Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat les 10 juin 1988 et 10 octobre 1988, présentés pour l'ASSOCIATION NATIONALE DE READAPTATION SOCIALE, ayant son siège ..., représentée par son président en exercice ; l'association demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement en date du 7 mars 1988 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 3 novembre 1986 par lequel le ministre des affaires sociales et de l'emploi a annulé la décision de l'inspecteur du travail du 16 mai 1986 autorisant le licenciement de M. X... et de la décision du 1er décembre 1986 du même ministre rejetant le recours gracieux dirigé contre la décision du 3 novembre 1986 ;
2°) annule pour excès de pouvoir lesdites décisions ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du travail ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. de Bellescize, Conseiller d'Etat,
- les observations de la S.C.P. Waquet, Farge, Hazan, avocat de l'ASSOCIATION NATIONALE DE READAPTATION SOCIALE (A.N.R.S.),
- les conclusions de M. Le Chatelier, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article L.425-1 du code du travail, le licenciement d'un délégué du personnel "ne peut intervenir que sur autorisation de l'inspecteur du travail dont dépend l'établissement" ; qu'aux termes de l'article R.436-3 du même code, applicable notamment aux délégués du personnel : "La demande d'autorisation de licenciement est adressée par lettre recommandée avec accusé de réception à l'inspecteur du travail dont dépend l'établissement où est employé l'intéressé ..." ;
Considérant qu'il ressort des pièces versées au dossier que M. X..., délégué du personnel, était employé en qualité d'éducateur spécialisé par l'ASSOCIATION NATIONALE DE READAPTATION SOCIALE, dont le siège est ... ; que s'il exerçait ses fonctions dans un centre d'accueil et de réinsertion qui était situé ... dans le 14ème arrondissement, ce centre, bien qu'il eût une implantation géographique distincte, ne présentait aucun degré d'autonomie en ce qui concerne la gestion du personnel ; que toutes les décisions de restructuration concernant ce centre ont été prises au siège de la rue de Rivoli ; que, d'ailleurs, la demande d'autorisation de licenciement a été signée par le responsable du personnel du siège de l'association ; qu'ainsi le centre de la rue Didot ne constituait pas un "établissement" au sens des dispositions précitées de l'article R.436-3 du code du travail ; que, dès lors, l'inspecteur du travail de la section n° 1 A du département de Paris, dans le ressort de laquelle était situé le siège de ladite association, était compétent territorialement pour lui accorder l'autoriation de licencier pour motif économique M. X... ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'en se fondant sur le seul motif que cet inspecteur était territorialement incompétent pour annuler l'autorisation délivrée par lui, le ministre du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle a, dans sa décision attaquée du 3 novembre 1986 confirmée sur recours gracieux le 1er décembre 1986, commis une erreur de droit ; que, par suite, l'association requérante est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande dirigée contre lesdites décisions ministérielles ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Paris, en date du 7 mars 1988 et les décisions du ministre du travail et de l'emploi des 3 novembre et 1er décembre 1986 sont annulés.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à l'ASSOCIATION NATIONALE DE READAPTATION SOCIALE, à M. X... et au ministre du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle.