 1er : Les intérêts de la somme que la COMMUNE DE SOLLIES-PONT a été condamnée à verser à M. X... échus les 2 août 1988 et 27 septembre 1989 seront capitalisés à ces dates pour produire eux-mêmes intérêt.
Article 2 : La requête de la COMMUNE DE SOLLIES-PONT et le surplus des conclusions de la requête de M. X... sont rejetés.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à la COMMUNE DE SOLLIES-PONT, à M. X... et au ministre de l'intérieur.


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