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18/02/1991 | FRANCE | N°84631

France | France, Conseil d'État, 1 / 4 ssr, 18 février 1991, 84631


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat les 26 janvier 1987 et 4 mai 1987, présentés pour la société à responsabilité limitée Agen coiffure, dont le siège est ... ; la société à responsabilité limitée Agen coiffure demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 27 novembre 1986 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté du 15 novembre 1983 par lequel le préfet, commissaire de la République du département du Lot-et-Garonne a prescrit

la fermeture des salons de coiffure le lundi dans toute l'étendue du départe...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat les 26 janvier 1987 et 4 mai 1987, présentés pour la société à responsabilité limitée Agen coiffure, dont le siège est ... ; la société à responsabilité limitée Agen coiffure demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 27 novembre 1986 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté du 15 novembre 1983 par lequel le préfet, commissaire de la République du département du Lot-et-Garonne a prescrit la fermeture des salons de coiffure le lundi dans toute l'étendue du département du Lot-et-Garonne ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté préfectoral ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du travail ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. de la Ménardière, Maître des requêtes,
- les observations de Me Choucroy, avocat de la société à responsabilité limitée Agen coiffure,
- les conclusions de M. Hubert, Commissaire du gouvernement ;

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :
Considérant qu'aux termes de l'article L.221-4 du code du travail : "Le repos hebdomadaire doit avoir une durée minimale de vingt-quatre heures consécutives", et que, selon l'article L.221-5 : "Le repos hebdomadaire doit être donné le dimanche" ; qu'en vertu de l'article L.221-17 du même code lorsqu'un accord est intervenu entre les syndicats d'employeurs et de travailleurs d'une profession et d'une région déterminées sur les conditions dans lesquelles le repos hebdomadaire est donné au personnel suivant un des modes prévus par les articles L.221-5-1 à L.221-1-7, le préfet du département peut, par arrêté, sur la demande des syndicats intéressés, ordonner la fermeture au public des établissements de la profession ou de la région pendant toute la durée de ce repos ; que, sur le fondement de ces dernières dispositions et au vu d'un accord intervenu le 7 novembre 1983 entre le syndicat unifié des maîtres-artisans coiffeurs du Lot-et-Garonne et trois syndicats de salariés, le préfet, commissaire de la République du département de Lot-et-Garonne, saisi d'une demande des syndicats susmentionnés, a, par l'arrêté litigieux en date du 15 novembre 1983, prescrit que, dans toute l'étendue du département, les salons de coiffure devraient être "fermés au public le lundi, jour fixé pour le repos hebdomadaire du personnel" ;
Considérant que, si les articles L.221-4 et L.221-5 précités du code du travail ne font pas obstacle à ce que l'employeur accorde à son personnel un repos hebdomadaire supérieur à 24 heures, les articles L.221-5-1 et suivants ont seulement pour but de prévoir les diverses modalités selon lesquelles le repos minimum de 24 heures doit être donné ; qu'il résulte de l'article L.221-17 précité que la fermeture obligatoire qu'il prévoit ne peut être imposée par le préfet que pendant la durée dudit repos minimum ;

Considérant qu'il ressort clairement de ses termes mêmes que l'accord syndical susmentionné du 7 novembre 1983 avait pour objet, non de fixer au lundi le jour du repos hebdomadaire dans les salons de coiffure du département, par dérogation à la règle du repos dominical, mais d'accorder aux membres de la profession, en sus du dimanche, un jour de repos supplémentaire le lundi et de demander au préfet d'ordonner la fermeture obligatoire de tous les salons de coiffure le lundi ; qu'en donnant suite à cette demande par l'arrêté litigieux, alors que le lundi n'était pas le jour où était donné le repos hebdomadaire dans la profession en cause, le préfet, commissaire de la République de Lot-et-Garonne, a excédé les pouvoirs qu'il tient de l'article L. 221-17 du code du travail ; que, par suite, la société à responsabilité limitée Agen coiffure est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté préfectoral du 15 novembre 1983 ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Bordeaux en date du 27 novembre 1986 et l'arrêté du préfet, commissaire de la République du département de Lot-et-Garonne en date du 15 novembre 1983 sont annulés.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la société à responsabilité limitée Agen coiffure et au ministre du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle.


Synthèse
Formation : 1 / 4 ssr
Numéro d'arrêt : 84631
Date de la décision : 18/02/1991
Sens de l'arrêt : Annulation
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Recours pour excès de pouvoir

Analyses

66-03-02-02 TRAVAIL ET EMPLOI - CONDITIONS DE TRAVAIL - REPOS HEBDOMADAIRE - FERMETURE HEBDOMADAIRE DES ETABLISSEMENTS (ARTICLE L.221-17 DU CODE DU TRAVAIL) -Fermeture obligatoire ne pouvant être imposée que pendant la durée de repos minimum.

66-03-02-02 Si les articles L.221-4 et L.221-5 du code du travail ne font pas obstacle à ce que l'employeur accorde à son personnel un repos hebdomadaire supérieur à 24 heures, les articles L.221-5-1 et suivants ont seulement pour but de prévoir les diverses modalités selon lesquelles le repos minimum de 24 heures doit être donné. Il résulte de l'article L.221-17 du même code que la fermeture obligatoire qu'il prévoit ne peut être imposée par le préfet que pendant la durée dudit repos minimum. Préfet ayant, sur le fondement de ces dernières dispositions et au vu d'un accord intervenu entre le syndicat unifié des maîtres-artisans coiffeurs et trois syndicats de salariés, prescrit par arrêté que, dans toute l'étendue du département, les salons de coiffure devraient être "fermés au public le lundi, jour fixé pour le repos hebdomadaire du personnel". Il ressort clairement de ses termes mêmes que l'accord syndical susmentionné avait pour objet, non de fixer au lundi le jour du repos hebdomadaire dans les salons de coiffure du département, par dérogation à la règle du repos dominical, mais d'accorder aux membres de la profession, en sus du dimanche, un jour de repos supplémentaire le lundi et de demander au préfet d'ordonner la fermeture obligatoire de tous les salons de coiffure le lundi. En donnant suite à la demande dont il était saisi par les syndicats, alors que le lundi n'était pas le jour où était donné le repos hebdomadaire dans la profession en cause, le préfet a excédé les pouvoirs qu'il tient de l'article L.221-17 du code du travail. Par suite, annulation de cette décision.


Références :

Code du travail L221-4, L221-5, L221-17, L221-5-1 à L221-1-7, L221-5-1


Publications
Proposition de citation : CE, 18 fév. 1991, n° 84631
Publié au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : Mme Bauchet
Rapporteur ?: M. de La Ménardière
Rapporteur public ?: M. Hubert
Avocat(s) : Me Choucroy, Avocat

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1991:84631.19910218
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