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11/10/1991 | FRANCE | N°48270

France | France, Conseil d'État, 8 / 7 ssr, 11 octobre 1991, 48270


Vu le recours du MINISTRE DELEGUE AUPRES DU MINISTRE DE L'ECONOMIE ET DES FINANCES, CHARGE DU BUDGET, enregistré au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 27 janvier 1983 ; le ministre demande que le Conseil d'Etat :
1°) réforme le jugement du 5 juillet 1982 par lequel le tribunal administratif de Paris a accordé à M. Jean-Paul X... la réduction du supplément d'impôt sur le revenu auquel il a été assujetti au titre des années 1973, 1974 et 1975 ;
2°) remette intégralement l'imposition contestée à la charge de M. Jean-Paul X... ;
Vu les autres pièces du do

ssier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le code des tribunaux admini...

Vu le recours du MINISTRE DELEGUE AUPRES DU MINISTRE DE L'ECONOMIE ET DES FINANCES, CHARGE DU BUDGET, enregistré au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 27 janvier 1983 ; le ministre demande que le Conseil d'Etat :
1°) réforme le jugement du 5 juillet 1982 par lequel le tribunal administratif de Paris a accordé à M. Jean-Paul X... la réduction du supplément d'impôt sur le revenu auquel il a été assujetti au titre des années 1973, 1974 et 1975 ;
2°) remette intégralement l'imposition contestée à la charge de M. Jean-Paul X... ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Le Menestrel, Conseiller d'Etat,
- les observations de Me Ricard, avocat de M. Jean-Paul X...,
- les conclusions de M. Arrighi de Casanova, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. X... est entré à la société des Laboratoires Dausse en 1962 ; qu'il a été nommé en 1967 directeur général adjoint et a joué un rôle important dans le développement de cette société ; qu'à la suite de la transformation de la société entre 1969 et 1972, il a été écarté de la direction de celle-ci et ses responsabilités ont été, comme le niveau de sa rémunération, sensiblement amoindries ; qu'une convention est intervenue le 15 mai 1972 entre lui et son employeur, qui constatait qu'à la suite du regroupement des activités des deux anciens groupes Dausse et Robert et Carrière, les attributions du Dr X... se trouvaient désormais sans justification, et qui résiliait toutes les conventions intervenues antérieurement entre l'intéressé et les diverses sociétés, existantes ou disparues, du groupe Dausse ; qu'en contrepartie, il était accordé au Dr X... une somme forfaitaire composée d'une partie fixe de 1 500 000 F réglable en trois annuités et d'une partie conditionnelle d'un montant de 750 000 F également réglable en trois annuités, pour autant qu'au cours de l'exercice précédant le versement de l'annuité, le chiffre d'affaires réalisé par la société sur une liste de produits déterminés atteigne le chiffre d'affaires correspondant réalisé en 1971, condition qui s'est réalisée par la suite ;
Considérant qu'en admettant même que les sommes ainsi versées à M. X... aient été déterminées en tenant compte de la part active qu'il avait prise à la mise au point de médicaments, et alors même qu'il pourrait être regardé comme l'inventeur de certains d'entre eux, il est constant que ces produits, mis au point dans le cadre des relations contractuelles liant M. X... à son employeur en qualité de salarié, n'ont pas donné lieu à des brevets pris au nom de l'intéressé mais restaient, au contraire, la propriété de son employeur ; qu'ainsi les sommes versées à ce titre, trouvant leur origine dans un lien contractuel entre employeur et salarié, ne sauraient être regardées comme des produits perçus par un inventeur, au sens du 2 de l'article 92 du code général des impôts ; que, par suite, le ministre est fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont estimé qu'à concurrence du tiers du total des sommes versées, celles-ci auraient dû être imposées dans la catégorie des bénéfices non commerciaux ;

Considérant, toutefois, qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige tant par l'effet dévolutif de l'appel que par le recours incident de M. X..., d'examiner les autres moyens soulevés par celui-ci devant le tribunal administratif et devant le Conseil d'Etat ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'eu égard aux fonctions antérieurement exercées par M. X... et aux conditions dans lesquelles il a été privé de celles-ci, l'intéressé a subi, alors même qu'il est demeuré salarié de l'entreprise, des troubles dans ses conditions d'existence que les indemnités litigieuses ont eu, pour partie, pour objet de réparer ; que ces indemnités présentent, dans cette mesure, le caractère de dommages-intérêts non imposables ; qu'il sera fait une juste appréciation des circonstances de l'espèce en évaluant cette part au tiers du total des sommes versées, soit 750 000 F ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède, d'une part, que le ministre n'est pas fondé à se plaindre que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a réduit d'un même montant la base du complément d'impôt mis à la charge de M. X..., et d'autre part, que ce dernier n'est pas fondé à demander, par la voie de l'appel incident, la décharge totale des impositions contestées ;
Article 1er : Le recours du MINISTRE DELEGUE AUPRES DU MINISTRE DE L'ECONOMIE ET DES FINANCES, CHARGE DU BUDGET et les conclusions incidentes de M. X... sont rejetés.
Article 2 : La présente décision sera notifiée au ministre délégué au budget et à M. Jean-Paul X....


Synthèse
Formation : 8 / 7 ssr
Numéro d'arrêt : 48270
Date de la décision : 11/10/1991
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

19-04-02-05-01 CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOTS SUR LES REVENUS ET BENEFICES - REVENUS ET BENEFICES IMPOSABLES - REGLES PARTICULIERES - BENEFICES NON COMMERCIAUX - PERSONNES, PROFITS, ACTIVITES IMPOSABLES -Inventeurs - Inventeurs salariés - Notion.

19-04-02-05-01 Le contribuable est entré à la société des Laboratoires X. en 1962 ; il a été nommé en 1967 directeur général adjoint et a joué un rôle important dans le développement de cette société. A la suite de la transformation de la société entre 1969 et 1972, il a été écarté de la direction de celle-ci et ses responsabilités ont été, comme le niveau de sa rémunération, sensiblement amoindries. Une convention est intervenue en 1972 entre lui et son employeur, qui constatait que les attributions de l'intéressé se trouvaient désormais sans justification, et qui résiliait toutes les conventions intervenues antérieurement entre l'intéressé et les diverses sociétés, existantes ou disparues, du groupe. En contrepartie, il lui était accordé une somme forfaitaire composée d'une partie fixe de 1 500 500 F réglable en trois annuités et d'une partie conditionnelle d'un montant de 750 000 F également réglable en trois annuités, pour autant qu'au cours de l'exercice précédant le versement de l'annuité, le chiffre d'affaires réalisé par la société sur une liste de produits déterminés atteigne le chiffre d'affaires correspondant réalisé en 1971, condition qui s'est réalisée par la suite. En admettant même que les sommes ainsi versées aient été déterminées en tenant compte de la part active qu'il avait prise à la mise au point de médicaments, et alors même qu'il pourrait être regardé comme l'inventeur de certains d'entre eux, il est constant que ces produits, mis au point dans le cadre des relations contractuelles liant le contribuable à son employeur en qualité de salarié, n'ont pas donné lieu à des brevets pris au nom de l'intéressé mais restaient, au contraire, la propriété de son employeur. Ainsi les sommes versées à ce titre, trouvant leur origine dans un lien contractuel entre employeur et salarié, ne sauraient être regardées comme des produits perçus par un inventeur, au sens du 2 de l'article 92 du C.G.I.. Toutefois, eu égard aux fonctions antérieurement exercées par l'intéressé et aux conditions dans lesquelles il a été privé de celles-ci, il a subi, alors même qu'il est demeuré salarié de l'entreprise, des troubles dans ses conditions d'existence que les indemnités litigieuses ont eu, pour partie, pour objet de réparer ; ces indemnités présentent, dans cette mesure, le caractère de dommages-intérêts non imposables. Il sera fait une juste appréciation des circonstances de l'espèce en évaluant cette part au tiers du total des sommes versées.


Références :

CGI 92


Publications
Proposition de citation : CE, 11 oct. 1991, n° 48270
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Rougevin-Baville
Rapporteur ?: M. Le Menestrel
Rapporteur public ?: M. Arrighi de Casanova

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1991:48270.19911011
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