Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 7 avril 1983 et 8 août 1983 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la société anonyme SCURI PERE ET FILS, dont le siège social est à Piney (10220), agissant par ses co-représentants légaux ; la SOCIETE SCURI PERE ET FILS demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement en date du 8 février 1983 par lequel le tribunal administratif de Châlons-sur-Marne a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'institution interdépartementale des barrages réservoirs du bassin de la Seine à lui verser la somme de 20 000 000 F en réparation du préjudice subi lors de la mise en eau du barrage-réservoir Aube ;
2°) de condamner l'institution interdépartementale des barrages réservoirs du bassin de la Seine à lui verser ladite somme ainsi que les dépens ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de Mme Maugüé, Auditeur,
- les observations de Me Gauzès, avocat de la SOCIETE SCURI PERE ET FILS et de Me Foussard, avocat de l'Institution interdépartementale des barrages réservoirs du bassin de la Seine,
- les conclusions de M. Fornacciari, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que la mise en eau du barrage-réservoir Aube supprimera un massif forestier de 2 000 hectares où la SOCIETE SCURI PERE ET FILS, qui exerce l'activité d'exploitant forestier et possède une importante scierie à Piney (Aube), s'approvisionne en bois ; qu'il résulte du rapport d'expertise joint au dossier que la SOCIETE SCURI PERE ET FILS ne s'est approvisionnée dans les forêts appelées à disparaître que pour 24 % de ses achats pendant la période de 1971 à 1978 ; que la circonstance que la disparition de ce massif obligera la société à s'approvisionner sur des coupes plus éloignées n'est pas de nature à occasionner à celle-ci un préjudice anormal dès lors qu'elle n'établit ni que son activité s'en trouvera réduite dans une proportion importante ni que son bénéfice diminuera notablement du fait d'un renchérissement de ses coûts d'approvisionnement ; qu'il existe d'ailleurs à proximité de la scierie d'autres forêts de bonne qualité, constituées en partie de chênes, essence exploitée par la SOCIETE SCURI PERE ET FILS et qui sont susceptibles de fournir de nouvelles sources d'approvisionnement pour la société ; que le préjudice dont elle se plaint ne présente donc pas de caractère anormal et spécial ; que, dès lors, la SOCIETE SCURI PERE ET FILS n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-sur-Marne a rejeté sa demande d'indemnité ;
Article 1er : a requête de la SOCIETE SCURI PERE ET FILS est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE SCURI PERE ET FILS, à l'Institution interdépartementale des barrages réservoirs du bassin de la Seine et au ministre de l'agriculture et de la forêt.