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11/10/1991 | FRANCE | N°106483

France | France, Conseil d'État, 4 / 1 ssr, 11 octobre 1991, 106483


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat les 7 avril 1989 et 1er juin 1989, présentés par la société anonyme TRANSPORTS GRAVELEAU, dont le siège social est avenue de l'Europe à La Verrio (85130) ; la société anonyme TRANSPORTS GRAVELEAU demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement en date du 29 décembre 1988 par lequel le tribunal administratif de Nantes a annulé la décision de l'inspecteur du travail chargé des transports de la subdivision de Nantes en date du 28 novembre 1985 autorisant le

licenciement de M. X..., salarié protégé ;
2°) de rejeter la demand...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat les 7 avril 1989 et 1er juin 1989, présentés par la société anonyme TRANSPORTS GRAVELEAU, dont le siège social est avenue de l'Europe à La Verrio (85130) ; la société anonyme TRANSPORTS GRAVELEAU demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement en date du 29 décembre 1988 par lequel le tribunal administratif de Nantes a annulé la décision de l'inspecteur du travail chargé des transports de la subdivision de Nantes en date du 28 novembre 1985 autorisant le licenciement de M. X..., salarié protégé ;
2°) de rejeter la demande de M. X... ;
3°) de condamner M. X... à payer à la société anonyme TRANSPORTS GRAVELEAU la somme de 5 000 F sur le fondement de l'article 1er du décret du 2 septembre 1988 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du travail ;
Vu l'ordonnance n° 82-270 du 26 mars 1982 ;
Vu le décret n° 83-1025 du 28 novembre 1983 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de Mme Colmou, Maître des requêtes,
- les observations de la S.C.P. Piwnica, Molinié, avocat de M. Gérard X...,
- les conclusions de M. de Froment, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article L.436-1 du code du travail : "Tout licenciement envisagé par l'employeur d'un membre titulaire ou suppléant du comité d'entreprise ... ne peut intervenir que sur autorisation de l'inspecteur du travail dont dépend l'établissement" ;
Considérant qu'en vertu de ces dispositions, les salariés légalement investis de fonctions représentatives bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle ; que, lorsque le licenciement d'un de ces salariés est envisagé, ce licenciement ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou l'appartenance syndicale de l'intéressé ;
Considérant qu'en application de ces dispositions, l'inspecteur du travail du ministère chargé des transports (subdivision de Nantes) a, par une décision en date du 28 novembre 1985, autorisé la société anonyme TRANSPORTS GRAVELEAU à licencier M. X... membre suppléant du comité d'entreprise ; que M. X... a déféré cette décision au tribunal administratif de Nantes le 9 décembre 1987 ;
Considérant, d'une part, qu'aux termes du dernier alinéa ajouté à l'article 1er du décret du 11 janvier 1965 par le décret du 28 novembre 1983 : "Les délais de recours ne sont opposables qu'à la condition d'avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours dans la notification de la décision" ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la décision de l'inspecteur du travail en date du 28 novembre 1985 ait été notifiée à M. X... dans les conditions ci-dessus rappelées ; que la saisine par M. X... des tribunaux de l'ordre judiciaire pour faire reconnaître le caractère abusif de son licenciement n'a pu faire courir les délais de recours à l'encontre de la décision administrative autorisant ce licenciement ; que, dès lors, la société anonyme TRANSPORTS GRAVELEAU n'est pas fondée à soutenir que la demande de M. X... était tardive ;

Considérant, d'autre part, qu'il résulte clairement de la convention collective nationale des transports routiers que les ingénieurs et cadres visés par cette convention bénéficient du régime de retraite et de prévoyance institué par la convention collective nationale du 14 mars 1947 ; que si, par accord du 4 février 1983 approuvé le 21 mars suivant, ce régime a été aménagé pour permettre aux salariés bénéficiaires de l'ordonnance susvisée du 26 mars 1982 relative à l'abaissement de l'âge de la retraite des assurés du régime général, de faire liquider leur retraite complémentaire entre soixante et soixante-cinq ans sans application des coefficients d'abattement antérieurement en vigueur, ni ces stipulations, ni les dispositions de ladite ordonnance figurant aux articles L. 351-1 et suivants et R. 351-1 et suivants du code de la sécurité sociale ne prévoient la mise à la retraite d'office des salariés atteignant l'âge de soixante ans ; que, dès lors, en autorisant par sa décision du 28 novembre 1985 le licenciement de M. X... par le motif qu'il avait atteint l'âge de soixante ans et ne pouvait être admis à poursuivre son activité, l'inspecteur du travail de Nantes a commis une erreur de droit ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède et sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par M. X..., que la société anonyme TRANSPORTS GRAVELEAU n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a annulé la décision de l'inspecteur du travail, chargé des transports de la subdivision de Nantes en date du 28 novembre 1985 ;

Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article 1er du décret susvisé du 2 septembre 1988 et de condamner M. X... à payer à la société anonyme TRANSPORTS GRAVELEAU la somme qu'il demande au titre des sommes exposées par lui et non comprises dans les dépens ;
Article 1er : La requête de la société anonyme TRANSPORTS GRAVELEAU est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la société anonyme TRANSPORTS GRAVELEAU, à M. X... et au ministre du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle.


Synthèse
Formation : 4 / 1 ssr
Numéro d'arrêt : 106483
Date de la décision : 11/10/1991
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Recours pour excès de pouvoir

Analyses

ACTES LEGISLATIFS ET ADMINISTRATIFS - VALIDITE DES ACTES ADMINISTRATIFS - MOTIFS - ERREUR DE DROIT - EXISTENCE - Travail - Licenciement d'un salarié protégé par le motif qu'il a atteint l'âge de 60 ans et ne peut être admis à poursuivre son activité - Absence de disposition ou de stipulation prévoyant la mise à la retraite d'office des salariés atteignant l'âge de 60 ans.

01-05-03-01, 66-07-01-04 Il résulte clairement de la convention collective nationale des transports routiers que les ingénieurs et cadres visés par cette convention bénéficient du régime de retraite et de prévoyance institué par la convention collective nationale du 14 mars 1947. Si, par accord du 4 février 1983 approuvé le 21 mars suivant, ce régime a été aménagé pour permettre aux salariés bénéficiaires de l'ordonnance du 26 mars 1982 relative à l'abaissement de l'âge de la retraite des assurés du régime général, de faire liquider leur retraite complémentaire entre soixante et soixante-cinq ans sans application des coefficients d'abattement antérieurement en vigueur, ni ces stipulations, ni les dispositions de ladite ordonnance figurant aux articles L.351-1 et suivants et R.351-1 et suivants du code de la sécurité sociale ne prévoient la mise à la retraite d'office des salariés atteignant l'âge de soixante ans. Dès lors, en autorisant par sa décision du 28 novembre 1985 le licenciement de M. G. par le motif qu'il avait atteint l'âge de soixante ans et ne pouvait être admis à poursuivre son activité, l'inspecteur du travail de Nantes a commis une erreur de droit.

TRAVAIL ET EMPLOI - LICENCIEMENTS - AUTORISATION ADMINISTRATIVE - SALARIES PROTEGES - CONDITIONS DE FOND DE L'AUTORISATION OU DU REFUS D'AUTORISATION - Motifs pouvant légalement servir de base à une autorisation de licenciement - Limite d'âge - Absence de disposition ou de stipulation prévoyant la mise à la retraite d'office des salariés - Licenciement d'un salarié protégé par le motif qu'il a atteint l'âge de 60 ans et ne peut être admis à poursuivre son activité - Erreur de droit.


Références :

Code de la sécurité sociale L351-1, R351-1
Code du travail L436-1
Convention collective nationale du 14 mars 1947
Décret 65-29 du 11 janvier 1965 art. 1
Décret 83-1025 du 28 novembre 1983
Décret 88-907 du 02 septembre 1988 art. 1
Ordonnance 82-270 du 26 mars 1982


Publications
Proposition de citation : CE, 11 oct. 1991, n° 106483
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : Mme Bauchet
Rapporteur ?: Mme Colmou
Rapporteur public ?: M. de Froment

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1991:106483.19911011
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