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23/10/1991 | FRANCE | N°68898

France | France, Conseil d'État, 9 / 8 ssr, 23 octobre 1991, 68898


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 24 mai 1985 et 24 septembre 1985 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Edouard Y..., demeurant ... ; M. Y... demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du 26 mars 1985 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande en décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et des pénalités afférentes, auxquelles il a été assujetti au titre des années 1976 à 1978 ;
2°) lui accorde décharge desdites impositions ;
Vu les autres

pièces du dossier ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours admi...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 24 mai 1985 et 24 septembre 1985 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Edouard Y..., demeurant ... ; M. Y... demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du 26 mars 1985 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande en décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et des pénalités afférentes, auxquelles il a été assujetti au titre des années 1976 à 1978 ;
2°) lui accorde décharge desdites impositions ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu le code général des impôts ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de Mme Vestur, Maître des requêtes,
- les observations de la S.C.P. Piwnica, Molinié, avocat de M. Edouard Y...,
- les conclusions de M. X.... Martin, Commissaire du gouvernement ;

En ce qui concerne l'imposition des revenus distribués :
Sur la régularité de la procédure d'imposition et la charge de la preuve :
Considérant, d'une part, qu'aux termes des dispositions, alors en vigueur, de l'article 179 du code général des impôts : "Est taxé d'office à l'impôt sur le revenu tout contribuable qui n'a pas souscrit dans le délai légal la déclaration de son revenu global prévue par l'article 170" et qu'aux termes de l'article 179 A du même code, dans sa rédaction issue du I.1 de l'article 3 de la loi n° 77-1453 du 29 décembre 1977 : "La procédure de taxation d'office en cas de défaut de production de la déclaration des revenus prévue à l'article 170 n'est applicable que si le contribuable n'a pas régularisé sa situation dans les trente jours de la notification d'une première mise en demeure" ; qu'il résulte de l'instruction que M. Y... n'a pas souscrit, dans le délai légal, sa déclaration de revenu global pour les années 1976 et 1977 ; que, s'agissant de l'année 1976, aucune disposition législative n'imposait à l'administration de mettre en demeure M. Y... de régulariser sa situation ; que, s'agissant de l'année 1977, il résulte de l'instruction que M. Y... n'a pas retiré le pli contenant une première mise en demeure datée du 2 juin 1978, qui, contrairement à ce qu'il soutient, lui a été régulièrement présenté, et n'a régularisé sa situation que dans les trente jours de la notification d'une seconde mise en demeure ; qu'ainsi, l'administration a pu légalement recourir à la procédure de taxation d'office pour les deux années 1976 et 1977 ;

Considérant, d'autre part, que le désaccord persistant entre l'administration et M. Y... sur l'imposition de revenus réputés distribués au titre de l'année 1978 n'était pas au nombre de ceux qui peuvent être portés devat la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires ; qu'en ne donnant pas suite à la demande de M. Y... qui tendait à la saisine de cette commission, l'administration n'a donc commis aucune irrégularité ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède, d'une part, que les impositions assignées à M. Y..., du chef de revenus réputés distribués par la société à responsabilité limitée "While Shop Diffusion", ont été régulièrement établies, d'autre part, que la charge de la preuve incombe, en ce qui concerne les années 1976 et 1977, à M. Y... et en ce qui concerne l'année 1978, à l'administration ;
Sur le bien-fondé des impositions :
Considérant, en premier lieu, que pour contester l'imposition des revenus réputés distribués correspondant aux recettes retenues dans l'assiette de l'impôt sur les sociétés dû par la société à responsabilité limitée "While Shop Diffusion" au titre des années 1976 et 1977, M. Y... soutient que l'administration n'aurait pas mis en cause la régularité de la comptabilité tenue par cette société pour les exercices clos au cours desdites années ; qu'il résulte, toutefois, de l'instruction que, lors de ces années, la société a procédé à l'enregistrement global en fin de journée de ses recettes, sans pouvoir produire aucune pièce de nature à justifier les écritures ainsi passées ; que, contrairement à ce que soutient M. Y..., cette irrégularité suffisait à autoriser l'administration à regarder la comptabilité de la société comme dénuée de toute force probante ; qu'ainsi, M. Y... ne peut prétendre apporter, par la comptabilité de la société à responsabilité limitée "While Shop Diffusion", la preuve qui lui incombe ;

Considérant, en second lieu, que pour reconstituer les recettes perçues par la société au cours des trois années 1976, 1977 et 1978, l'administration a appliqué aux montants effectifs des achats revendus des coefficients de bénéfice brut qu'elle a calculés en se fondant sur le rapport constaté, pour un échantillon d'articles, entre les prix d'achat obtenus par la société et les prix de vente pratiqués par celle-ci ; que ces coefficients ont été d'abord pondérés en fonction des marges appliquées sur divers types d'articles, puis minorés pour tenir compte tant des remises accordées que des périodes de solde ; que, si M. Y... soutient que les coefficients ainsi retenus seraient excessifs, notamment du fait que 65 % des ventes de la société seraient réalisés sur les marchés et que les périodes de soldes seraient plus longues que celles qui ont été admises par le vérificateur, il ne l'établit pas ; que les coefficients plus faibles qui, selon lui, auraient dû être retenus, ne sont assortis d'aucune justification de nature à démontrer qu'ils auraient permis de déterminer les bases d'imposition avec une précision meilleure que ceux que l'administration a utilisés ; qu'ainsi, M. Y... n'apporte pas la preuve, qui lui incombe, de l'exagération du montant des recettes omises par la société "While Shop Diffusion" et, partant, des revenus qui sont réputés lui avoir été distribués et à raison desquels il a été imposé au titre des années 1976 et 1977 ; qu'à défaut de toute contestation sérieuse par M. Y... des coefficients dont elle s'est servi pour reconstituer les recettes perçues par la société en 1978, l'administration doit être regardée comme apportant la preuve du bien-fondé de l'évaluation des revenus réputés distribués à raison elle a imposé M. Y... au titre de l'année 1978 ;
En ce qui concerne l'imposition des revenus d'origine indéterminée :

Considérant que l'avis de vérification approfondie de situation fiscale d'ensemble adressé à M. Y... le 27 juin 1980 mentionnait la faculté qui lui était donnée de se faire assister par un conseil de son choix ; qu'ainsi le moyen selon lequel cette mention aurait été omise, manque en fait ;
Considérant qu'en se fondant sur les dispositions, alors en vigueur, de l'article 176 du code général des impôts, l'administration a adressé à M. Y... une demande qui indiquait avec précision les points sur lesquels ce dernier était invité à fournir des éclaircissements ou des justifications ; que M. Y... a prétendu expliquer l'origine d'apports sur ses comptes bancaires par la négociation de bons anonymes acquis par son épouse et justifier l'excèdent des "disponibilités employées" sur les "disponibilités dégagées" résultant des balances de trésorerie établies pour les années 1976 et 1977 en faisant état de prêts qui lui auraient été personnellement consentis et du produit de la négociation de bons anonymes ; que, eu égard à l'imprécision de ces allégations, qui n'ont été assorties, en ce qui concerne les bons anonymes, d'aucun document ou pièce justificative et, en ce qui concerne les prêts, que d'attestations tardives et dépourvues de valeur probante, ces explications doivent être regardées comme équivalant à un refus de répondre aux demandes de justifications de l'administration ; que, par suite, cette dernière était en droit, sans être tenue de l'inviter à fournir des précisions supplémentaires, de taxer d'office M. Y... à l'impôt sur le revenu en application des dispositions, alors en vigueur, de l'article 179, alinéa 2, du code général des impôts ; qu'il appartient, dès lors, à M. Y... de prouver l'exagération de l'évaluation faite par l'administration des revenus d'origine indéterminée qui ont été compris dans ses bases d'imposition au titre des années 1976 et 1977 ;

Considérant que M. Y... n'apporte aucun élément de nature à constituer cette preuve ;
En ce qui concerne les pénalités :
Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des termes d'une lettre adressée par l'administration le 18 novembre 1980 à M. Y... que les pénalités dont ont été assortis les droits auxquels il a été assujetti, ont fait l'objet de la motivation exigée par la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
Considérant, en deuxième lieu, que les pénalités appliquées sont celles qui étaient prévues, à l'époque, par l'article 1729 du code général des impôts, lorsque la mauvaise foi du redevable est établie ; que, dans ces conditions, le moyen tiré par M. Y... de ce que les dispositions alors en vigueur de l'article 1733 du même code, lui avaient été à tort appliquées manque en fait ;
Considérant, enfin, que, dans les circonstances de l'espèce, et compte tenu de la gravité des agissements de M. Y..., l'administration établit la mauvaise foi de celui-ci ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. Y... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande en décharge des suppléments d'impôt sur le revenu auxquels il a été assujetti au titre des années 1976, 1977 et 1978 ;
Article 1er : La requête de M. Y... est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Y... etau ministre délégué au budget.


Synthèse
Formation : 9 / 8 ssr
Numéro d'arrêt : 68898
Date de la décision : 23/10/1991
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

19-04-01-02 CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOTS SUR LES REVENUS ET BENEFICES - REGLES GENERALES PROPRES AUX DIVERS IMPOTS - IMPOT SUR LE REVENU


Références :

CGI 179, 179 A, 176, 1729, 1733
Loi 77-1453 du 29 décembre 1977 art. 3
Loi 79-587 du 11 juillet 1979


Publications
Proposition de citation : CE, 23 oct. 1991, n° 68898
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Vestur
Rapporteur public ?: Ph. Martin

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1991:68898.19911023
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