Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 10 août 1989 et 11 décembre 1989 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la COMMUNE DE LA CHAUSSEE-TIRANCOURT, représentée par son maire en exercice ; la commune demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du 12 juin 1989 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a annulé, sur déféré du préfet de la Somme, deux délibérations en date respectivement des 26 février 1988 et 7 avril 1988 par lesquelles le conseil municipal de la COMMUNE DE LA CHAUSSEE-TIRANCOURT a, d'une part, décidé d'adopter définitivement le projet de plan d'occupation des sols modifié et, d'autre part, approuvé ladite modification du plan d'occupation des sols ;
2°) rejette le déféré du préfet de la Somme présenté devant le tribunal administratif d' Amiens ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des communes ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Devys, Auditeur,
- les observations de Me Bouthors, avocat de la COMMUNE DE LA CHAUSSEE-TIRANCOURT,
- les conclusions de M. Abraham, Commissaire du gouvernement ;
Sur la légalité de la délibération du 26 février 1988 :
Considérant que, par une délibération du 26 février 1988, le conseil municipal de La Chaussée-Tirancourt a décidé "d'adopter définitivement le projet de plan d'occupation des sols modifié" ; que cette délibération doit être regardée comme une mesure préparatoire à un acte approuvant la modification du plan d'occupation des sols ; qu'ainsi le préfet de la Somme n'était recevable à en demander l'annulation qu'en se fondant sur ses vices propres ; qu'il résulte de ce qui précède que c'est à tort que le tribunal administratif d'Amiens s'est fondé sur l'atteinte portée par la modification à l'économie générale du plan d'occupation des sols pour annuler la délibération du 26 février 1988 ;
Considérant, toutefois, qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner l'autre moyen soulevé par le préfet de la Somme devant le tribunal administratif d' Amiens ;
Considérant que la circonstance que le maire de La Chaussée-Tirancourt ait, pour la séance du 26 février 1988, reçu pouvoir de deux conseillers municipaux, en violation de l'article L. 121-12 du code des communes, n'est pas de nature, eu égard au nombre de conseillers municipaux ayant voté pour le projet de délibération, à entacher la légalité de la délibération du 26 février 1988 ; que la COMMUNE DE LA CHAUSSEE-TIRANCOURT est ainsi fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d' Amiens a annulé la élibération de son conseil municipal du 26 février 1988 ;
Sur la légalité de la délibération du 7 avril 1988 :
Considérant qu'aux termes de l'article L.123-4 du code de l'urbanisme : "Le plan d'occupation des sols est révisé dans les formes prévues au 1er alinéa de l'article L.123-3, puis soumis à enquête publique par le maire ou le président de l'établissement public de coopération intercommunale, puis est approuvé dans les conditions prévues au second alinéa de l'article L.123-3-1. Un plan d'occupation des sols approuvé peut également être modifié par délibération du conseil municipal après enquête publique à la condition qu'il ne soit pas porté atteinte à son économie générale et que la modification ne concerne pas les espaces boisés classés ou ne comporte pas de graves risques de nuisance" ;
Considérant que, par une délibération du 7 avril 1988, le conseil municipal de la COMMUNE DE LA CHAUSSEE-TIRANCOURT a approuvé une modification du plan d'occupation des sols de la commune consistant à créer au sein de la zone NC un secteur NCb dans lequel sont interdites les installations classées liées à l'activité agricole ainsi que les installations non classées liées à l'activité agricole qui par leur situation, leurs dimension ou leur exploitation sont de nature à gêner le voisinage ; qu'eu égard à l'importance de l'activité agricole pour cette commune rurale, à la dimension du secteur concerné qui couvre près du cinquième de la superficie communale et aux interdictions édictées, ces nouvelles dispositions portent atteinte à l'économie générale du plan d'occupation des sols de la commune ; qu'ainsi, le conseil municipal de la COMMUNE DE LA CHAUSSEE-TIRANCOURT ne pouvait, sans méconnaître l'article L. 123-4 susvisé du code de l'urbanisme, recourir, en l'espèce, à la procédure de modification ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la commune n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a annulé la délibération du conseil municipal du 7 avril 1988 approuvant la modification du plan d'occupation des sols de la COMMUNE DE LA CHAUSSEE-TIRANCOURT ;
Article 1er : Le jugment du tribunal administratif d' Amiens en date du 12 juin 1989 est annulé en tant qu'il a annulé la délibération du conseil municipal de la COMMUNE DE LA CHAUSSEE-TIRANCOURT en date du 26 février 1988.
Article 2 : Les conclusions de la demande du préfet de la région Picardie, préfet de la Somme devant le tribunal administratif d'Amiens tendant à l'annulation de la délibération du 26 février 1988 et le surplus des conclusions de la requête de la COMMUNE DE LA CHAUSSEE-TIRANCOURT sont rejetées.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à la COMMUNE DE LA CHAUSSEE-TIRANCOURT, au préfet de la région Picardie, préfet de la Somme et au ministre de l'équipement, du logement, des transports et de l'espace.