Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 8 avril 1988 et 8 août 1988 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour le Territoire de la Polynésie française, représenté par le président de son gouvernement en exercice ; le Territoire de la Polynésie française demande au Conseil d'Etat :
1° d'annuler le jugement du 9 février 1988 par lequel le tribunal administratif de Papeete a annulé, à la demande des époux X..., l'arrêté du 2 juillet 1985 déclarant d'utilité publique les travaux d'installation d'un dépôt d'hydrocarbures à Uturaerae, commune d'Uturoa-Raiatea (îles sous le vent) et l'arrêté du 16 août 1985 déclarant cessible immédiatement la parcelle de 19 530 mètres carrés dont sont propriétaires les époux X... au lieu-dit Motutiofai ;
2° de rejeter la demande présentée par les époux X... devant le tribunal administratif de Papeete ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu le décret du 5 novembre 1936 réglementant l'expropriation pour cause d'utilité publique dans les établissements français d'Océanie ;
Vu la loi n° 84-820 du 6 septembre 1984 portant statut du territoire de Polynésie française ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Touvet, Auditeur,
- les observations de la S.C.P. Lemaitre, Monod, avocat du Territoire de la Polynésie française et de la S.C.P. Le Prado, avocat des époux X...,
- les conclusions de Mme Denis-Linton, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que la constatation et la déclaration d'utilité publique de travaux ne figurent dans aucune des matières énumérées par l'article 3 de la loi du 6 septembre 1984, qui énumère limitativement les compétences de l'Etat en Polynésie française, comme relevant de la compétence de l'Etat ; qu'ainsi la constatation et la déclaration de l'utilité publique des travaux d'installation par le territoire d'un dépôt d'hydrocarbures à Uturaerae, dans la commune d'Uturoa-Raiatea, relevaient, en vertu de l'article 2 de la même loi, de la compétence des autorités du Territoire ;
Considérant qu'aux termes de l'article 62 de la même loi : "Toutes les matières qui sont de la compétence du territoire relèvent de l'assemblée territoriale, à l'exception de celles qui sont attribuées par la présente loi au conseil des ministres du territoire ou au président du gouvernement du territoire" ; que parmi les matières énumérées aux articles 24 à 43 de la même loi, dans sa rédaction en vigueur à la date des arrêtés attaqués, comme attribuées au gouvernement du Territoire et à ses membres ou au président du gouvernement du Territoire, ne figuraient ni la constatation ni la déclaration d'utilité publique de travaux ; qu'ainsi la constatation et la déclaraion de l'utilité publique des travaux d'installation par le Territoire du dépôt d'hydrocarbures dont s'agit relevaient de la compétence de l'assemblée territoriale ;
Considérant, dès lors, que l'arrêté du président du gouvernement du Territoire en date du 2 juillet 1985 déclarant d'utilité publique lesdits travaux, et par voie de conséquence, celui en date du 16 août 1985 déclarant immédiatement cessible la propriété des époux X... ont été pris par une autorité incompétente ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le Territoire de la Polynésie française n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Papeete a annulé l'arrêté du 2 juillet 1985 déclarant d'utilité publique les travaux d'installation d'un dépôt d'hydrocarbures à Uturaerae, commune d'Uturoa-Raiatea (îles sous le vent) et l'arrêté du 16 août 1985 déclarant cessible immédiatement la parcelle de 19 530 mètres carrés dont sont propriétaires les époux X... au lieu-dit Motutiofai ;
Article 1er : La requête du Territoire de la Polynésie française est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée au Territoire de la Polynésie française, aux époux X..., à la commune d'Uturoa-Raiatea et au ministre des départements et territoires d'outre-mer.