La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

06/01/1992 | FRANCE | N°91382

France | France, Conseil d'État, 4 ss, 06 janvier 1992, 91382


Vu la requête, enregistrée le 16 septembre 1987 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat par Mme Raymonde X..., demeurant ... ; Mme X... demande au Conseil d'Etat :
1) d'annuler un jugement en date du 26 juin 1987 par lequel le tribunal administratif de Marseille a, sur renvoi du conseil de prud'hommes de Marseille de l'appréciation de la légalité de la décision implicite autorisant son licenciement pour motif économique, rejeté l'exception d'illégalité ;
2) de déclarer que cette décision est entachée d'illégalité ;
Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code du travail ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cou...

Vu la requête, enregistrée le 16 septembre 1987 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat par Mme Raymonde X..., demeurant ... ; Mme X... demande au Conseil d'Etat :
1) d'annuler un jugement en date du 26 juin 1987 par lequel le tribunal administratif de Marseille a, sur renvoi du conseil de prud'hommes de Marseille de l'appréciation de la légalité de la décision implicite autorisant son licenciement pour motif économique, rejeté l'exception d'illégalité ;
2) de déclarer que cette décision est entachée d'illégalité ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du travail ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Hirsch, Auditeur,
- les observations de la S.C.P. Guiguet, Bachellier, Potier de la Varde, avocat de la société anonyme Génin,
- les conclusions de Mme Laroque, Commissaire du gouvernement ;

Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant que si Mme X... soutient que le tribunal administratif de Marseille aurait omis de viser le mémoire produit par elle le 25 juin 1987, il résulte des pièces du dossier qu'en tout état de cause ce mémoire ne contenait qu'un moyen nouveau par rapport aux précédentes écritures de Mme X... tiré de ce que la société anonyme Génin ne pouvait se prévaloir d'aucune autorisation tacite de le licencier ; que le jugement a répondu à ce moyen ; que, par suite, la requérante n'est pas fondée à soutenir que le jugement attaqué serait entaché d'un vice de forme de nature à entraîner son annulation ;
Sur la légalité de l'autorisation de licenciement :
Considérant qu'aux termes de l'article L.321-7 du code du travail dans sa rédaction alors applicable : "quelle que soit l'entreprise ou la profession et sauf en cas de règlement judiciaire ou de liquidation de biens, tout licenciement, individuel ou collectif, fondé sur un motif économique, d'ordre conjoncturel ou structurel, est subordonné à une autorisation de l'autorité administrative compétente" ; que selon le deuxième alinéa de l'article L.321-9 du code du travail alors applicable aux demandes de licenciement pour cause économique autres que celles portant sur les cas visés à l'article L.321-3 : "L'autorité administrative dispose d'un délai de sept jours, renouvelable une fois, pour vérifier la réalité du motif économique invoqué et pour faire connaître soit son accord, soit son refus d'autorisation" ; qu'à l'expiration de ce délai, en l'absence de réception d'une décision de l'autorité administrative compétente, l'autorisation sollicitée est réputée acquise ;

Considérant que la société anonyme Génin a, le 7 mars 1985, sollicité du directeur départemental du travail et de l'emploi des Bouches-du-Rhône l'autorisation de licencier Mme X... ; que la société anonyme Génin ayant satisfait à l'obligation qui lui est faite par le 5° de l'article R.321-8 du code du travail de fournir "la nature de la ou des raisons économiques, financières ou techniques invoquées" sans qu'aucune autre disposition législative ou réglementaire lui imposât de joindre à l'appui de sa demande les documents comptables et financiers attestant de la réalité de ces raisons, Mme X... n'est pas fondée à soutenir qu'aucune décision tacite autorisant son licenciement n'aurait été acquise à l'expiration du délai précité, faute pour l'employeur d'avoir présenté une demande complète au directeur départemental du travail et de l'emploi ;
Considérant qu'aux termes de l'article L.122-14 du code du travail : "L'employeur ou son représentant qui envisage de licencier un salarié doit, avant toute décision, convoquer l'intéressé par lettre recommandée en lui indiquant l'objet de la convocation. Au cours de l'entretien, l'employeur est tenu d'indiquer le ou les motifs de la décision envisagée et de recueillir les explications du salarié. Lors de cette audition, le salarié peut se faire assister par une personne de son choix appartenant au personnel de l'entreprise. En cas de licenciement pour motif économique, la demande d'autorisation mentionnée à l'article L.321-7 ne peut être adressée par l'employeur à l'autorité administrative compétente qu'après l'entretien visé au premier alinéa ci-dessus" ; qu'en vertu de l'article L.122.14-6, ces mêmes dispositions ne sont pas applicables aux licenciements opérés par les employeurs qui occupent habituellement moins de onze salariés ;

Considérant que si le défaut d'entretien préalable de l'employeur avec le salarié dans le cas où, d'après les textes précités, il est obligatoire, eu égard à la nature du licenciement envisagé, à l'effectif de l'entreprise et à l'ancienneté du salarié, entraîne la nullité de la décision administrative autorisant le licenciement, il ressort des pièces du dossier que la société SA Génin qui comptait moins de onze salariés n'était pas tenue d'avoir avec Mme X... l'entretien préalable prévu à l'article L.122-14 ; que, dès lors le moyen tiré de la violation de l'article L.122-14 doit être écarté ;
Considérant que le moyen tiré de ce que l'absence d'entretien préalable aurait méconnu l'article 30 de la convention collective nationale des cabinets d'administrateurs de biens ne peut être utilement invoqué à l'encontre d'une décision administrative d'autorisation de licenciement ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la société anonyme Génin connaissait des difficultés économiques qui l'ont conduite à diminuer ses charges salariales ; que, dès lors qu'un motif économique réel était à l'origine du licenciement, la circonstance alléguée que des reproches d'ordre personnel auraient été faits à Mme X... par son employeur est, en tout état de cause, sans influence sur la légalité de la décision implicite autorisant son licenciement ;
Considérant que, contrairement aux allégations de la requérante, il ne ressort pas des pièces du dossier que celle-ci ait été remplacée dans ses fonctions par un salarié nouvellement embauché ; qu'en outre la circonstance alléguée que la société anonyme Génin aurait procédé à de nouvelles embauches sans accord préalable de l'autorité administrative compétente, contrairement aux dispositions de l'article L.321-1 du code du travail relatives au contrôle de l'emploi, est sans influence sur la légalité de la décision autorisant le licenciement de Mme X... ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la décision tacite autorisant le licenciement de Mme X... n'est ni fondée sur des faits matériellement inexacts ni entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ; que, par suite, Mme X... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté l'exception d'illégalité soulevée à l'encontre de ladite décision ;
Article 1er : La requête de Mme X... est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à Mme X..., à la société anonyme Génin et au ministre du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle.


Type d'affaire : Administrative

Analyses

TRAVAIL ET EMPLOI - LICENCIEMENTS - AUTORISATION ADMINISTRATIVE - SALARIES NON PROTEGES - LICENCIEMENT POUR MOTIF ECONOMIQUE - MODALITES DE DELIVRANCE DE L'AUTORISATION ADMINISTRATIVE - QUESTIONS PROPRES AUX AUTORISATIONS TACITES.

TRAVAIL ET EMPLOI - LICENCIEMENTS - AUTORISATION ADMINISTRATIVE - SALARIES NON PROTEGES - LICENCIEMENT POUR MOTIF ECONOMIQUE - REALITE DU MOTIF ECONOMIQUE - MOTIF REEL.

TRAVAIL ET EMPLOI - LICENCIEMENTS - AUTORISATION ADMINISTRATIVE - SALARIES NON PROTEGES - LICENCIEMENT POUR MOTIF ECONOMIQUE - REGLES DE PROCEDURE CONTENTIEUSE SPECIALES - APPRECIATION DE LEGALITE SUR RENVOI PREJUDICIEL DU JUGE PRUD'HOMAL.


Références :

Code du travail L321-7, L321-9, L321-3, R321-8, L122-14, L122, L321-1


Publications
Proposition de citation: CE, 06 jan. 1992, n° 91382
Inédit au recueil Lebon
RTFTélécharger au format RTF
Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Hirsch
Rapporteur public ?: Mme Laroque

Origine de la décision
Formation : 4 ss
Date de la décision : 06/01/1992
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 91382
Numéro NOR : CETATEXT000007833645 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;1992-01-06;91382 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award