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08/03/1991 | FRANCE | N°70216

France | France, Conseil d'État, 2 / 6 ssr, 08 mars 1991, 70216


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 5 juillet 1985 et 5 novembre 1985 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la société anonyme "Union sidérurgique du Nord et de l'Est" (USINOR) dont le siège est ..., et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement en date du 3 avril 1985 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa requête tendant à ce que le port autonome de Dunkerque soit condamné à lui verser une indemnité de 461 737 F augmentée des intérêts, en réparation du préjudice constitu

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Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 5 juillet 1985 et 5 novembre 1985 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la société anonyme "Union sidérurgique du Nord et de l'Est" (USINOR) dont le siège est ..., et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement en date du 3 avril 1985 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa requête tendant à ce que le port autonome de Dunkerque soit condamné à lui verser une indemnité de 461 737 F augmentée des intérêts, en réparation du préjudice constitué par l'immobilisation de deux navires affrêtés par elle par suite de la mise hors service de l'écluse "Charles de Gaulle", qui donne accès à ce port depuis la mer ;
2°) condamne le port autonome de Dunkerque à lui verser une indemnité de 461 737 F, augmentée des intérêts légaux à compter du 10 novembre 1980 et des intérêts capitalisés,
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Errera, Conseiller d'Etat,
- les observations de la SCP Célice, Blancpain, avocat de la société anonyme "Union sidérurgique du Nord et de l'Est" et de la SCP Piwnica, Molinié, avocat du port autonome de Dunkerque,
- les conclusions de M. Abraham, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que la société "Union sidérurgique du Nord et de l'Est de la France" (USINOR) demande réparation du préjudice que lui a causé l'immobilisation des navires "Inayama" et "X... Maru" affrétés par elle, en raison de la fermeture inopinée de l'écluse "Charles de Gaulle", qui commande l'accès des grands navires au port de Dunkerque, entre le 27 septembre et le 5 octobre 1980, décidée pour l'exécution de travaux de réparation de la station de pompage de cette écluse rendus nécessaires par un dérèglement de cet ouvrage ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que ce dérèglement était la conséquence d'un vice de conception de l'ouvrage et avait été précédé de plusieurs incidents annonciateurs ; que le Port de Dunkerque n'apporte pas ainsi la preuve qui lui incombe de l'entretien normal de l'ouvrage qui seule serait susceptible de dégager sa responsabilité à l'égard des usagers de l'ouvrage public constitué par l'écluse "Charles de Gaulle" ; que la société USINOR, qui a la qualité d'usager et dont le préjudice est la conséquence directe de la fermeture de l'écluse, est dès lors fondée à en demander réparation et à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande ;
Considérant que le préjudice subi par la société requérante est égal au montant des surestaries qu'elle a versées en application du contrat d'afrètement, à la suite du retard pris pour le déchargement des navires ; qu'il résulte de l'instruction que le montant des surestaries payées par USINOR s'est élevé à 461 737 F ; qu'il y a lieu de condamner le port autonome de Dunkerque à lui verser une indemnité de ce montant ; que cette indemnité doit porter intérêts au taux légal à compter du 10 novembre 1980, date de la première demande d'indemnisation présentée par la société USINOR au port autonome de Dunkerque ;

Considérant que la capitalisation des intérêts a été demandée le 5 juillet 1985 ; qu'à cette date il était dû au moins une année d'intérêts ; que, dès lors, conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil, il y a lieu de faire droit à cette demande ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Lille en date du 3 avril 1985 est annulé.
Article 2 : Le port autonome de Dunkerque est condamné à verser à la société USINOR (Union sidérurgique du Nord et de l'Est) la somme de 461 737 F. Cette somme portera intérêts au taux légal à compter du 10 novembre 1980. Les intérêts échus le 5 juillet 1985 seront capitalisés à cette date pour produire eux-mêmes intérêts.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à la société USINOR, au port autonome de Dunkerque et au ministre de l'équipement, du logement, des transports et de la mer.


Synthèse
Formation : 2 / 6 ssr
Numéro d'arrêt : 70216
Date de la décision : 08/03/1991
Sens de l'arrêt : Condamnation
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

PORTS - UTILISATION DES PORTS - NAVIGATION DANS LES PORTS - Obstacle à la navigation dans un port autonome - Dérèglement d'un ouvrage public résultant d'un vice de conception - Conséquences - Responsabilité du port à l'égard des usagers - la preuve d'un entretien normal n'ayant pas été apportée.

50-02-07, 60-01-02-01-03-02, 67-03-02-02, 67-03-03-02 Société "Union sidérurgique du Nord et de l'Est de la France" (USINOR) demandant réparation du préjudice que lui a causé l'immobilisation de navires affrétés par elle, en raison de la fermeture inopinée de l'écluse "Charles de Gaulle" qui commande l'accès des grands navires au port de Dunkerque, décidée pour l'exécution de travaux de réparation de la station de pompage de cette écluse rendus nécessaires par un dérèglement de cet ouvrage. Ce dérèglement était la conséquence d'un vice de conception de l'ouvrage et avait été précédé de plusieurs incidents annonciateurs. Le port de Dunkerque n'apporte pas ainsi la preuve qui lui incombe de l'entretien normal de l'ouvrage qui seule serait susceptible de dégager sa responsabilité à l'égard des usagers de l'ouvrage public constitué par l'écluse "Charles de Gaulle". La société USINOR, qui a la qualité d'usager et dont le préjudice est la conséquence directe de la fermeture de l'écluse, est dès lors fondée à en demander réparation.

RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - FAITS SUSCEPTIBLES OU NON D'OUVRIR UNE ACTION EN RESPONSABILITE - FONDEMENT DE LA RESPONSABILITE - RESPONSABILITE SANS FAUTE - RESPONSABILITE ENCOURUE DU FAIT DE L'EXECUTION - DE L'EXISTENCE OU DU FONCTIONNEMENT DE TRAVAUX OU D'OUVRAGES PUBLICS - USAGERS DES OUVRAGES PUBLICS - Existence - Dérèglement de la station de pompage d'une écluse - Responsabilité du port autonome de Dunkerque à l'égard des usagers.

60-04-01-05-01 Nécessité de fermer l'écluse qui commande l'accès des grands navires au port de Dunkerque entre le 27 septembre et le 5 octobre 1980 du fait des travaux de réparation de la station de pompage de ladite écluse rendus nécessaires par un dérèglement de cet ouvrage. Préjudice subi par la société USINOR par suite du retard pris pour le déchargement des navires. Caractère anormal et spécial. Réparation de la totalité du préjudice subi mise à la charge du Port autonome de Dunkerque (1).

- RJ1 RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - REPARATION - PREJUDICE - CARACTERE SPECIAL ET ANORMAL DU PREJUDICE - PREJUDICE PRESENTANT CE CARACTERE - Existence - Sujétions diverses - En matière de navigation - Impossibilité d'entrer dans un port du fait de la fermeture temporaire d'une écluse (1).

TRAVAUX PUBLICS - DIFFERENTES CATEGORIES DE DOMMAGES - DOMMAGES SURVENUS SUR LES AERODROMES - DANS LES PORTS - SUR LES CANAUX ET DANS LES VOIES NAVIGABLES - PORTS - Immobilisation de navires causée par un dérèglement de la station de pompage d'une écluse du port de Dunkerque - Dérèglement - Conséquence d'un vice de conception de l'ouvrage - Preuve d'un entretien normal de l'ouvrage non apportée - Responsabilité du port de Dunkerque.

TRAVAUX PUBLICS - DIFFERENTES CATEGORIES DE DOMMAGES - DOMMAGES CAUSES PAR L'EXISTENCE OU LE FONCTIONNEMENT D'OUVRAGES PUBLICS - CONCEPTION ET AMENAGEMENT DE L'OUVRAGE - Voie de circulation - Voie navigable - Dérèglement de la station de pompage d'une écluse - Vice de conception.


Références :

Code civil 1154

1. Comp. 1984-06-22, Secrétaire d'Etat auprès du ministre des transports chargé de la mer c/ Société Sealink U.K. Limited, p. 246


Publications
Proposition de citation : CE, 08 mar. 1991, n° 70216
Publié au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : Mme Bauchet
Rapporteur ?: M. Errera
Rapporteur public ?: M. Abraham
Avocat(s) : SCP Célice, Blancpain, SCP Piwnica, Molinié, Avocat

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1991:70216.19910308
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