Vu 1°) sous le n° 98 731, la requête et le mémoire enregistrés les 3 juin 1988 et 3 octobre 1988 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la société des MATERIAUX DU VAL-DE-LOIRE, ayant son siège social à Suèvres (41500) Mer ; la société des MATERIAUX DU VAL-DE-LOIRE demande que le Conseil d'Etat annule le jugement en date du 29 mars 1988 par lequel le tribunal administratif d' Orléans a, à la demande du comité de défense du Val de Suèvres et autres, annulé l'arrêté du 24 avril 1986 par lequel le commissaire de la République du Loir-et-Cher a autorisé la société requérante à exploiter une carrière de sable au lieu-dit "Le Domino" à Suèvres ;
Vu 2°) sous le n° 98 876, la requête et le mémoire, enregistrés les 8 juin 1988 et 3 octobre 1988 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la société des MATERIAUX DU VAL-DE-LOIRE et tendant aux mêmes fins que la requête n° 98 731, par les mêmes moyens et soutenant en outre que le jugement attaqué a été rendu au terme d'une procédure irrégulière en ce qu'il omet d'analyser les différents mémoires produits par les parties, violant l'article R.172 du code des tribunaux administratifs ;
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu le code minier et notamment les articles 84 et 106 ;
Vu la loi du 10 juillet 1976 sur la protection de la nature ;
Vu le décret n° 79-1108 du 20 décembre 1979 ;
Vu le décret n° 85-448 du 23 avril 1985 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Lerche, Conseiller d'Etat,
- les observations de la SCP Célice, Blancpain, avocat de la SOCIETE A RESPONSABILITE LIMITEE SOCIETE DES MATERIAUX DU VAL-DE-LOIRE et de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de la commune de Mer, du comité de défense du Val de Suèvres, du Syndicat intercommunal à vocations multiples d'études et d'aménagement du pays de Chambord, du syndicat intercommunal d'aménagements touristiques et de loisirs du Val-de-Loire et de la commune de Saint-Dyé-sur-Loire,
- les conclusions de M. Lamy, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que les requêtes susvisées présentent à juger les mêmes questions, qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;
Sur la légalité du jugement attaqué :
Considérant que l'enquête publique relative à la demande d'autorisation présentée par la société des MATERIAUX DU VAL-DE-LOIRE en vue d'exploiter une carrière au lieu dit "Le Domino" à Suèvres (Loir-et-Cher) a été ordonnée par arrêté préfectoral en date du 18 septembre 1985 ; que, dès lors, conformément aux dispositions du II de l'article 43 du décret du 23 avril 1985, il n'y avait pas lieu de faire application des dispositions de l'article 20 de ce décret ; que, dans ces conditions, le commissaire-enquêteur n'était pas tenu de "consigner dans un document séparé ses conclusions motivées en précisant si elles sont favorables ou non à l'opération" ; qu'il résulte des pièces du dossier que, néanmoins, ce commissaire-enquêteur a explicitement indiqué qu'il était favorable à l'ouverture et à l'exploitation de la carrière sous réserve qu'une décision intervienne "de retenir le secteur du "Domino" dans une zone favorable à l'extraction de granulats" ; qu'il a ainsi émis un avis motivé et que cette motivation est suffisante au regard des dispositions de l'article 17 du décret du 20 décembre 1979 ; qu'il ressort des pièces du dossier qu'à la date où a été pris l'arrêté litigieux, ledit secteur figurait dans l'inventaire des sites de substitution, dressé par le BRGM, afin de compenser l'abandon des gisements de granulats exploités dans le lit mineur de la Loire en vertu du protocole du 8 janvier 1981 et qu'ainsi la réserve mise par le commissaire-enquêteur devait être regardée comme levée ; que, dès lors, la société des MATERIAUX DU VAL-DE-LOIRE est fondée à soutenir que c'est à tort que, par les jugements attaqués, le tribunal administratif d' Orléans a jugé que l'avis du commissaire-enquêteur ne comportait pas une motivation régulière, et annulé pour ce motif l'arrêté du 24 avril 1986 par lequel le préfet du Loir-et-Cher a autorisé l'ouverture de la carrière litigieuse ;
Considérant, toutefois, qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel d'examiner les autres moyens soulevés par le comité de défense du Val de Suèvres et autres devant le tribunal administratif d' Orléans ;
Considérant, d'une part, que l'étude d'impact comportait une étude sérieuse, en relation avec l'importance et la nature de l'opération, de tous les éléments prévus par l'article 2 de la loi du 10 juillet 1976 et l'article 10 du décret du 22 décembre 1979 ; qu'en particulier, était jointe au dossier d'enquête une étude paysagère très complète qui traitait de l'impact visuel de la carrière sur le site de Saint-Dyé-sur-Loire ; que la sous-estimation mineure du niveau de bruit invoquée par les demandeurs, à la supposer établie, n'est pas, à elle seule, de nature à entacher d'irrégularité l'étude d'impact ; que l'étude réalisée par l'inspection générale de l'environnement à la demande du ministre, avait pour objet de compléter l'avis donné par le délégué régional à l'architecture et à l'environnement et n'avait dès lors pas à être jointe à l'étude d'impact ; que l'existence de cette étude n'était pas de nature à motiver l'ouverture d'une nouvelle enquête ;
Considérant, d'autre part, que l'exploitation autorisée par la décision attaquée prendra, avec le même tonnage, la suite des extractions actuelles effectuées par dragage dans le lit mineur de la Loire et auxquelles il sera mis fin ; qu'il suit de là que la circulation des véhicules ne se trouvera pas sensiblement modifiée ni en volume ni en trajets ; que les conditions de l'autorisation imposées au pétitionnaire permettront de limiter et compenser les nuisances que l'exploitation pourrait comporter, notamment, pour l'environnement et la vocation touristique de la région ; que, dans ces circonstances, le préfet du Loir-et-Cher qui, saisi d'une demande d'autorisation de carrière sur un site déterminé, n'avait pas à examiner si une autre localisation aurait été préférable, n'a pas commis une erreur manifeste d'appréciation au regard des articles 84 et 106 du code minier en délivrant l'autorisation d'extraction demandée ;
Article 1er : Les jugements du 29 mars 1988 du tribunal administratif d' Orléans sont annulés.
Article 2 : Les demandes présentées par le comité de défense du Val de Suèvres et autres devant le tribunal administratif d'Orléans sont rejetées.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à la société des MATERIAUX DU VAL-DE-LOIRE, au comité de défense du Val de Suèvres, au Syndicat intercommunal à vocations multiples d'études et d'aménagement du Pays de Chambord, au syndicat intercommunal d'aménagements touristiques et de loisirs du Val de Loire, à la commune de Saint-Dyé-sur-Loire, au ministre de l'équipement, du logement, des transports et de l'espace.