Vu la requête, enregistrée le 20 février 1991 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour Mlle Y...
X..., demeurant ... ; Mlle X... demande au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 22 décembre 1990 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté du 18 décembre 1990 par lequel le préfet du Vaucluse a décidé sa reconduite à la frontière ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié par l'avenant et le protocole du 22 décembre 1986 ;
Vu l'ordonnance n° 45-2668 du 2 novembre 1945 modifiée, notamment par la loi du 2 août 1989 et la loi du 10 janvier 1990 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 46-1708 du 31 juillet 1946, le décret n° 63-934 du 30 septembre 1963 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- les observations de Me Cossa, avocat de Mlle Y...
X...,
- les conclusions de M. Lame, Commissaire du gouvernement ;
Sur la recevabilité de la requête :
Considérant que la date de notification du jugement attaqué n'est pas établie ; que, par suite, le délai du recours contentieux prévu par l'article 22 bis de l'ordonnance susvisée du 2 novembre 1945 modifiée n'ayant pas commencé à courir, la requête de Mlle X... n'est pas tardive ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article R. 200 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel rendues applicables au contentieux des arrêtés de reconduite à la frontière par l'article R. 241-16 dudit code, les jugements des tribunaux administratifs doivent mentionner que les parties ont été entendues ou dûment convoquées à l'audience ; que le jugement attaqué ne comporte pas mention de l'audition de Mlle X..., ni celle de son conseil, ni de leur absence malgré une convocation régulière ; que ledit jugement est par suite entaché d'irrégularité ;
Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande de Mlle X... ;
Sur la légalité de l'arrêté de reconduite à la frontière :
Considérant, d'une part, qu'il est constant que Mlle X... s'est maintenue sur le territoire français pendant plus de trois mois sans être titulaire d'un titre de séjour régulièrement délivré ;
Considérant, d'autre part, qu'aux termes du premier alinéa de l'article 4 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, dans la rédaction résultant du premier avenant audit accord : "Les membres de la famille qui s'établissent en France sont en possession d'un certificat de résidence de même durée de validité que celui de la personne qu'ils rejoignent" ; qu'aux termes du premier alinéa du titre II du protocole annexé audit avenant : "Les membres de la famille s'entendent du conjoint d'un ressortissant algérien, de ses enfants mineurs ainsi que des enfants de moins de dix-huit ans dont il a juridiquement la charge en vertu d'une décision de l'autorité judiciaire algérienne" ; qu'il faut entendre par enfants mineurs les enfants mineurs de 18 ans et non ceux de 19 et 21 ans conformément au droit algérien ; qu'ainsi Mlle X... qui n'a pas fait l'objet d'une décision l'admettant au séjour en France au titre du regroupement familial avant la date à laquelle elle a atteint l'âge de 18 ans n'est pas fondée à soutenir qu'en ordonnant par l'arrêté attaqué sa reconduite à la frontière le préfet du Vaucluse aurait méconnu les stipulations précitées de l'accord franco-algérien ;
Considérant enfin, que si Mlle X... fait état de la présence d'une grande partie de sa famille en France et des difficultés qu'elle éprouverait à son retour en Algérie, il ne résulte pas des pièces du dossier que l'arrêté ordonnant sa reconduite à la frontière, eu égard aux effets d'une telle mesure et compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, ait porté à son droit au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels a été décidée cette mesure ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mlle X... n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêté du 18 décembre 1990 par lequel le préfet du Vaucluse a ordonné sa reconduite à la frontière ;
Article 1er : Le jugement du conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Marseille du 22 décembre 1990 est annulé.
Article 2 : La demande de Mlle X... dirigée contre l'arrêté du préfet du Vaucluse du 18 décembre 1990 ordonnant sa reconduite à la frontière et le surplus des conclusions de sa requête sont rejetés.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à Mlle X..., au préfet du Vaucluse et au ministre de l'intérieur.