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27/02/1991 | FRANCE | N°71146

France | France, Conseil d'État, 7 / 9 ssr, 27 février 1991, 71146


Vu la requête, enregistrée le 5 août 1985 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par la SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE RASPAIL 226, représentée par son gérant ; la société demande au Conseil d'Etat :
1° d'annuler le jugement du tribunal administratif de Paris en date du 13 mai 1985 en tant que, par ce jugement, le tribunal, après avoir décidé que le montant des droits assignés en principal à la société requérante devait être réduit à 93 728 F, a rejeté le surplus de ses conclusions, lesquelles tendaient à la décharge complète du complément de pr

lèvement sur les profits de construction auquel elle a été assujettie par avis...

Vu la requête, enregistrée le 5 août 1985 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par la SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE RASPAIL 226, représentée par son gérant ; la société demande au Conseil d'Etat :
1° d'annuler le jugement du tribunal administratif de Paris en date du 13 mai 1985 en tant que, par ce jugement, le tribunal, après avoir décidé que le montant des droits assignés en principal à la société requérante devait être réduit à 93 728 F, a rejeté le surplus de ses conclusions, lesquelles tendaient à la décharge complète du complément de prélèvement sur les profits de construction auquel elle a été assujettie par avis de mise en recouvrement du 10 août 1981, ainsi que des pénalités correspondantes ;
2° de lui accorder ladite décharge ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Turquet de Beauregard, Conseiller d'Etat,
- les conclusions de M. Fouquet, Commissaire du gouvernement ;

Sur le principe de l'imposition :
Considérant que, selon l'article 235 quater I et I ter 3 du code général des impôts, les plus-values réalisées par les personnes physiques et par les entreprises industrielles et commerciales relevant de l'impôt sur le revenu à l'occasion de la cession d'immeubles ou de fractions d'immeubles qu'elles ont construits ou fait construire ou des droits immobiliers y afférents, donnent lieu à la perception d'un prélèvement ; qu'aux termes de l'article 23 de la loi n° 81-1160 du 30 décembre 1981 portant loi de finances pour 1982 : "IV. Pour l'application des dispositions de l'article 235 quater I ter-3 du code général des impôts et du I du présent article, les entreprises redevables du prélèvement s'entendent des entreprises individuelles et des sociétés visées aux articles 8 et 239 ter du même code. Cette disposition a un caractère interprétatif" ; qu'il résulte de l'ensemble de ces dispositions et en particulier des termes mêmes de la dernière d'entre elles, que la SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE RASPAIL 226 doit être regardée comme soumise, à raison des profits de construction susmentionnés, au prélèvement prévu à l'article 235 quater I du code ;
Considérant toutefois que la société requérante prétend au bénéfice de l'instruction ministérielle du 25 juin 1982 prise pour l'application de la loi du 30 décembre 1981, aux termes de laquelle il a été décidé de ne pas poursuivre le recouvrement du prélèvement sur la part des profits revenant aux associés, ayant la qualité d'entreprises de construction de logements, qui sont globalement déficitaires avant toute application du régime spécial simplifié prévu à l'article 209 quater A du code général des impôts ; que si un tel énéfice lui a été à bon droit reconnu par l'administration au titre de l'année 1977, la SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE RASPAIL 226 n'établit pas en tout état de cause que ses associées Promex et Sofedi aient été, pour les exercices 1976 et 1978, globalement déficitaires au sens des dispositions précitées de l'instruction ministérielle ; qu'elle restait donc soumise, au titre de ces deux années, au prélèvement sur l'ensemble des profits de construction réalisés ; que, dès lors, elle n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté ses conclusions sur ce point ;

Sur les bases d'imposition :
Considérant que la société requérante conteste la réintégration par l'administration d'une somme de 543 084 F au motif que celle-ci aurait été versée à Mme X..., en application d'une convention signée entre les deux parties le 23 septembre 1973, en vue de l'éviction d'un certain nombre de locataires, et qu'elle constituerait ainsi une charge déductible du prix de vente de l'immeuble construit ;
Considérant que si la société n'a pu justifier de l'emploi de la moitié de la somme litigieuse devant la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires, celle-ci a estimé, dans sa séance du 23 octobre 1980, que l'autre moitié de la somme correspondait à des indemnités d'éviction et de relogement destinées aux locataires occupant l'immeuble au jour de son acquisition ; que l'administration, qui supporte sur ce point la charge de la preuve, n'apporte aucun élément de nature à contredire une telle appréciation ; qu'il y a lieu, dès lors, de réduire les profits de construction réalisés par la société de 1976 à 1978, tels qu'ils ont été évalués par l'administration, de 271 542 F et de diminuer à due concurrence les bases d'imposition de la société au prélèvement sur les profits de construction au titre des années 1976 à 1978 ;
Sur les intérêts de retard :
Considérant que lorsque l'administration impose au prélèvement sur les profits de construction une société qui n'a été soumise à cet impôt au titre des années 1976 à 1978 que par l'effet des dispositions précitées de la loi du 30 décembre 1981, les droits en principal ne peuvent être, en l'absence de dispositions le prévoyant expressément, assortis d'intérêts de retard pour la période antérieure à la publication de la loi ;

Considérant que les impositions litigieuses ont été assorties d'intérêts de retard, calculés à compter de la date à laquelle les prélèvements auraient dû être payés, si la société avait été, à l'époque, assujettie à cet impôt, et jusqu'à la fin des mois, antérieures à la publication de la loi précitée du 30 décembre 1981 au cours desquels ont été notifiées les bases des impositions litigieuses ; que la société est recevable et fondée à soutenir que l'administration a méconnu le champ d'application de la loi dans le temps en assortissant les sommes dues d'intérêts de retard ;
Article 1er : Les profits de construction réalisés par la SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE RASPAIL 226 au cours des années 1976 à 1978 et qui ont servi à calculer la base d'imposition de cette société au prélèvement sur les profits de construction sont réduits à concurrence de 271 542 F.
Article 2 : La SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE RASPAIL 226 est déchargée de la différence entre le montant du prélèvement sur les profits de construction laissé à sa charge par le jugement attaqué et celui qui résulte de l'article 1er ci-dessus.
Article 3 : La SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE RASPAIL 226 est déchargée de la totalité des intérêts de retard dont le rappel des droits avait été assorti.
Article 4 : Le jugement attaqué est réformé en ce qu'il a de contraire à la présente décision.
Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de la SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE RASPAIL 226 est rejeté.
Article 6 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE RASPAIL 226 et au ministre délégué auprès du ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et du budget, chargé du budget.


Synthèse
Formation : 7 / 9 ssr
Numéro d'arrêt : 71146
Date de la décision : 27/02/1991
Sens de l'arrêt : Réduction décharge
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

CONTRIBUTIONS ET TAXES - GENERALITES - TEXTES FISCAUX - TEXTE APPLICABLE (DANS LE TEMPS ET DANS L'ESPACE) - DANS LE TEMPS - GENERALITES - RETROACTIVITE - Loi rétroactive - Instruction limitant la rétroactivité : invocable sur le fondement de l'article L - 80-A du livre des procédures fiscales.

19-01-01-02-02-01-02, 19-01-01-03-03-02 Selon l'article 235 quater I et I ter 3 du C.G.I., les plus- values réalisées par les personnes physiques et par les entreprises industrielles et commerciales relevant de l'impôt sur le revenu à l'occasion de la cession d'immeubles ou de fractions d'immeubles qu'elles ont construits ou fait construire ou des droits immobiliers y afférents, donnent lieu à la perception d'un prélèvement. L'article 23 de la loi n° 81-1160 du 30 décembre 1981 portant loi de finances pour 1982 dispose : "IV. Pour l'application des dispositions de l'article 235 quater I ter-3 du C.G.I. et du I du présent article, les entreprises redevables du prélèvement s'entendent des entreprises individuelles et des sociétés visées aux articles 8 et 239 ter du même code. Cette disposition a un caractère interprétatif". Il résulte de l'ensemble de ces dispositions et en particulier des termes mêmes de la dernière d'entre elles, que la S.C.I. doit être regardée comme soumise, à raison des profits de construction susmentionnés, au prélèvement prévu à l'article 235 quater I du code. Toutefois la société prétend au bénéfice de l'instruction ministérielle du 25 juin 1982 prise pour l'application de la loi du 30 décembre 1981, aux termes de laquelle il a été décidé de ne pas poursuivre le recouvrement du prélèvement sur la part des profits revenant aux associés, ayant la qualité d'entreprises de construction de logements, qui sont globalement déficitaires avant toute application du régime spécial simplifié prévu à l'article 209 quater A du C.G.I.. Si un tel bénéfice lui a été à bon droit reconnu par l'administration au titre de l'année 1977, la S.C.I. n'établit pas en tout état de cause que ses associées aient été, pour les exercice 1976 et 1978, globalement déficitaires au sens des dispositions précitées de l'instruction ministérielle. Elle restait donc soumise, au titre de ces deux années, au prélèvement sur l'ensemble des profits de construction réalisés.

CONTRIBUTIONS ET TAXES - GENERALITES - TEXTES FISCAUX - OPPOSABILITE DES INTERPRETATIONS ADMINISTRATIVES - OPPOSABILITE SUR LE FONDEMENT DE L'ARTICLE L - 80 A DU LPF - CHAMP D'APPLICATION - Interprétation relative à la détermination de la matière imposable ou de l'assiette de l'impôt - Existence - Instruction limitant la rétroactivité d'une disposition législative à caractère rétroactif.


Références :

CGI 235 quater I, 209 quater A
Loi 81-1160 du 30 décembre 1981 art. 23 Finances pour 1982


Publications
Proposition de citation : CE, 27 fév. 1991, n° 71146
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Rougevin-Baville
Rapporteur ?: M. Turquet de Beauregard
Rapporteur public ?: M. Fouquet

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1991:71146.19910227
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